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Philippe Miret (Michelin): ” D’ici à cinq ans, 85 % de nos achats passeront par notre place de marché “

Le fabricant de pneus lance un site internet grand public autour de ses activités de cartes et guides touristiques.

Pourquoi avoir choisi de créer Michelin-travel. com sous forme de filiale, alors qu’elle met en ligne une activité déjà existante au sein de Michelin, à savoir les cartes et les guides ? Le site internet risque clairement de cannibaliser l’activité classique des cartes et guides. Il nous a donc semblé plus efficace de créer une filiale spécialisée. Elle sera moins gênée que ne le serait un service interne. Entre en jeu également une question de vitesse et d’efficacité : Michelin a décidé de s’engager fortement dans ce secteur, où nous avions peu investi jusqu’à présent par rapport à nos concurrents. Or, une start up avance plus vite qu’un grand groupe, et elle n’a pas les mêmes contraintes.Michelin a-t-il des participations dans d’autres start up ? Oui, mais dans une seule. Il y a un an, nous avons pris part à la création de RubberNetwork, une place de marché destinée à l’industrie du caoutchouc. Nous n’avons pas fait le choix de financer d’autres sociétés. Mais ce type de stratégie reste envisageable pour un développement futur.Comment s’organise le démarrage de cette place de marché ? RubberNetwork regroupe un peu plus de la moitié du secteur du caoutchouc et la première transaction sera sans doute réalisée à la fin du premier semestre. Mais la montée en puissance est extrêmement lente, car très compliquée. D’abord, nous sommes dans un métier où la concurrence est rude. Il faut donc du temps pour arriver à se mettre d’accord entre industriels. Ensuite, il n’est pas simple d’arriver à choisir les bons fournisseurs technologiques, ici, IBM, I2 et Ariba. Enfin, peu de places de marché fonctionnent aujourd’hui, excepté pour les enchères. C’est une technologie émergente, et les premiers à l’utiliser payent sa mise au point. Il faut aussi adapter significativement les processus d’achat de l’entreprise, et cela demande du temps et de l’énergie.Quel retour en attendez-vous ? A terme, la très grande majorité de nos achats passera par RubberNetwork. Mais il faudra au moins cinq ans pour atteindre une proportion de 85 %. Notre objectif est également de demander à RubberNetwork de créer des liens avec plusieurs places de marché, car nous souhaitons qu’elle soit connectée à d’autres. A l’avenir, il existera des galaxies de places de marché. Et l’important sera d’être relié à l’une d’elles plutôt qu’être un électron connecté à une myriade de prestataires.Comment réagirez-vous aux demandes des constructeurs automobiles qui voudront passer par d’autres places de marché ? Il est dans nos habitudes de nous adapter à nos clients. Dans le cas de la vente aux constructeurs automobiles, si l’un d’eux décide d’acheter via une place de marché et si ce n’est pas assorti de conditions exorbitantes, nous le suivrons dans sa demande. Actuellement, Covisint prend forme. Sa première ambition était d’atteindre des prix bas, inférieurs de 5 % à ceux du marché. Or, la marge des équipementiers est souvent moindre. Ils sont donc réticents à se soumettre à de telles exigences.En plus de la vente aux professionnels, envisagez-vous de vendre directement aux particuliers sur internet ? Nous avons réalisé aux Etats-Unis une expérience de vente en direct, de pneus personnalisables à la marque BF Goodrich. Opérationnelle depuis bientôt un an, cette plate-forme nous permet de mieux comprendre les attentes des internautes en matière d’achat de produits sur internet. Cette expérience reste cependant marginale en termes de ventes. Pour autant, nous ne restons pas inactifs. Comprenant que nous ne sommes pas dans une logique de transaction, mais de shopping, il faut donc accompagner le consommateur au long de son achat – par exemple, avec un outil de sélection des pneus, et la localisation d’un point de vente et de montage. D’ici à l’été, l’acheteur pourra même visualiser un plan du trajet pour se rendre à ce point de vente. Nous ne pouvons pas nous substituer au distributeur. Et notre stratégie sur internet n’est pas de chercher la désintermédiation, mais, au contraire, de renforcer notre partenariat avec notre réseau de distribution.Quel est le degré d’avancement de ce type de service ? Il est bien plus avancé en Amérique du Nord. L’Europe en est à la phase de réalisation, et il y a quelques initiatives dans le reste du monde. Parallèlement, nous avons aussi créé un site sur la Formule 1 pour accompagner le réengagement de Michelin en tant que fournisseur. Cela nous permet de toucher une clientèle jeune, intéressée par la course automobile et la conduite sportive.

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Propos recueillis par Corinne Montculier