Sous les marbres et le verre fumé du nouveau siège social de Nvidia, à Santa Clara, en plein c?”ur de la Silicon Valley, des affiches promettent aux employés une prime de 2 500 dollars (soit 2 845 euros) si le candidat qu’ils présentent au département des ressources humaines est finalement embauché. “C’est notre plus gros obstacle aujourd’hui, ironise Derek Perek, directeur produit chez Nvidia. Il nous faut recruter vite pour soutenir notre croissance.”
Elle équipe un PC sur trois
Une croissance particulièrement rapide, puisque Nvidia, dont l’effectif est passé en un an de 500 personnes à plus de 1 200, peut désormais s’enorgueillir d’équiper en processeur graphique plus d’un PC sur trois parmi lesquels ceux de Dell, de Hewlett-Packard ou les portables de Toshiba. Les processeurs Ge Force équipent aussi la console de jeu X-Box de Microsoft et l’Imac à écran plat d’Apple. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Pour le quatrième trimestre de son exercice fiscal 2001, Nvidia a ainsi annoncé le 15 février le doublement de son bénéfice par action à 41 cents. Les ventes trimestrielles, elles, font un bond du même ordre à quelque 500 millions de dollars. Des résultats qui n’auront pas empêché le fabricant de puces graphiques d’être pris à son tour, momentanément, dans la tourmente générée par le scandale Enron.Nvidia a préféré annoncer elle-même à la communauté financière qu’elle faisait l’objet d’une enquête de la commission américaine des opérations en Bourse (la SEC) pour avoir imputé au mauvais exercice comptable 3,6 millions de coûts de production. “Une goutte d’eau”, ont commenté aussitôt les analystes de Wall Street pour qui, plus amplement informés, cette erreur n’affecte pas de façon significative ses résultats.Le fabricant peut donc poursuivre sa route. Récemment, avant même le lancement, le 5 février, de sa dernière génération de processeurs graphiques Ge Force 4, Nvidia annonçait qu’il entendait développer une gamme de processeurs graphiques pour l’électronique grand public et s’engager également sur le marché des unités graphiques intégrées (GPU). “Pour l’instant, nous dominons le marché des processeurs graphiques indépendants, utilisés pour les ordinateurs portables et les stations de travail. Cette nouvelle approche nous ouvre non seulement les portes du PC grand public mais aussi de tous les équipements susceptibles d’utiliser une puce graphique”, commente Derek Perek.Si l’enjeu est alléchant, le jeu n’en est pas moins dangereux. Nvidia court, en effet, le risque de se retrouver en compétition avec Intel, qui reste le principal fournisseur de composants graphiques intégrés pour cartes mères. “Il suffirait qu’Intel modifie la conception de ses processeurs AGP pour renverser à son avantage une compétition devenue trop aiguë entre les deux compagnies”, note ainsi le rapport financier d’analyse des risques industriels, remis courant janvier au gendarme américain de la Bourse par la direction de Nvidia elle-même.Car pour réussir sur ce nouveau marché, l’emblématique patron de Nvidia, Jen-Hsun Huang, ne peut pas compter sur la méthode qui lui a si bien réussi jusqu’ici. Lorsque cet ancien ingénieur de LSI-Logic et AMD a fondé Nvidia en 1993, les règles du jeu étaient déjà fixées, même si elles ne se sont concrétisées qu’en 1996, avec le lancement de la Riva 128. À raison d’une nouvelle version tous les six mois, le constructeur n’a cessé de faire progresser ses processeurs graphiques à un rythme que ses concurrents n’ont suivi qu’avec difficultés. D’un marché particulièrement concurrentiel où s’affrontaient, il y a encore cinq ans, plus d’une cinquantaine de petits acteurs, Nvidia reste aujourd’hui l’un des rares survivants. Une politique “à la Intel” qui a d’autant mieux fonctionné que, “contrairement aux processeurs centraux, les progrès faits en matière de qualité des unités graphiques sont immédiatement perceptibles par les utilisateurs”, souligne Jen-Hsun Huang, persuadé de détenir le modèle de développement le plus efficace pour ce secteur industriel.Course à la puissance avec ses concurrents historiques, confrontation prudente avec Intel, l’année 2002 se présente comme une année cruciale. “Nous entrons dans une ère où les innovations seront encore plus déterminantes”, pronostique le PDG de Nvidia. Pour lui, c’est sur le terrain de la propriété intellectuelle que se joueront, pour une grande part, les victoires et les défaites. Nvidia détient aujourd’hui 75 brevets quil se dit prêt à défendre bec et ongles.* à San Francisco
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