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Louis-Michel Angué (Galileo) : “Ce n’est ni la fin du capital-risque, ni celle des start-up”

Pour le cofondateur de Galileo, société de capital-risque spécialisée dans le financement des entreprises high-tech, les valorisations excessives étaient un véritable hold-up pour les petits porteurs.

L’effondrement de la Bourse signifie-t-il la fin des start-up ? La Bourse et les start-up sont deux mondes différents, contrairement à ce que l’on pourrait penser. A vrai dire, une start-up, ça ne vaut pas bien cher. La valeur d’une entreprise se juge sur ses perspectives de croissance et sur ses bénéfices. Et les start-up qui font des bénéfices ne sont pas nombreuses… L’effondrement des cours est une bonne chose. Des start-up continueront à se créer mais sur des modèles plus raisonnables. Le point mort ?” au niveau de la rentabilité ?” sera fixé à vingt-quatre mois par exemple. On en aura fini avec ces sociétés qui doublent leur chiffre d’affaires mais aussi leurs pertes d’année en année.Serez-vous plus sélectif dans vos choix d’investissement ? Mais nous sommes déjà très sélectifs ! Le marché du capital-risque est devenu fou lorsque les fonds d’investissements d’origine industrielle comme Pinault, Arnaud ou Vivendi ont investi dans la Net-économie. L’argent coulait à flots, et même les mauvais dossiers trouvaient un financement. Cela frisait parfois le ridicule. Deux jeunes sont ainsi venus me présenter leur business modèle : faire de la livraison de champagne sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre au même prix que le supermarché du coin. Tout cela avec une livraison garantie en moins d’une heure, bien sûr ! Désormais, il va y avoir de l’écrémage et l’on devrait voir disparaître ce genre de dossiers. Les créateurs de start-up seront toujours là mais les prix seront moins idiots.Quelles sont les conséquences de cette nouvelle donne pour les sociétés de capital risque ? Pour nous, c’est tout bénéfice. Les dirigeants de start-up qui viennent nous voir seront bien moins prétentieux. Avant, ils débarquaient en nous disant : “Notre business plan vaut 100 millions de francs. Nous avons besoin de dix millions pour démarrer, vous aurez donc 10 % de notre société.” Avec l’effondrement des prix, nous prendrons directement 20 % du capital. Et, lors du deuxième tour, 51 % si c’est possible. Ainsi, nous pourrons calmer le jeu et contrôler le devenir de ces sociétés. Avant, nous ne contrôlions plus rien. Maintenant, nous allons reprendre les commandes. Nous assistons aussi à la convergence entre la nouvelle économie et l’économie traditionnelle. Maintenant, les sociétés doivent venir à nous avec des business plans rentables.L’entrée en Bourse des sociétés Internet était synonyme de vache à lait pour les capital-risqueurs. La chute de la Bourse est-elle aussi synonyme de perte d’argent pour vous ? Avant, une start-up levait des fonds en janvier et entrait en Bourse au mois de juin. L’argent était trop facilement gagné sur des sociétés qui n’en valaient pas la peine. Sur Internet, des entreprises étaient valorisées à mille années de chiffres d’affaires ! Cela ne pouvait pas durer, c’était un véritable hold-up pour les petits porteurs. Bien sûr, nous allons gagner moins d’argent : au lieu de faire vingt fois la mise, nous ferons seulement cinq fois… Et alors ?Finalement, quelles leçons tirez-vous de cette correction boursière ? Je pense que la nouvelle économie va se banaliser sur le modèle de la vieille économie, qui a la peau dure. Prenez une entreprise comme Legrand. Ils peuvent paraître dépassés mais ils gagnent de l’argent avec leurs prises électriques. Et sans courant, pas d’ordinateur : ce genre de raisonnement devrait refroidir les petits farceurs qui confondent la Bourse avec un casino où l’on gagnerait à tous les coups. Quant aux difficultés de la Bourse, elles nannoncent ni la fin du capital-risque ni celle des start-up !

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Propos recueillis par Antonin Billet