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L’impression 3D : la nouvelle révolution technologique

Pourra-t-on prochainement créer, chez soi, n’importe quel objet en trois dimensions à partir de modèles numériques ? C’est ce que promet l’impression 3D, une technologie dont les seules limites semblent être celles de notre imagination.

Les auteurs de science-fiction l’avaient imaginé, les machines capables de fabriquer des objets en 3D sont aujourd’hui devenues une réalité. Initialement développée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) et utilisée dans l’industrie depuis la fin des années 80, la technologie d’impression 3D, dite de “ stéréolithographie ” profite en effet pleinement des progrès de l’informatique et de la robotique et pourrait prochainement faire son entrée dans les petites entreprises, voire chez les particuliers.

Ajouter de la matière au lieu de la retirer

Pour créer un volume physique, une imprimante 3D procède exactement à l’inverse d’un sculpteur. Alors que ce dernier part d’un matériau brut et s’emploie à l’éroder pour lui donner la forme souhaitée, l’imprimante superpose des couches de matière extrêmement fines les unes sur les autres, en fonction d’un modèle en 3D qui lui a été soumis – c’est la raison pour laquelle cette approche est appelée “ fabrication par couches additives ” ou ALM (Additive Layer Manufacturing). Si les imprimantes 3D d’entrée de gamme ne proposent généralement qu’une ou deux couleurs, les plus évoluées – et donc beaucoup plus chères à l’achat – sont équipées de plusieurs buses ou seringues d’injection permettant de donner à l’objet final autant de nuances différentes. La technologie actuelle présente cependant des limites. D’une part, seules des pièces de taille assez réduite peuvent être produites ; d’autre part, la fabrication d’un objet de quelques centimètres nécessite plusieurs heures, même si les machines professionnelles évoluent vers plus de rapidité pour des raisons évidentes de rentabilité.Longtemps, l’impression 3D s’est cantonnée au champ des applications professionnelles, dans l’industrie (fabrication de pièces techniques) ou la conception et le marketing (réalisation de maquettes en trois dimensions, dites de “ prototypage rapide ”). Récemment, on a vu apparaître de nouvelles applications dans le monde médical, avec la conception aux Pays-Bas d’une prothèse de mâchoire en titane, qui a pu être implantée à un patient. Des scientifiques ont aussi annoncé avoir réussi à créer, via un système d’impression 3D, des tissus osseux utilisables dans le traitement de l’ostéoporose. On peut ainsi raisonnablement imaginer que, dans un futur proche, les dentistes seront en mesure de fabriquer presque instantanément couronnes et implants au lieu de faire appel à un prothésiste spécialisé et de nous faire patienter pendant des semaines.

Des services en ligne déjà disponibles

Aujourd’hui, bien que les imprimantes 3D soient encore réservées aux entreprises ou aux passionnés fortunés (voir encadré), chacun d’entre nous peut profiter de cette technologie grâce à des sites Internet qui proposent la fabrication d’objets personnalisés. C’est le cas de la société française Sculpteo (www.sculpteo.com). Si vous avez conçu un objet via un logiciel 3D, il vous suffit d’envoyer le fichier numérique (aux formats 3DS, STL ou OBJ) en spécifiant le nombre d’exemplaires que vous souhaitez obtenir et d’attendre leur livraison à domicile. Les réalisations physiques de votre modèle tiendront compte de la forme spécifiée et des couleurs et textures que vous lui aviez appliquées. Différentes matières sont disponibles (résines, plastiques…), avec la possibilité de les recouvrir d’un film d’argent pour obtenir un effet métallique. Pour les créations originales, Sculpteo propose un outil de contrôle de la solidité, qui déterminera, en fonction des formes et matériaux utilisés, la viabilité de l’objet. Si vous n’avez pas l’âme d’un sculpteur numérique, vous vous contenterez de personnaliser des objets préconçus (coques pour iPhone, écriteaux ou images en relief, figurines à votre effigie…) avec des outils en ligne très faciles à manipuler.

Un champ quasi infini de possibilités

En se projetant un peu plus dans l’avenir, on aperçoit le vaste champ de possibilités que pourrait ouvrir la généralisation des imprimantes 3D. Vous avez besoin d’une pièce de rechange pour réparer votre grille-pain ou votre tondeuse à gazon ? Inutile de commander la pièce auprès du fabricant, celui-ci vous fournira le modèle numérique correspondant pour que vous la fabriquiez vous-même. Votre enfant voudrait un jouet ou une figurine tout droit sortis de son imagination ? Son rêve deviendra réalité en un clin d’œil – il existe déjà un prototype d’imprimante 3D, baptisée Origo, qui vise cet objectif. Pour disposer d’une poignée parfaitement adaptée à votre main (ou d’une chaussure à votre pied), il vous suffira de former une empreinte sur de la pâte à modeler, de la passer au scanner 3D, puis de la créer dans la matière de votre choix. Combinée à des circuits électroniques prêts à l’emploi, l’impression 3D pourrait même donner la possibilité à chacun d’inventer de nouveaux appareils technologiques.

Le spectre de la contrefaçon

Mais il y a fort à parier que le développement de l’impression 3D amènera les pouvoirs publics à renforcer la législation sur les brevets et les droits d’auteur. Car chacun aura compris que la possibilité de dupliquer à l’infini des œuvres physiques (avec des modèles 3D recréés de toutes pièces ou numérisés avec un scanner 3D (voir l’encadré ci contre), conduira à la commercialisation de contrefaçons. Le problème se posera différemment selon qu’il s’agisse d’objets fonctionnels innovants protégés par des brevets valables quelques années ou de réalisations artistiques soumises au droit d’auteur, d’une durée bien plus longue. Ces questions peuvent paraître anecdotiques aujourd’hui, l’impression 3D n’en étant qu’à ses balbutiements. Mais qu’en sera-t-il demain, quand chacun pourra dupliquer des objets comme on copie des fichiers numériques ? Tout comme l’avènement du haut-débit a fait évoluer la législation sur le téléchargement d’œuvres numériques, les sociétés détentrices de brevets et autres droits de propriété intellectuelle ne manqueront pas de faire pression sur les États pour qu’ils restreignent les conditions d’utilisation de l’impression 3D. Il est difficile de prédire le temps qu’il faudra pour que cette technologie fasse son entrée dans notre quotidien. L’accélération des progrès techniques et l’arrivée sur le marché d’imprimantes 3D abordables nous laissent penser que cette révolution annoncée est imminente. Une chose est sûre : tout comme pour Internet, il y aura dans nos esprits un avant et un après.

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Jean-Michel Manat