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La transparence financière des sociétés cotées

Rumeurs et délits d’initiés ont fait l’ordinaire des marchés boursiers au XIXe siècle et une grande part du XXe, les autorités de marché ne devenant des puissances respectées que ces vingt dernières années.

Les événements récents aux États-Unis ont attiré l’attention sur la nécessité d’organiser une plus grande transparence des comptes publiés par les sociétés cotées. La plupart des commentaires insistent sur les pratiques comptables (présentation des comptes hors exceptionnels, déconsolidations abusives) ou d’affaires (formation de joint-ventures, levée de dettes ou de fonds propres à des niveaux multiples de l’organisation) qui seraient à revoir. Certains ont même critiqué ce qui paraissait une grande avancée de ces dernières années, du point de vue de la création de valeur pour l’actionnaire : la diffusion des stock-options dans le management des entreprises, qui aurait induit une obsession du cours de Bourse dommageable aux décisions prises. L’entreprise apparaît comme une organisation irresponsable et obsédée par le court terme, tandis que les auditeurs n’en seraient que des auxiliaires, assez peu dignes de foi.Cependant, ce n’est sans doute pas par des modifications internes aux entreprises qu’on parviendra à accroître sensiblement la transparence des comptes. Depuis leur apparition, et leur généralisation au XIXe siècle, les marchés boursiers sont des marchés profondément dissymétriques, en ce sens que le vendeur en sait, par définition, davantage que l’acheteur.Cette dissymétrie est plus forte que dans les transactions sur sociétés non cotées, dans la mesure où les acquéreurs de sociétés non cotées sont bien plus expérimentés que la plupart des investisseurs en Bourse, et où ils peuvent procéder à des “due diligences” [contrôle des comptes avant achat, ndlr], possibilité qu’on n’a pas vraiment en Bourse. Propagation de fausses rumeurs et délits d’initiés ont fait l’ordinaire des marchés boursiers pendant tout le XIXe siècle et la plus grande partie du XXe, les autorités de marché ne devenant vraiment des puissances respectées que dans les vingt dernières années.

Un contrôle aléatoire

Il est certain, en même temps, que la généralisation de la préoccupation de valeur boursière dans les entreprises incite fortement les managers à en faire l’indicateur essentiel de leur pratique, ce qui entraîne une nécessité de contrôle d’autant plus forte. Faut-il, pour autant, faire de ces managers leurs propres contrôleurs, réformer a priori certaines normes comptables, ou attendre des auditeurs que, au lieu de vérifier les calculs, ils comprennent toute la logique sous-jacente des affaires qu’ils contrôlent ? Je ne le pense pas. Ce qu’il faut sans doute aux entreprises cotées, c’est un contrôle comparable à celui qui prévaut déjà dans la protection de l’environnement ou celle de l’hygiène publique, ou encore dans le domaine fiscal : un contrôle aléatoire, qui, de temps en temps, plonge en profondeur dans les pratiques d’une entreprise et puisse la sanctionner en cas d’insincérité.

Une crédibilité renforcée

Ce contrôle ne peut être que du ressort des autorités de régulation boursière (la SECpour les États-Unis, la COB pour la France…). Il leur faudrait disposer d’un corps d’inspection étoffé qui pratiquerait chaque année des contrôles sur les entreprises cotées localement.La crédibilité de la place s’en trouverait ainsi renforcée, ce qui ferait plus que dédommager les entreprises des charges supplémentaires à verser aux autorités de régulation pour le fonctionnement dun tel corps. Ce fonctionnement étant mutualisé, les inspecteurs ne seraient pas payés directement par les entreprises contrôlées, et la survenance de sanctions serait, au contraire, une preuve de leur utilité.* Partner Accenture

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FrançoisValérian*