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La messagerie instantanée

Encore négligé dans l’entreprise, l’emploi de la messagerie instantanée devrait supplanter celui de l’e-mail. À condition d’offrir l’interopérabilité et la sécurité.

Peu exploitée à des fins professionnelles dans le monde de l’entreprise (du moins officiellement), la messagerie instantanée (MI) est pourtant en passe de devenir une application critique. Offrant une communication en temps réel par écrit avec d’autres utilisateurs répertoriés dans une liste de contacts, les interfaces de MI affichent en permanence le “statut” de chacun des interlocuteurs : déconnecté, disponible, occupé, connecté mais éloigné de l’ordinateur, etc. Cette fonction profitable, qui fait défaut au courrier électronique, laisse penser aux analystes que la suprématie de ce dernier, plus largement adopté par les entreprises, ne durera pas. Selon le Gartner Group, l’utilisation de la messagerie instantanée dans l’entreprise surpassera même celle de l’e-mail dès 2005 et, à cette date, la moitié des applications de GRC (gestion de la relation client) l’auront adopté. En 2004, ces logiciels devraient capter 180 millions d’utilisateurs et gérer près de 60 % des communications mondiales en ligne. De quoi susciter l’émoi des éditeurs et des opérateurs de télécommunications qui investissent massivement dans ces solutions. À commencer par Microsoft qui intègre sa MI à Windows XP pour activer des services web comme la notification. Ou encore la filiale d’investissement de France Télécom qui injecte 7 millions de dollars (plus de 7, 5 millions d’euros) dans la plate-forme open source Jabber.

La messagerie relie les applications du groupware

À l’origine ludiques et diffusées en téléchargement gratuit, les MI s’enrichissent peu à peu de fonctions de travail de groupe ou d’e-learning. “La messagerie instantanée réunit les applications telles que l’écran partagé, le téléphone sur IP et le workflow. Il est intéressant, par exemple, de coupler le transport de l’information de présence de l’utilisateur avec la fonction de gestion de l’agenda”, expose David Bart, directeur technique d’Idealx. Cette SSII spécialisée dans le logiciel libre édite IDX-MI, une solution de MI en open source et fondée sur XML pour se connecter aux applications existantes : passerelles SMTP, systèmes SMS, annuaires LDAP et bases de données SQL. “Il faut proposer aux entreprises des solutions de messagerie instantanée Plug and Play qui font le lien avec l’agenda et le téléphone”, souligne, pour sa part, Olivier Harry, directeur technique de eGonetwork. Cette société propose Colias, un logiciel qui assure le routage des messages vers le téléphone mobile lorsque l’application est mise en veille sur l’écran du poste de travail du destinataire ou, en fonction du degré d’urgence et des mots-clés. Outre-Atlantique, la messagerie instantanée poursuit son expansion en étant combinée avec la téléphonie sur IP. Rebaptisé Windows Messenger, l’outil de Microsoft prend non seulement en charge les échanges audio et vidéo mais aussi la téléphonie sur IP. Idem pour le Messenger de Yahoo! dont la version 4 étend ses fonctions de téléphonie à l’international pour les abonnés américains. À noter, ces deux messageries fonctionnent avec le logiciel de VoIP (Voice over IP) Net2Phone de la société éponyme. Cette compatibilité semble pour le moins paradoxale si on considère, par exemple, que rien ne permet encore aux utilisateurs d’ICQ (AOL) de dialoguer par écrit avec les utilisateurs de Messenger (Microsoft) !

Compatibilité, le nerf de la guerre

Pour pallier cette absence d’interopérabilité, les principaux éditeurs concurrents d’AOL ?” Microsoft, Yahoo!, Prodigy, ExciteAtHome, AT&T, Tribal Voice, iCast, Odigo, Phone, etc. ?” planchent sur un standard universel au sein de la coalition IMUnified (Instant Messaging Unified). Certes, les travaux de cette alliance comme ceux de l’IMPP (Instant Messaging and Presence Protocol), le groupe de travail de l’IETF (lire encadré page 36), sont au point mort, mais pour la première fois, AOL semble enclin à collaborer. En effet, après avoir refusé pendant plus d’un an d’ouvrir ICQ (90 millions d’abonnés) et AIM (60 millions d’abonnés) aux logiciels concurrents, le fournisseur de services teste le protocole Simple (Session initialization protocol for Instant Messaging and Presence LEveraging) en collaboration avec Lotus/IBM. Depuis le mois d’août, les abonnés d’AOL peuvent donc communiquer avec les utilisateurs de la plate-forme de travail de groupe Sametime de Lotus.Avant ses récentes velléités d’ouverture, on se souvient qu’AOL s’était opposé à la compatibilité affichée des outils de Mac OS X et du logiciel de partage de fichiers Aimster (de la société éponyme) vers AIM. Prétexte invoqué : l’interopérabilité menacerait la vie privée et la sécurité de ses abonnés. Or, en ce qui concerne la sécurité, les entreprises ont d’autres préoccupations. “Les MI grand public autorisent la circulation d’informations en clair et en temps réel. Pour connaître les statuts des utilisateurs ?” présents ou absents ?” ces systèmes s’appuient sur le poste-à-poste et créent des failles de sécurité dans le réseau de l’entreprise”, rappelle Olivier Harry. Outre la compatibilité des messageries entre elles, il s’agit de définir des normes pour la notification en temps réel de la présence des utilisateurs et leur authentification. Sans oublier les fonctions de sécurité et de gestion du workflow qui font défaut aux MI gratuits : intégrité du message, chiffrement et contrôle d’accès. “Sans cela, le marché professionnel de la messagerie instantanée ne décollera pas “, indique Olivier Harry, qui admet que seuls les FAI ont acheté la solution d’Idealx, la demande des entreprises n’étant pas encore au rendez-vous.

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Chrystèle Besson