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La Hadopi pense à une licence globale pour les « échanges non marchands »

En ouvrant une réflexion sur la licence globale, la Hadopi semblent renvoyer l’ascenseur aux rédacteurs de la Mission Lescure qui proposent sa disparition tout en saluant son action.

Même si le Rapport Lescure préconise sa disparition, la Hadopi ne jette pas l’éponge. Elle n’a jamais été si dynamique que ces derniers mois. Après une étude particulièrement riche sur le mode de consommation de produits et services culturels, les équipes de Marie-Françoise Marais, présidente, ouvrent une réflexion sur un sujet quasi tabou : la licence globale. Elle consiste à légaliser les échanges “non marchands” par une licence globale adossée à l’abonnement internet perçue par les FAI

Il y a quelques mois, le fait même d’évoquer ce thème aurait été perçu comme une insulte aux ayants-droits. Pour nombre d’entre eux, l’erreur est de croire, ou faire croire qu’elle pourrait s’appliquer à l’ensemble des contenus. En réalité, son application ne concernerait que les échanges non marchands, c’est-à-dire ceux qui s’organisent entre particuliers sans recherche de profit. Lors de la remise de son rapport, Pierre Lescure, qualifiait la licence globale de « truc à deux balles ». Il continue de soutenir la réponse graduée pour lutter contre le piratage tout en l’allégeant en écartant l’hypothèse d’une légalisation des échanges non marchands.

“Comme Hadopi, la Licence globale est un débat politique”

Pendant la campagne présidentielle, cette exception culturelle était pourtant supportée par nombre de personnalités politiques du gauche et de droite. Elle illustrait l’opposition à la Hadopi qui, à l’époque, est devenue le symbole d’une vision « sarkosyste » du droit d’auteur qu’il convenait d’abattre.

La Spedidam (société de perception et de distribution des droits des artistes interprètes), organisation anti-hadopiste s’il en est, a été l’une des premières à supporter la licence globale pour les échanges non marchands. Il y a exactement un an, Xavier Blanc, directeur des affaires juridiques et internationales de cette organisation, commentait sur notre site sa position : « La licence globale est devenue, comme Hadopi, un débat politique. Je rappelle qu’elle concerne exclusivement l’exploitation non commerciale d’une création afin de la rendre licite à l’inverse de l’Hadopi qui veut faire payer ce qui a été obtenu de manière illicite. » Le débat sur ce sujet a été virulent comme le rappelle ce partisan historique de la licence globale qui signalait s’en être pris, « plein la figure sur le sujet » tout en prévenant qu’il « n’abandonnera pas. »

Une année après ces déclarations, la Spedidam a peut-être trouvé un nouvel allié. Contre toute attente, la Hadopi a décidé de lancer une réflexion sur la façon dont les « échanges non marchands » pourraient être rémunérés. « Selon l’approche retenue, un même usage est qualifié soit de piratage en ligne, soit d’échange non marchand », note la haute autorité qui ajoute que « face à la permanence de cet usage, que la Hadopi a pour mission de dissuader, il reste à apporter une réponse durable à la question de la création, de l’acquisition et du partage des œuvres sur internet ».

Un cercle vertueux favorable à la création, aux usages et à l’innovation

Après trois ans d’existence, la Hadopi ouvre son champ de réflexion et estime que « l’intégration de ces usages pourrait être de nature à créer un cercle vertueux favorable tout à la fois à la création, aux usages, à l’innovation et à un meilleur partage de la valeur ».

Une « intégration » des échanges non marchands nécessiterait une « définition légale et claire du statut des œuvres et des usages » et une « compensation équitable et proportionnelle » pour les ayants droit. « La piste de réflexion poursuivie s’appuie sur deux postulats : seule la consommation non marchande des œuvres protégées peut engendrer une compensation financière potentielle; seules les entités tirant par leurs activités un gain marchand des échanges non marchands des œuvres protégées doivent participer à la compensation ».

La haute autorité cite comme modèle l’exception pour copie privée – une redevance payée sur l’achat de matériel permettant de copier des œuvres audiovisuelles – et la rémunération équitable – payée par les TV, radios ou commerces pour la diffusion de musique.

La publication du rapport « Culture Acte II » offre aux membres de la Hadopi d’envisager d’autres pistes que celles proposées par les rédacteurs de la mission Lescure. La suppression de la haute autorité et l’intégration de ses missions au sein du CSA étaient au centre des propositions. La diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet peut-elle se résumer à ces mesures. Aujourd’hui, beaucoup doutent que ce soit suffisant.

 

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Pascal Samama