Passer au contenu

François Bayrou ouvre un débat sur le numérique

Le 14 février, François Bayrou a organisé un débat public sur les orientations numériques qu’il compte prendre s’il est élu à la Présidence de la République.

Le numérique, tout le monde en parle. Tout le monde, c’est-à-dire, l’ensemble – ou presque – des candidats à l’élection présidentielle. François Bayrou est donc entré dans le débat. Il n’a pas présenté de programme à proprement parlé, mais a ouvert une discussion autour de quatre thèmes : l’économie numérique, l’éducation, l’e-citoyenneté et l’Acta/Hadopi. Pour cela, il a convié quatre personnalités du Web : Gilles Babinet (président du Conseil national du numérique), Marc Simoncini (fondateur de Meetic),
 Fabrice Epelboin (cofondateur d’Owni et ancien dirigeant de ReadWriteWeb) et Céline Lazorthes (fondatrice de Leetchi). Si les trois premiers sujets ont alimenté le débat, l’Acta/Hadopi a été traité rapidement en fin de séance. Le candidat s’est affirmé anti-Hadopi, mais ne croît pas vraiment à la licence globale. Seule certitude, « il faut une réforme de la propriété intellectuelle, car je ne crois pas au gendarme absolu. »

« J’ai très tôt aimé les claviers »

François Bayrou a d’abord expliqué pourquoi ce sujet lui tenait à cœur. Il s’est présenté comme un spécialiste qui suit le secteur depuis des années. Il revendique la création du premier journal numérique de France pour l’Orep (Office régional de l’éducation permanente) dans les années 80. « J’ai aimé les claviers très tôt », précise-t-il.

Marc Simoncini a alors orienté le débat sur les problèmes auxquels sont confrontés les créateurs français. « La France est un pays d’entrepreneurs, et malgré la crise, des milliers de jeunes se lancent dans la création d’entreprises. Hélas, nous sommes le dernier pays au monde à vivre au tempo du Web, car nos règles administratives sont à l’opposé du Web. » François Bayrou reconnaît ces contraintes et l’inadaptation du pays. Il lance deux idées.

La première est de créer une zone économique autonome pour expérimenter de nouvelles règles. La seconde est de mettre en place de nouvelles règles de financement, « Oseo pourrait se comporter comme un fonds de fonds ». Une sorte de fonds d’investissement qui soutiendrait d’autres fonds d’investissement. Pour Gilles Babinet, en France, troisième pays en valeur du capital-risque, les financements existent, mais ils sont illisibles car trop nombreux. Et surtout, « les banques et les assurances risquent d’arrêter de financer pour recréer leurs fonds propres. »

Des idées, mais peu de projets

Quant à l’éducation, l’ancien ministre estime que « pour s’épanouir sur Internet, il faut passer par des méthodes d’éducation élémentaire, car le clavier a remis en cause l’approche de la lecture. » S’il explique qu’il faut apprendre à hiérarchiser l’information et à remodeler l’e-learning, il n’a avancé aucune piste précise sur l’intégration des technologies dans les études. A propos des études liées à l’Internet, il se demande si le talent ou la bonne volonté peuvent faire partie d’un cursus. Bref, des idées, mais peu de projets ! Sur ce point, Marc Simoncini a expliqué le projet éducatif mis en place avec Xavier Niel (Iliad) et Jacques-Antoine Granjon (Ventesprivées). L’EEMI (Ecole européenne des métiers de l’Internet) reste l’une des rares écoles à aborder le Web de manière transversale.

Silencieux depuis le début du débat, Fabrice Epelboin a rompu son silence sur le sujet abordant l’e-citoyenneté. Il s’est lancé dans une diatribe sur le fichage des internautes et l’implication de sociétés françaises dans le développement de technologies mises au service des dictatures. « Actuellement, des entreprises comme Bull ou Cosmos contribuent à la surveillance des opposants en Syrie, au Maroc, en Libye, en Iran, en Guinée, au Bareim, en Syrie... Elles vendent des outils de restriction des libertés. » Prudent, François Bayrou a admis ne pas être au fait de ces sujets. Il a tout de même abordé l’importance de l’indépendance technologique de l’Etat et la défense des libertés individuelles qui peut être garantie, selon lui, par les logiciels libres.

Ce débat, qui devait durer une heure et demie, a finalement tenu deux heures et demie. Visiblement passionné par le sujet, François Bayrou a même incité le public à poser des questions. Enrichissante, car éloignée de prises de position partisanes, cette discussion n’a pas conduit le candidat à présenter un programme de campagne. Pour lui, « le numérique est plus qu’un enjeu économique ». Il y voit avant tout « un saut de civilisation ». Il a tout de même affirmé que « la totalité de la protection familiale et des actions publiques est financée par le travail réalisé en France. La localisation de l’activité n’est pas innocente ». Adressé aux géants du Web (Apple, Amazon, Google et eBay), ce message signifie que François Bayrou est contre le développement d’une activité économique sans investissement concret dans le pays. Un point sur lequel l’ensemble des participants était d’accord.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Pascal Samama