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Copains comme kochons

En deux ans, près d’un demi-million d’internautes se sont lancés dans l’élevage de cochons virtuels. Décryptage d’une passion et visite des coulisses du phénomène Kochonland.

Une truie, 55 porcelets, 6 machines-outils, 10 champs et une solide fortune, Olivier, alias ‘ OPR ‘, est un éleveur comblé. Mais sa réussite n’est que virtuelle. OPR, 27 ans, est aujourd’hui le premier au classement sur le site Web Kochonland.com, une simulation d’élevage de ‘ kochons ‘. Le but de ce jeu gratuit est simple : les internautes doivent prendre soin d’un kochon (version virtuelle de notre bon cochon) et faire prospérer leur exploitation. Au fil du jeu, la difficulté augmente, et le joueur doit gérer tout le processus de la filière porcine, de l’élevage à l’abattage. ‘ C’est un monde avec ses impératifs, son système financier, et surtout sa communauté, résume OPR, qui passait, à ses débuts, entre 8 et 12 heures chaque jour sur le jeu. Je ne me suis calmé que lorsque j’ai atteint le sommet du classement, et après avoir amassé un pécule confortable… virtuel, hélas ! ‘

Etat de gras… ce

Alors qu’il fête ses deux ans d’existence, le site s’impose comme un véritable phénomène sur la Toile. Aujourd’hui, ils sont plus de 460 000 internautes, comme OPR, à élever leurs kochons avec plus ou moins d’application et plus ou moins de réussite. ‘ L’originalité du jeu m’a tout de suite plu : jamais je n’aurais pensé qu’un jeu comme ça pouvait exister sur le Net ‘, explique Joana, 24 ans, éleveuse depuis 2003. Même passion chez Cindy, étudiante en médecine à Nancy : ‘ Je viens chaque jour sur le site car je m’estime kocholandaise : si je ne nourris pas mes portées un jour, elles perdent de leur taux de gras et elles ne font pas de lisier. C’est un cercle vicieux, je fais tout pour ne pas oublier, et quand je suis dans l’incapacité de m’occuper de mon exploitation, je demande à quelqu’un. ‘ Lef a lui aussi été séduit par le concept : ‘ Je peux dire sans me vanter que j’ai obtenu une maîtrise avec mention en sciences de l’économie kochonlandaise appliquée. ‘ Clarisse, elle, a eu moins de chance… Un virus dans son ordinateur a empêché cette étudiante de nourrir Ptitboudgras… qui a fini par mourir. Heureusement, ‘ le jeu permet de ressusciter son kochon et de reprendre l’aventure ‘, sourit-elle. Ptitboudgras est relancé !Le nombre d’éleveurs ne cesse en tout cas de croître. Chaque jour, le site enregistre de 800 à 1 000 inscriptions ! Un engouement qui n’a pas fini de surprendre Ludovic Sarrazin et Olivier Coudre, les deux concepteurs du jeu. A l’origine, ils étaient effectivement bien loin du monde du cochon et travaillaient dans l’image de synthèse pour l’industrie et l’architecture. Jusqu’au jour où l’idée d’un jeu a germé dans l’esprit de Ludovic, après une visite tout à fait professionnelle dans une porcherie.

Amour kochon

‘ Au départ, nous avions conçu le jeu comme un site personnel pour s’amuser entre amis. On ne pouvait pas être plus de 40 éleveurs, raconte Ludovic. Puis, avec le bouche à oreille, les choses ont pris de l’ampleur : en 15 jours, nous avions déjà 2000 inscrits. ‘ Depuis, Ludovic et Olivier ont tout arrêté pour se concentrer exclusivement au développement du jeu. Dans leur quartier général de Ferrière, petit village au milieu des champs près de La Rochelle, ils optimisent patiemment le fonctionnement du jeu, réparent les bugs et surveillent l’activité des serveurs. Accessoirement, Olivier s’emploie à démasquer les éventuels tricheurs. ‘ Nous avons certains joueurs qui cherchent les failles dans le jeu pour avancer plus vite. Mais cela se voit vite : quand un joueur arrive à la première place en une semaine, il y a quelque chose de louche. ‘ Les deux associés préparent aussi l’avenir. Le cinquième niveau du jeu devrait être mis en ligne d’ici peu. Ce dernier chapitre permettra au joueur de passer tour à tour du métier d’agriculteur à celui de charcutier, afin d’achever la découverte de la filière porcine. Kochonland va également partir à la conquête du monde avec une version anglaise qui devrait bientôt être disponible, suivie par une version espagnole et, pourquoi pas, une version en japonais…Ensuite, d’ici à un an, Ludovic et Olivier annonceront la création de nouveaux jeux autour d’autres thèmes. ‘ Nous nous attacherons à des métiers artisanaux ‘, confie Ludovic, qui souhaite ménager l’effet de surprise. En attendant, les éleveurs de kochons sortent du virtuel et organisent périodiquement des réunions dans toute la France pour échanger leurs trucs et astuces… et plus si affinités. Un premier couple s’est déjà marié après une rencontre lors dune soirée Kochonlandwww.kochonland.com

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Didier Forray