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Shwan Moubarak (TNT Post Group) : ” Où trouver les bonnes pratiques ? Pas forcément chez nos concurrents “

Le DSI de la poste hollandaise estime que comparer une informatique comme la sienne à celle de ses concurrents ou à celles d’entreprises similaires n’a pas grand sens.

Détenteur d’un PhD en intelligence artificielle, Shwan Moubarak, DSI de TNT Post Group, avoue n’avoir jamais vraiment pu utiliser ce savoir au quotidien. Pour lui, l’informatique doit rester concrète, dévolue “aux choses réelles”, et non aux gadgets.Lorsqu’il arrive à son poste actuel, en 1991, d’énormes chantiers l’attendent. De 1993 à 1997, l’intégralité du système d’information est standardisée, des réseaux aux méthodes de développement, en passant par le matériel.Aujourd’hui, son principal souci consiste à maintenir son informatique au sommet des benchmarks.

01 Informatique :
Comment pourriez-vous définir votre rôle au sein du groupe TNT Post ?
Shwan Moubarak : Je le décrirais en trois points. Tout d’abord, je dois vérifier que nous utilisons des technologies standards et que les investissements correspondent à de vraies problématiques business. Il s’agit ensuite de fournir un très bon service technique au client, aussi bien interne qu’externe.TNT Post Group parle beaucoup de qualité. Qu’en est-il de la division informatique ?Effectivement, TNT a été évalué EFQM1 l’an dernier et a aussi gagné l’accréditation “Investor in people”
2. Si l’on se focalise sur l’informatique, nous appliquons un modèle Compass, qui nous permet de nous “benchmarker “.Pourquoi cela ?Compass a estimé que nous y consacrions trop de temps. Mais nous accordons beaucoup d’importance à ces tests, que nous commençons très tôt dans le processus de développement.Cela ne montre-t-il pas que les bonnes pratiques ne le sont pas toujours pour tout le monde ?C’est tout le problème des benchmarks. Dans notre métier, peu d’entreprises pouvaient se comparer à nous. Nous développons des systèmes pour une utilisation mondiale… Or, combien de sociétés en font autant ? Les développeurs de nos systèmes sont français, italiens, allemands, anglais…Avec qui vous “benchmarquez-vous”, alors ?La comparaison doit s’établir à partir d’un panier ou d’un ensemble de bonnes pratiques. Quand je regarde les benchmarks des meilleures entreprises au monde dans le développement logiciel, j’y trouve tous types de sociétés !On cite souvent UPS comme modèle pour la qualité du traçage de ses colis…On nous compare régulièrement avec UPS… Mais sur quels critères se base-t-on ? Si cette entreprise est très forte aux Etats-Unis, elle l’est moins en Europe. Les demandes de la branche Express de TNT, par exemple, sont radicalement différentes en France et en Amérique du Nord.Vous comparez-vous facilement avec certains types d’entreprises, dans lesquelles l’informatique est aussi critique que chez vous ? Par exemple, la banque ou l’industrie pharmaceutique.Mon entreprise est très en avance technologiquement. Je ne sais pas comment fonctionnent les banques en France. Mais, au Royaume-Uni, si j’alimente mon compte avec ma carte Visa, celui-ci n’est crédité qu’au bout de quatre jours. Avec un chèque, cela nécessite le même temps. En réalité, le crédit par voie électronique est automatique et ne requiert qu’un seul jour.Pouvez-vous, aujourd’hui, démontrer à vos dirigeants que votre qualité de service est satisfaisante ?Compass voulait placer mon équipe de développement dans la catégorie des meilleures au monde. Je n’en vois pas l’intérêt. Je mène chaque année une étude de satisfaction client, et une autre auprès de mes équipes informatiques. Je dirais que 98 % des informaticiens sont satisfaits de leur travail. Il y a quelques années, ce chiffre devait être de 80 %.Tenez-vous vos objectifs sur la disponibilité et la rentabilité ?La direction générale a un objectif de 98 % de livraisons des colis de TNT à l’heure. Pour répondre à cet objectif, je leur promets 99,9 % de disponibilité des systèmes. Et je m’arrange pour avoir toujours 99,97 % de disponibilité. Je leur promets également de tenir les budgets. Mais, chaque année, je m’arrange pour le réduire de 10 ou 12 %. Je promets aussi l’innovation. D’arriver avec de nouveaux projets et de nouvelles idées. J’ai des données factuelles, qui font partie de la qualité.Les nouvelles technologies sont-elles plus difficiles à mesurer que les anciennes ?Pas vraiment. Pour être honnête, internet n’a rien apporté à des gens comme nous. C’est juste une nouvelle technologie. Nous utilisons le protocole internet à la place de ce nous utilisions avant. C’est une nouvelle façon d’appliquer la technologie.Tout cela tend finalement à prouver que les benchmarks sont assez inutiles ?Mon credo principal, c’est d’utiliser la technologie pour des choses réelles, et non anecdotiques. Mais vous ne pourrez jamais rendre tout le monde heureux. Il y aura toujours quelqu’un pour dire que vous êtes lent et coûteux. L’avantage des benchmarks, si on sait les utiliser, c’est qu’ils donnent des faits. Et je crois aux décisions fondées sur les faits.1. EFQM : European Foundation for Quality Management.


2. Investor In People : standard défini en Grande-Bretagne en 1991, qui fournit un gabarit pour assembler une bonne gestion des employés avec des objectifs business et organisationnels.

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Philippe Billard