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Reprise de matériels usagés : la CLCV assigne en justice GrosBill et Delamaison

L’association de consommateurs assigne Grosbill et Delamaison en justice pour des clauses illicites et/ou abusives sur la reprise du matériel usagé. Les deux sociétés nient toute infraction.

Depuis 2005, pour tout nouvel appareil électrique ou électronique acheté en magasin ou sur Internet, le vendeur est tenu de reprendre l’ancien gratuitement. Mais est-il tenu par la loi de transporter gratuitement le matériel repris ? Oui, pour la CLCV (Consommation logement et cadre de vie) qui a décidé d’assigner en justice deux importants sites marchands, Grosbill et Delamaison, pour des clauses illicites et/ou abusives, a-t-elle annoncé le 18 décembre 2013. Selon une enquête sur la reprise « un pour un » auprès d’e-commerçants, l’association de consommateur a relevé des dysfonctionnements qui expliquent sa décision.

« Chez Grosbill.com, il faut choisir la livraison premium pour bénéficier de la reprise, ce qui entraîne un coût supplémentaire de 20 euros par produit. » Quant à Delamaison.fr, elle « facture 22 euros la reprise dans le cadre d’un accord avec le transporteur Geodis ». Pour la CLCV, il s’agit, en droit de la consommation, d’une « clause illicite ». Elle réclame donc 100 000 euros à Grosbill.com.

« Le coût du transport, ni plus ni moins »

Pour Stéphane Catrice, directeur général de Grosbill.com, cette assignation est une surprise. « Je n’ai jamais été contacté par la CLCV », nous a-t-il expliqué. Selon lui, son entreprise respecte la loi en reprenant gratuitement les matériels usagés dans tous ses magasins. Quant à Internet, le dirigeant rappelle des « des réalités économiques ». Il rappelle en effet que « les 20 euros que nous facturons pour une reprise à domicile correspondent au coût du transport, ni plus ni moins ».

Idem pour le directeur général du site Delamaison.fr. Interrogé par Le Parisien, il estime lui aussi remplir ses obligations : « Nous appliquons la reprise gratuite à la condition que le matériel soit déposé directement dans l’un de nos magasins. »

Dans une enquête réalisée en octobre dernier auprès de 22 sites marchands (1), la CLCV a vérifié plusieurs points : si la possibilité de reprise était indiquée et où, quelles en étaient les modalités  et surtout si la reprise était bien gratuite.

Cette possibilité n’apparaît pas du premier coup d’œil, a  constaté la CLCV. Pour trouver l’information, il faut naviguer à différents endroits : 31 % des sites l’indiquent sur la fiche produit, 22 % dans les conditions générales de vente, 13 % sur la page Livraison. Plus grave, 17 % des sites ne fournissent pas cette information.

L’association a aussi relevé que Mistergoodeal et Villatech facturent la reprise. Ils ne font pourtant pas l’objet d’une assignation en justice. « Ces mentions n’étant pas indiquées de manière explicite, il était plus difficile juridiquement de prouver la faute », a expliqué à l’AFP un représentant de l’association.

La CLCV a ensuite constaté que parmi les sites qui indiquent reprendre du matériel usagé, plus de la moitié ne donnent aucune information, ce qui peut tout laisser supposer : qu’une partie ne facture pas la reprise, mais aussi que d’autres la font payer. Ce qui fait réagir Stéphane Catrice : « Pourquoi ne pas se pencher sur leurs pratiques ? Nous ne représentons quasiment rien sur le marché national de l’électro-ménager. A peine 0,032 % des parts de marché. »

Mais que dit réellement la loi ? Le décret n°2005-829 du 20 juillet 2005 relatif à la composition des équipements électriques et électroniques et à l’élimination des déchets issus de ces équipements  indique dans son article 8 que « lors de la vente d’un équipement électrique ou électronique ménager, le distributeur reprend gratuitement, ou fait reprendre gratuitement pour son compte, les équipements électriques et électroniques usagés que lui cède le consommateur, dans la limite de la quantité et du type d’équipement vendu ».

Un coup de pub ?

Le ministère de l’Ecologie, s’appuyant sur une directive européenne de 2002 révisée en 2012, a apporté des précisions dans une note d’information. Il y explique que la reprise gratuite signifie que le distributeur doit indiquer à son client le lieu où l’équipement usagé peut être rapporté gratuitement (point de vente, point de livraison, service après-vente…). Et, dans le cas d’une livraison à domicile du produit vendu avec reprise de l’ancien, il n’est pas exclu qu’une participation financière soit demandée au consommateur. Les sites incriminés par la CLCV ne sont donc pas dans l’illégalité lorsqu’ils demandent une participation aux frais de transport liés à la reprise d’un matériel usagé.

Finalement, explique Me Céline Avignon du cabinet Bensoussan, « pour limiter les risques de clauses abusives et la qualification d’un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du non-professionnel ou du consommateur, les sites devraient proposer une option alternative à la reprise et indiquer ces deux options pour que le consommateur puisse faire son choix : soit ramener par ses propres moyens son appareil usagé en magasin ou dans tout autre endroit désigné où il sera repris, soit participer aux frais d’enlèvement du matériel repris, sous réserve que ceux-ci demeurent justifiables par le professionnel ».

Pour le patron de Grosbill, cette attaque de l’association de consommateur ne tient donc pas. Pour lui, « la CLCV s’est fait un coup de publicité à quelques jours de Noël sur le dos des pure players », conclut amer le dirigeant.

 

(1) Liste des 22 sites étudiés par la CLCV : Cdiscount.com, Pixmania.fr, Mistergooddeal.com, Rueducommerce.fr, Darty.com, Boulanger.fr, Amazon.fr, Conforama.fr, But.fr, Laredoute.fr, 3suisses.fr, Delamaison.fr, connexion.fr, Fnac.fr, Priceminister.com, Grosbill.com, Materiel.net, Online.carrefour.fr, LDLC.com, VPCBoost.com, Villatech.fr et Vente-privee.com.

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Cécile Bolesse