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Pour les géants de l’informatique, ‘ Second Life ‘ n’est plus du jeu

IBM, Sun, Cisco, Dell… Toutes ces grandes entreprises high-tech se retrouvent dans l’univers persistant de ‘ Second Life ‘. Rencontres avec les clients, présentations de produits, démonstrations,
réunions : cela n’a plus rien à voir avec le jeu en ligne.

Plus personne n’échappe à Second Life. Et surtout pas les fournisseurs informatiques. Comment ignorer ce monde virtuel, qui, depuis la rentrée, alimente toutes les conversations… du monde réel ?
D’autant que Second Life pourrait générer de lourds changements dans leurs activités. Nouvelles technologies, nouveaux modes de collaboration et nouveaux usages en tout genre… Ce méta-univers dessinerait-il
l’internet de demain ?Pour y entrer, nul besoin de ‘ porte des étoiles ‘ ni de ‘ vortex ‘. Télécharger le module client (secondlife.com) et créer un avatar (personnage virtuel) suffit. L’aventure
virtuelle peut commencer. Près de 2 millions d’humains l’expérimentent déjà. Ils étaient à peine 1 million il y a un mois. De quoi attirer les entreprises. D’autant que Second Life se distingue par
une économie digne du monde réel. Cet univers dispose de sa propre monnaie, le Linden dollar, convertible en dollars. On n’entre pas dans Second Life pour détruire à la kalachnikov des monstres, comme dans un vulgaire jeu
en ligne. Mais on peut y créer ses propres produits et les vendre ! Pour l’instant, ce n’est pas ce type de commerce qui attire les IBM, Dell, Dassault Systèmes et autres Cisco.

1 – L’espace collaboratif du futur

‘ Second Life est une sorte de wiki 3D géant ‘, résume Ian Hugues. L’homme est l’un des deux ‘ évangélistes en méta-univers ‘ nommés par IBM il y a
neuf mois. Ces deux observateurs passent leurs journées dans le monde virtuel. Mais leur passion pour le jeu n’explique pas tout. Big Blue possède plusieurs îles ?” l’unité géographique de base de Second
Life ?”,
dont une publique. Il y organise des réunions, des présentations, des formations. 700 de ses employés, résidents de Second Life, préfèrent s’y retrouver pour collaborer plutôt que de se
connecter à une classique visioconférence. Pourquoi ? ‘ Un avatar applaudit, bouge la tête, montre du doigt, explique Ian Hugues. Bien sûr, ce n’est pas le monde réel. Mais cela s’en
approche bien plus qu’une visioconférence. ‘
Jean-Michel Cornu, consultant, directeur scientifique de la Fing, le confirme. Selon lui, lorsque nous parlons, à peine 10 % du sens passe par le langage, environ 40 % par les intonations de la voix, et 50 % par notre
comportement corporel. Tout est dit. Mais IBM ne se contente pas d’utiliser ce nouveau mode de collaboration. Il en étudie tous les mécanismes. Et s’il s’en inspirait pour bâtir les intranets de demain ?Pour la plupart des industriels high-tech, Second Life est d’ailleurs devenu le lieu de rencontre idéal avec leur clientèle. Sun a ouvert son bureau virtuel. Les développeurs qu’il courtise assistent à
loisir à des démonstrations de produits, et se forment. Ils sont aussi invités à donner leur avis sur l’offre. Même démarche chez Dell. Sa toute dernière usine trône sur sa Dell Island depuis début décembre. Tout avatar intéressé peut la
visiter, et surtout se promener au c?”ur même d’un PC XPS 700. Quelques jours plus tôt, Cisco avait, lui aussi, inauguré sa présence ‘ in world ‘. Tous les feedbacks
sont les bienvenus !

2 – De nouvelles formes de technologies

Second Life a beau être virtuel, il n’en est pas pour autant plus parfait que le monde réel. Bogues et attaques lui gâchent régulièrement la vie. Pour l’instant, les développeurs de Linden Lab, éditeur
de l’univers, tiennent à leur indépendance. Ils ne collaborent directement avec aucun industriel. IBM s’intéresse néanmoins au perfectionnement des technologies de base de ces univers. L’exécution de calculs destinés à de
lourdes simulations en temps réel ne lui est pas totalement étrangère. Il réfléchit aussi à interfacer les mondes virtuels entre eux. ‘ Nous continuons d’apprendre comment fonctionne ce monde
complexe ‘,
reconnaît Ian Hugues.Mais Second Life n’attire pas que les grands de l’infrastructure. Il séduit les accros de la 3D. L’un des rares Français à avouer son engouement pour ces mondes nouveaux est d’ailleurs
Dassault Systèmes. Bernard Charlès, son PDG, ne prend plus la parole en public sans invoquer ce qu’il considère comme l’avenir… de la 3D. Quoi de plus logique lorsqu’on édite des environnements d’usine virtuelle et
des logiciels de conception de produits.‘ Il existe dans Second Life un outil très simple de CAO. Pourquoi n’y verrait-on pas Catia et nos autres logiciels ?, s’interroge Bernard Charlès.
Certains industriels bien réels rachètent déjà les brevets d’objets conçus par des avatars. ‘ Autrement dit, pourquoi ne pas les concevoir avec les logiciels professionnels utilisés dans l’industrie
réelle ? Jean-Michel Cornu, lui, imagine même de remplacer la souris par une Wii ?” Nintendo y travaille ?” pour dessiner les objets Second Life, et de fabriquer ceux-ci dans le monde réel avec une
imprimante 3D !

3 – Sans oublier la communication et le marketing !

En attendant, Second Life est aussi, bien sûr, une splendide vitrine offerte aux yeux des 2 millions d’avatars. Les patrons de Sun, Dell, Cisco et IBM ont, tour à tour, tenu des conférences de presse dans le monde virtuel.
Sur son blog, un habitant de Second Life raconte même comment son avatar a été abordé par une employée d’Autodesk qui cherchait des chaises pour une conférence ‘ in world ‘ (il s’est
empressé de lui en fabriquer !). L’éditeur de logiciels 3D destinés, entre autres, à l’architecture a proposé, cet automne, aux visiteurs bien vivants de son université annuelle à Las Vegas, de créer leur avatar et se retrouver de
l’autre côté du miroir. Ces manifestations sont d’ailleurs couvertes par Adam Reuters. L’avatar-reporter cache un vrai journaliste, envoyé spécial sur place de Reuters. Son rôle ? Raconter au monde réel tout ce qui se passe
dans le monde virtuel !

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Emmanuelle Delsol avec Philippe Davy