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Oeuvres d’art : le cadre juridique des enchères en ligne remis en question

Le Forum des droits sur l’Internet juge la réglementation actuelle mal adaptée. Il a soumis ses réflexions au ministre de la Culture.

Il y avait déjà l’industrie du disque et l’industrie cinématographique. Depuis quelque temps, c’est au petit monde des ventes aux enchères d’exprimer ses inquiétudes face à Internet. Elles ne sont pas complètement nouvelles mais, hier,
le Forum des droits sur l’Internet (FDI) a remis publiquement au ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, une recommandation sur
‘ le courtage en ligne de biens culturels ‘. L’enjeu : donner des pistes aux Pouvoirs publics pour réajuster le cadre
légal.C’est le Conseil des ventes volontaires, l’autorité de régulation du secteur, qui avait saisi lui-même le FDI en mai 2003. Une loi fait référence, celle du 10 juillet 2000 réglementant les ventes aux enchères de biens mobiliers,
et qui s’applique aux enchères en ligne portant sur des biens culturels.Mais comme ce texte ne dit pas ce qu’est un ‘ bien culturel ‘, le Conseil des ventes volontaires avait proposé, en septembre 2002, sa propre définition.Or, l’initiative revenait à
limiter les possibilités de procéder à des enchères en ligne, bridant même, d’après les sites Internet concernés, la vente de produits culturels courants, comme les BD ou des anciens
numéros de magazines, voire d’objets vendus habituellement lors de vide-greniers.En fait, et la rencontre publique organisée hier pour présenter les travaux du FDI l’a démontré, le secteur semble animé d’une certaine méfiance vis-à-vis des sites d’enchères. Et les uns de mentionner la douteuse vente en ligne d’un
Rubens sous-évalué à 10 000 euros, les autres de craindre une diffusion facilitée pour les faux, d’autres encore craignant une dégradation de la notion d’art…

Un chantier vaste et aux contours flous

Dans sa recommandation, le FDI, reconnaît que les ‘ dispositions de la loi du juillet 2000 […] semblent difficilement applicables aux opérations de courtage en ligne portant sur les biens
culturels. ‘.
Comment en effet les sociétés de vente en ligne pourraient-elles garantir la vente et la livraison, s’assurer du paiement, tenir informé le ministère de la Culture (pour que l’Etat puisse éventuellement faire
valoir son droit de préemption), tenir un registre des objets mis en vente ?… ‘ Des obligations telles qu’elles [les sociétés de courtage en ligne, ndlr] ne seraient sans doute pas en mesure d’accueillir [des] (…) offres portant sur des biens
culturels. ‘
De son côté, le Code du commerce impose la présence d’un expert au sein d’une entreprise de courtage pour diriger la vente aux enchères. Encore une impossibilité pratique pour un site, puisqu’il n’a pas physiquement
les biens dans ses locaux.Dans ce cas précis, le FDI recommande de supprimer cette obligation pour les sites. D’autres garanties pour l’acheteur en ligne existent par ailleurs (possibilité de se rétracter, recours en justice…).Mais le Forum suggère également que vendeurs et acheteurs aient l’obligation de recourir à un tiers de confiance pour les transactions de plus de 3 000 euros. Les obligations légales des acheteurs devraient aussi être
clairement affichées par les sites.Sur le délicat sujet de la fraude, le FDI plaide en faveur d’une coopération entre les sites et les pouvoirs publics. Concrètement, le Forum envisage un système permettant de confronter les images numérisées d’objets volés figurant dans
les fichiers des autorités et celles des objets vendus sur les sites, dans l’optique d’une première vérification.Si le FDI ne propose pas sa propre définition d’un bien culturel, il estime non seulement qu’elle doit être revue dans sa globalité, mais aussi que toutes les sous-catégories de biens définies jusque-là (peinture, sculpture, tapisserie,
meubles, instruments de musique…) le soient aussi.Sur tous ces sujets, le ministre de la Culture a souhaité pouvoir réunir un jour les différents participants au débat (Patrimoine, commissaires priseurs, galeristes, sites d’enchères en ligne,…), un peu comme il a été possible de le
faire récemment avec les représentants de l’industrie musicale et les FAI. Mais il ne s’est pas risqué à sengager sur un calendrier.

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Arnaud Devillard