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Nos amis du futur

Le premier salon professionnel européen consacré à la robotique de service s’est tenu à Lyon du 23 au 25 mars dernier. L’occasion de découvrir de quoi sera fait l’avenir. Car, n’en doutez pas, il sera peuplé de robots.

En 2012, la robotique de service pèsera 24 milliards de dollars, soit 12 milliards de plus qu’en 2009. Selon l’International Federation of Robotics, qui regroupe les plus grandes organisations liées au développement de la robotique, le marché mondial atteindra même 100 milliards de dollars en 2020. La robotique de service regroupe plusieurs domaines, tels que l’assistance à la personne, l’éducation, l’événementiel et le jeu. Il y aurait aujourd’hui 200 fabricants de robots dans le monde. L’Asie est aujourd’hui le principal acteur de ce secteur encore balbutiant, mais l’Occident ? et la France en particulier ? fait preuve d’un réel dynamisme, tant dans les domaines de la recherche que de l’innovation.La robotique de service française ne se résume pas à Nao, le petit humanoïde développé par Aldebaran Robotics et considéré comme l’un des plus perfectionnés au monde. De nombreuses start-up développent les robots qui, d’ici à trois ans, peupleront notre quotidien. Nous avons pu en découvrir quelques-uns au premier salon européen de la robotique, qui s’est tenu à Lyon, InnoRobo. Une vingtaine de sociétés et de laboratoires y ont exposé leurs robots, certains étant déjà commercialisés, d’autres en cours de développement. Paradoxalement, nous avons eu l’impression de revenir au début des années 1980, à l’époque des premiers salons consacrés à l’informatique grand public. Nul n’imaginait que l’ordinateur changerait nos vies de manière aussi profonde. Cette fois, nous sommes prévenus. Comme le prédit Bruno Bonnel, l’organisateur d’InnoRobo, la robolution est en marche.

Jazz : l’expert en surveillance et relations publiques

Créée en 2006, la société française Gostai a lancé en janvier dernier sa première génération de robots, dénommée Jazz. Hauts de 1 m, pour un poids de 8 kg seulement, ils se déclinent en deux versions. Le Jazz blanc est conçu pour des missions de téléprésence mobile, et notamment pour la visioconférence et l’événementiel. Il est télécommandé par un opérateur qui le manipule à distance, via Internet. Une version équipée d’un écran LCD permet à l’opérateur de montrer son visage à son interlocuteur. Le Jazz noir est destiné à la télésurveillance de locaux.Totalement autonome, il peut accueillir, en plus des 14 capteurs à détection d’obstacles, un laser télémétrique lui permettant de cartographier son environnement pour optimiser ses patrouilles. Tous les Jazz intègrent une caméra grand-angle à reconnaissance de visages, deux haut-parleurs, un micro, le tout géré par un PC sous Linux équipé d’un processeur double cœur. La batterie lithium-ion leur procure 5 h d’autonomie. Quand l’énergie vient à manquer, les Jazz rejoignent automatiquement leur station de recharge. Ils sont vendus à partir de 7 500 euros.

Acroban : le plus touchant

Parmi tous les robots présentés à InnoRobo, c’est Acroban qui nous a le plus émus. Développé par l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) de Bordeaux et l’université Bordeaux-I, Acroban s’inscrit dans un projet de recherche fondamentale visant à explorer les comportements mobiles d’un humanoïde et ses interactions avec des adultes ou des enfants. Acroban dispose d’une colonne vertébrale et d’un bassin articulés. Des ressorts et élastiques simulent muscles et tendons. De fait, les mouvements du robot surprennent par leur fluidité et leur réalisme quasi humain. Un peu gauche, Acroban fait penser à l’enfant qui apprend à marcher. Il trébuche mais se rattrape, récupère l’équilibre après avoir été poussé, se laisse guider lorsqu’on le prend par la main et, s’il tombe, l’incidence est faible, puisque le robot, constitué de pièces peu coûteuses, est aussi très solide. Présenté au grand public en début d’année, Acroban a surpris les chercheurs par l’attrait qu’il exerçait sur les jeunes enfants, ceux-ci n’hésitant pas à le toucher, à le pousser ou à le prendre par la main. Ce qui tend à prouver que la peur du robot est avant tout liée à l’éducation.

Compétition robotique VEX

La dernière journée du salon a permis à huit équipes de lycéens de s’affronter par robots interposés lors de la première compétition VEX organisée en France. Ce fabricant américain est l’un des leaders dans la robotique pédagogique. Les règles du jeu sont simples. Les robots, placés de chaque côté d’une paroi et pilotés via une manette par un opérateur, doivent saisir des ballons ovales et ronds puis les déplacer dans le camp adverse. Ambiance festive et sacrée performance générale, puisque les lycéens n’ont eu que trois semaines pour imaginer et concevoir leur robot à partir des pièces fournies par VEX.

Reeti : un PC très expressif

Développé par Robopec, Reeti est un PCBot, un robot qui intègre un PC équipé d’un processeur atom double cœur, une carte graphique Nvidia ion 2, un disque dur de 500 Go, un lecteur Blu-ray et une connectique complète, le tout orchestré par Linux. Mais c’est sa tête, recouverte d’une peau souple, qui concentre les innovations. Reeti est animé par 15 moteurs, dont 4 pour la bouche, qui grimace ou sourit en fonction de son humeur. Les oreilles expriment aussi des émotions, tout comme les paupières, mobiles. Les deux yeux sont indépendants comme ceux d’un caméléon et intègrent chacun une caméra HD. Vendu 5 000 euros dès la fin de l’année, Reeti est destiné à l’événementiel, à l’enseignement et à la recherche, notamment pour les interactions homme-machine. Il dispose d’applications de visioconférence et de télésurveillance.

Eccerobo : l’androïde qui a mal au dos

Le projet Eccerobo, financé par l’Union européenne et mené par quatre universités ainsi que par la société The Robot Studio (pour la partie mécanique), a été lancé pour vérifier s’il était possible de créer un robot “ anthropomimétique ”, c’est-à-dire conçu exactement comme un être humain. Après quasiment trois ans de recherche et d’expérimentations, le résultat est époustouflant. Les chercheurs sont parvenus à copier 100 % des parties mécaniques du corps humain. Chaque articulation est composée d’un moteur, d’une corde et d’une partie souple reproduisant le tendon. Ce projet a permis d’amasser d’immenses connaissances médicales, et notamment de déterminer l’incidence précise d’un mouvement sur l’ensemble du corps, ainsi que sur la puissance réelle de chaque muscle. La modélisation est si réaliste que le robot subit un tassement de ses disques et un début de scoliose s’il reste debout trop longtemps. Il faut alors l’allonger pour que la colonne retrouve un aspect normal. Bien qu’il s’agisse de recherche fondamentale, les découvertes pourraient permettre d’améliorer les prothèses biomécaniques pour les handicapés.

Packbot : là où l’homme ne peut aller

La société américaine iRobot est l’un des leaders mondiaux dans la fabrication de robots. Elle a été fondée en 1990 par deux étudiants en robotique du MIT et leur professeur. En 2002, iRobot a lancé l’aspirateur Roomba, l’un des tout premiers robots domestiques. Six millions d’exemplaires ont été vendus à ce jour. Mais l’entreprise commercialise aussi des robots nettement plus sophistiqués, à l’instar des PackBot. Ces engins télécommandés par un opérateur sont utilisés pour des missions dangereuses, par exemple pour désamorcer une bombe, assurer une reconnaissance en milieu hostile ou intervenir dans des environnements où l’homme ne peut aller. Ces robots sont notamment utilisés en Afghanistan et à la centrale de Fukushima. Extrêmement maniable, le 510 peut franchir la plupart des obstacles et même gravir des escaliers. Il peut embarquer différents instruments, capteurs et caméras.

Robotswim : banc de robots

Et si vous mettiez des poissons dans votre piscine ? Jessiko, développé par le français Robotswim, est un petit robot de 20 cm de long capable de se mouvoir avec l’aisance d’un véritable poisson. Les nageoires avant et dorsale gèrent la profondeur, tandis que la caudale assure le déplacement avant et arrière. Les poissons, organisés en banc d’une dizaine d’individus, nagent de manière indépendante ou en groupe. Ce sont des balises étanches immergées dans le bassin et reliées à un PC externe qui transmettent les ordres d’évolution. La portée d’émission étant très faible dans l’eau, les poissons s’échangent les informations qu’ils ont récupérées en passant près d’une balise. Ils intègrent également un détecteur d’obstacle. Jessiko est alimenté par une batterie polymère, qui lui assure une journée d’autonomie. Il sera proposé en location pour des manifestations événementielles dès l’été prochain. Une version destinée aux piscines privées est à l’étude et devrait voir le jour dans trois ans. Elle intégrera une “ méduse ”, station de recharge flottante alimentée par énergie solaire.

POB Robotics Suite : robot mode d’emploi

Pour découvrir la robotique et la programmation, voici POB Robotics Suite, de la société lyonnaise POB-Technology. Il se compose d’une base mécanique, un bloc de 15 cm de côté qui intègre deux processeurs ARM7 ainsi que 16 connecteurs. Les roues sont alimentées par deux moteurs. Quatre des faces du robot intègrent des cartes plastique perforées sur lesquelles sont adaptés les accessoires (pince, radar, engrenages, kit Wi-Fi…). La plate-forme seule est vendue 300 euros. Les robots peuvent être programmés en Basic ou C, mais aussi grâce au langage Risbee, un logiciel de programmation graphique intuitif composé d’icônes à placer sur une grille selon les actions qu’on leur assigne. De quoi s’initier en douceur.

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Philippe Fontaine