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L’UMP cherche du soutien par mail

Le parti politique a lancé une campagne d’e-mailing politique. 300 000 courriers sont déjà partis, mais l’initiative soulève plusieurs questions sur l’utilisation des fichiers d’adresses.

Nicolas Sarkozy a besoin de vous. Il vous veut à ses côtés pour ‘ participer à l’?”uvre de redressement et […] préparer les élections législatives et présidentielles de 2007 ‘. Et
pour cela, le président de l’UMP a décidé d’innover. Il envoie des mails. Beaucoup de mails. Déjà trois cent mille depuis le début du mois de septembre sur les deux millions prévus. L’UMP est, en effet, en train de lancer à grande échelle le
marketing politique par e-mailing.Le message contient donc un texte de Nicolas Sarkozy (qui apparaît comme l’expéditeur dans votre messagerie électronique), avec sa signature manuscrite, sa photo, un lien sur un gros ‘ OUI ‘ renvoyant à une
page d’inscription sur le site de l’UMP pour suivre les débats à venir. Un autre lien pour s’inscrire à la lettre électronique du parti et un troisième pour carrément adhérer.Plus discret, mais bien présent, un dernier clic vous permet de sortir de la liste d’e-mailing de l’UMP. ‘ Le but est d’amener la modernité dans la vie politique, affirme-t-on au parti. C’est
un peu le tract du vingt-et-unième siècle. ‘
Le parti ne s’est pas fixé d’objectif en termes de taux de réponse. Seul horizon chiffré, gagner 200 000 adhérents, par e-mail ou non.Il reste que cette initiative soulève plusieurs questions. ‘ Certaines adresses sont ciblées, d’autres ne le sont pas, reconnaît-on à l’UMP, mais tout est tout à fait légal. Quand quelqu’un se
promène sur un marché avec des tracts, on peut prendre ou refuser le tract. Sur Internet, c’est pareil : le mail, vous l’ouvrez ou vous ne l’ouvrez pas. ‘
En fait, le prestataire choisi par l’UMP pour organiser cette campagne utilise des fichiers constitués par des entreprises commerciales après que l’internaute a donné son consentement pour recevoir des mails promotionnels. Comme
Maximiles, par exemple. Le spécialiste de la fidélisation sur Internet dispose d’un service, Maximail, où les internautes donnent de leur plein gré leur adresse afin de recevoir des publicités. C’est ce fichier qui a été loué pour servir à
l’UMP.

La Cnil se penche sur la question

Le problème n’est pas tant dans la location que dans le mélange des genres. ‘ On ne peut pas utiliser un fichier commercial à des fins politiques si on n’a pas dit aux internautes, à l’origine, c’est-à-dire au
moment où ils ont donné leur consentement, que cela pourrait être utilisé à des fins politiques ‘,
explique Christophe Pallez, secrétaire général aux affaires juridiques de la Commission nationale informatique et libertés
(Cnil). Une position que la Cnil exprimera demain, jeudi 29 septembre, dans une déclaration sur l’e-mailing politique. Un rappel, en fait, puisque la Cnil s’était déjà exprimée là-dessus le 3 décembre 1996 dans une
recommandation aux partis politiques.En attendant, l’organisme est en train de vérifier si les internautes présents dans les fichiers ont bien été prévenus d’une éventuelle utilisation politique. Il a par ailleurs reçu des plaintes d’internautes qui ne comprennent pas
pourquoi ils ont reçu le courrier de Nicolas Sarkozy.Plus largement, cette affaire révèle quelques lacunes de la loi pour la confiance dans l’économie numérique. L’article 12 encadre la prospection par mail, ‘ mais n’a pas retenu dans son périmètre tout ce qui
est e-mailing religieux, caritatif, politique ‘,
déplore Bruno Rasle, de Halte Au Spam. A l’époque des débats à l’Assemblée nationale, le député PS Alain Gouriou avait soulevé ce manque : ‘ Je
crains, mes chers collègues, qu’en période préélectorale, ou pis, électorale, un surcroît de messages non souhaités n’encombre nos boîtes électroniques. ‘
Il demandait une réglementation spécifique.L’autre problème concerne le droit d’accès et de rectification. La pratique de la location de fichier complique la démarche : ‘ Si l’internaute refuse de recevoir d’autres mails, on le fait disparaître des
listes de qui ? De l’UMP, du prestataire, du fichier d’origine ? ‘,
continue Bruno Rasle. Un flou d’autant plus grand qu’aucune obligation n’est faite d’indiquer, en cas de mail issu d’un fichier loué, l’origine de
la collecte. C’est-à-dire le fichier source et la société qui le détient.

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Arnaud Devillard