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Levée de boucliers contre les machines à voter

Huit des douze candidats à l’élection présidentielle s’opposent à l’utilisation du vote électronique. Et une pétition en ligne a déjà recueilli plus de 58 000 signatures.

Le 22 avril prochain quelque 1,5 million d’électeurs, dans 82 communes, ne glisseront pas leur bulletin dans l’urne. En lieu et place ils utiliseront l’un des trois systèmes de vote électronique agréés par le ministère de
l’Intérieur. Une première à l’occasion d’une élection présidentielle en France. Mais le recours à ces technologies suscite de plus en plus de scepticisme à mesure que se rapproche la date du scrutin. Les réactions exprimées vont de l’interrogation
sur la sécurité et la sincérité du vote électronique, à la protestation.De François Bayrou à José Bové, en passant par Ségolène Royal ou Jean-Marie Le Pen, huit des candidats à la magistrature suprême, sur les douze en lice, ont dit leur opposition aux machines de vote électronique. Seul Nicolas Sarkozy, et
ce n’est pas une surprise, affiche son soutien à ce nouveau mode d’expression du suffrage. Il y a quelques jours, c’est le Parti Socialiste qui
demandait un moratoire sur l’utilisation des urnes électroniques.Par ailleurs, en six semaines, une
pétition en ligne sur le site
ordinateurs-de-vote.org a réuni plus de 58 000 signatures pour le maintien du vote papier. Une mobilisation significative que Chantal Enguehard, maître de
conférences en informatique à Nantes, explique de la façon suivante : ‘ Le jour du vote, contrairement à un scrutin papier, le président du bureau de vote et les assesseurs ne peuvent plus exercer de contrôle sur le bon
déroulement du scrutin (…) Car il n’est pas possible de vérifier les résultats données par les ordinateurs de vote. ‘

Des solutions mal adaptées aux personnes handicapées

Les opposants aux machines de vote pointent aussi le manque de transparence en matière d’agrément des machines à voter. ‘ Malgré nos demandes répétées à la Commission d’accès aux documents administratifs, nous
n’avons jamais eu accès aux rapports d’agrément,
indiquent les responsables du site ordinateurs-de-vote.org. Et ce refus a été motivé de manière inquiétante. On nous a indiqué que “l’utilisation des rapports d’agrément
pourrait compromettre le bon déroulement des élections”. ‘
D’ici au 22 avril, jour du premier tour de la présidentielle, les responsables d’ordinateurs-de-vote.org appellent les électeurs concernés à vérifier auprès de leur collectivité si le matériel de vote qui a été vendu et livré à
leur ville correspond bien à celui qu’ils sont censés utiliser, et qui a été agréé.Autre point qui fait débat : l’accessibilité des personnes handicapées. ‘ C’est là encore un argument commercial avancé pour passer au vote électronique, explique Chantal Enguehard.
‘ Mais ce sont des idées en l’air qui ne reposent sur aucune base scientifique digne de ce nom. ‘ A l’occasion de la procédure d’agrément le ministère de l’Intérieur n’a par exemple
‘ pas jugé bon de consulter des associations de personnes handicapées ‘, note Gérard Uzan, chercheur à l’université Paris VIII au laboratoire Technologie, Handicap, Interface et Multimodalisme.L’université Paul Verlaine de Metz a récemment étudié la compatibilité de ces machines avec une population de personnes déficientes visuellement. Les résultats ne sont pas brillants : ‘ guidage vocal mal
conçu, écran de contrôle peu lisible, carte nécessaire pour voter sans aucun repère tactile ‘…
Sur quatre personnes ayant testé les machines de marque Nedap ou Indra, une seule est parvenue à voter correctement.

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Philippe Crouzillacq