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Les maisons d’édition se livrent une bataille acharnée sur la propriété des écrits numériques

Rosetta Books et Random House, les David et Goliath du livre, s’affrontent en justice aux États-Unis. L’enjeu : la propriété des droits d’auteur des e-books.

Un procès brûlant se déroulera cet été à la Cour de justice du district Sud de New York. Au c?”ur du débat, une question cruciale : à qui appartiennent les droits d’auteur des livres électroniques ? Aux maisons d’éditions, qui ont acheté des années plus tôt l’exclusivité des livres imprimés ? Ou bien à l’écrivain, libre alors de vendre une seconde fois ses ?”uvres en version électronique ? Random House, filiale du groupe allemand Bertelsmann a mis le feu aux poudres en portant plainte, en février dernier, contre la start-up Rosetta Books, qui se propose d’offrir sur internet la version électronique de livres de trois auteurs, appartenant à l’écurie Random House. Les trois renégats, William Styron, Kurt Vonnegut et Robert Parker ont vendu l’an dernier la version électronique de sept ” vieux ” livres à Rosetta Books, parmi lesquels des titres bien connus, Terre promise (Robert Parker), Les Confessions de Nat Turner, Le Choix de Sophie (William Styron), La Maison du crime 5 et Le Berceau du chat (Kurt Vonnegut).

Un marché qui ne justifie pas toutes ces grandes man?”uvres judiciaires

A priori, le marché de l’e-book ne justifie pas aujourd’hui de grandes man?”uvres judiciaires. Rosetta Books vient tout juste d’émerger sur la planète littéraire, grâce à l’agent Arthur Klebanoff et aux fonds de la banque Sonenshine Pastor qui ont misé dans l’aventure 2 millions de dollars (2,27 millions d’euros). De quoi lancer en début d’année sur internet une petite centaine d’?”uvres électroniques du XXe siècle, écrites par Aldous Huxley, Winston Churchill, Pat Conroy, Ray Bradbury… Mais les internautes ne se précipitent pas. Selon les prévisions établies par le cabinet IDC (International Data Corporation), les ventes de terminaux nécessaires à la lecture de ces écrits devraient tout juste atteindre cette année 153 000 exemplaires et 1,7 million en 2004. Les experts les plus optimistes estiment que les ?”uvres électroniques réaliseront 10 % de l’ensemble des ventes… à l’avenir. Il n’empêche ! La direction de Random House soutenue par ses éminents confrères (Time Warner, Penguin, Simon et Schuster…) prend très au sérieux cette affaire. Et Rosetta Books aussi. La start-up a retenu les services du célèbre avocat David Boies, déjà engagé sur le dossier Napster… Car un jour, parient les deux protagonistes, le marché du livre électronique décollera. Et ce jour-là, mieux vaudra être aux commandes.

Une renégociation des contrats ?

Au centre des débats, se retrouve la définition de deux mots inscrits dans les contrats : ” forme de livre “. Dans son plaidoyer, remis à la justice l’avocat de Random House, dit avoir acheté l’exclusivité des ?”uvres, quelle que soit leur forme. “Les livres, au cours des ans, est-il expliqué, ont été gravés dans la pierre, puis ils ont été écrits sur papyrus, parchemin, vélin et papier.” La version internet est la suite logique de cette longue évolution. Pas du tout, objecte-t-on chez Rosetta Books. Quand les contrats ont été signés avec les auteurs, dans les années soixante, soixante-dix nul n’avait imaginé l’explosion d’internet et l’accord passé se limitait bien à la version imprimée du livre. La preuve ? Lorsque les livres audio, sur CDRom sont apparus au début des années 1990, Alberto Vitale, patron à l’époque de Random House a jugé bon de modifier ses contrats pour inclure les droits électroniques.De l’issue du débat dépendra l’avenir de l’industrie. “ Si Rosetta Books l’emporte, souligne l’avocat Owen Seitel, l’expert en droits d’auteur du cabinet californien Idell Berman Seitel, les petites maisons d’édition s’épanouiront. La concurrence sera intense et beaucoup plus de livres électroniques verront le jour. ” En revanche, si les géants de lédition gagnent, la fièvre retombera.

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Caroline Talbot à New York