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Le gouvernement accélère sur l’e-coffre-fort

Le stockage électronique des données administratives des citoyens mérite bien un débat. Lionel Jospin le programme en trois étapes : les questions jusqu’en février, les discussions avant l’été, les propositions à la rentrée.

Alors que le projet de loi sur la Société de l’information défendu par Christian Pierret ne verra vraisemblablement jamais le jour sous ce gouvernement ?” hormis les dispositions relatives au stockage des données et à la cryptologie adoptées en urgence par l’Assemblée nationale le 31 octobre ?”, Lionel Jospin a tenu à organiser ce 15 novembre à Matignon un Comité interministériel pour la réforme de l’État (Cire), largement consacré aux nouvelles technologies. Il s’agit d’annoncer la généralisation, d’ici à 2005, de 2000 téléprocédures et d’aborder concrètement le contenu du coffre-fort électronique, annoncé par Michel Sapin, le ministre de la Fonction publique, cet été à Hourtin. L’édition 2000 du Cire avait lancé 20 premières téléprocédures, et 1100 formulaires sont actuellement accessibles sur le net, soit la totalité des documents administratifs destinés aux particuliers. Mais la partie la plus innovante de ce Cire 2001 réside dans la rédaction d’un échéancier précis pour l’e-coffre-fort.De quoi s’agit-il ? De la possibilité pour les services de l’État de rassembler sur un support électronique ?” dont la forme reste à définir ?” les données administratives des citoyens. Cette définition toute théorique suscite des interrogations très concrètes : s’agira-t-il d’une carte à puce, qui porterait ces données, ou d’un code d’accès à des informations, qui seraient stockées sur les ordinateurs de l’administration ? Quelles seront les informations accessibles ? Le citoyen sera-t-il informé chaque fois que ses données seront consultées… Autant de sujets qui divisent adeptes de la technique et défenseurs des libertés. Le gouvernement a donc commandé un Livre blanc à une série d’experts des NTIC, qui devront remettre leur copie en février prochain. Le but ? Rassembler le maximum de questions sur le sujet. Quelles données ? Quel support ? Quelle régulation ? L’idée est d’ouvrir dans les six mois suivants, jusqu’à l’été, un débat public : colloques, échanges en ligne, articles dans la presse généraliste, émissions de radio ou de télévision…

L’avis des citoyens

Tous les citoyens, et pas les seuls internautes, pourront s’exprimer sur cette organisation administrative. Afin qu’en septembre 2002 un Livre vert de propositions soit remis au gouvernement, à des fins législatives ou réglementaires. “ L’idéal serait que la campagne électorale serve de support à ces débats “, indique-t-on dans l’entourage de Michel Sapin. Et d’insister sur le caractère apolitique de cette révolution technico-administrative, puisque la majorité actuelle, qui lance le projet, n’a aucune certitude d’être aux affaires après les élections législatives.Mais la polémique n’attend pas. Ainsi, Philippe Lemoine, coprésident du groupe Galeries Lafayette, voit dans le coffre-fort électronique “ une chimère qui essaye d’assembler l’ancienne conception de la démocratie égalitaire (l’électronique pour tous), les aspirations nouvelles qui se cherchent autour de la personne (le coffre-fort personnel) et la vision traditionnelle d’un État parvenant à transcender les particularismes, au nom de la Loi universelle (le coffre-fort citoyen) “. Ce manager dénonçait, en septembre, lors de la conférence internationale des commissaires à la protection des données, ce “ little brother, pavé de trop bonnes intentions “. Une critique qui ne laisse pas le gouvernement indifférent, puisqu’il garde en mémoire le récent échec québécois. Il y a 18 mois le Québec avait créé une carte électronique, sans débat préalable. Accusés de vouloir jouer les grands inquisiteurs, les pouvoirs publics ont suspendu ce programme. Reste à savoir pour combien de temps.Un raté qui alimentera à coup sûr les échanges des ministres européens de la Fonction publique qui se réuniront les 29 et 30 novembre à Bruxelles afin d’adopter une résolution sur l’administration électronique.

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Nicolas Arpagian