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Le changement échappe aux informaticiens

Souvent prise en compte trop tard, la conduite du changement souffre d’une vision trop séquentielle.

Quand cette grande société du secteur des services entame son projet de mise en ?”uvre d’un progiciel de gestion intégré, la direction sait qu’elle va bouleverser la vie de son réseau d’agences. Changement de processus, remise en cause des modes de travail, déplacement des frontières entre services… Toutes les précautions sont prises. La direction générale elle-même valide les décisions, impliquant la DRH, qui déclenche une communication auprès de milliers de futurs utilisateurs. Un an et demi plus tard, le projet se termine, conformément au planning. Et la belle mécanique se bloque en trois semaines à peine, faute d’utilisateurs…La raison ? La formation. Essentiellement axée sur les changements à l’intérieur de chaque service, elle ” oublie ” les interactions avec l’amont ou l’aval. En outre, le manque de maîtrise de modes de contrôle différents déclenche des vérifications quasi manuelles des informations fournies par le système. Les temps de réponse deviennent déplorables et renforce le sentiment que le nouveau système ne fonctionne pas. La facturation pose ainsi de gros problèmes. Tout cela alors que le système informatique, lui, fonctionne parfaitement.”Les responsables de service savaient ce que faisaient leurs subordonnés, raconte Martine Vinçotte, directrice associée du cabinet KLC, chargé de redresser la barre. Mais ils n’avaient pas complètement assimilé la portée des nouvelles applications. Ils ont découvert que leurs anciennes méthodes de contrôle et d’évaluation du travail n’étaient plus pertinentes. ” D’où une perte de confiance et le rejet de la faute sur les autres services.Le problème, ici, c’est celui de l’ampleur de vue des responsables du projet. Elle doit s’exercer sur le projet et sur l’entreprise. Synonyme de gros pépins lorsqu’elle manque, elle s’exprime sous des formes diverses. Les récentes restructurations informatiques à la Caisse d’Epargne ou à La Poste soulèvent ainsi des questions de mobilité géographique, de changement de compétences, voire de réduction d’effectif. Dans les deux cas, il y a eu grève, le personnel se sentant mal informé sur tout ce volet social.

Confusion entre organisation et informatique

Dans de telles situations, la direction informatique est relativement impuissante. “L’organisation ne peut être que rattachée à une direction générale, insiste un responsable de formation. On a parlé de ” direction de l’organisation et de l’informatique “. C’est une belle idée. Mais est-ce l’endroit pour faire de l’organisation ? ” Sans compter que souvent, en parallèle des développements informatiques, l’activité opérationnelle continue.Les directions informatiques et les chefs de projet ont une vision d’autant plus biaisée qu’ils découpent les projets par étapes séquentielles, voire cloisonnées. Conséquence : la formation et la conduite du changement sont prises en compte trop tard. “Il faudrait profiter du temps du développement informatique pour préparer l’organisation des nouvelles méthodes de travail, résume Philippe Fortin, directeur des instituts Sodifrance, spécialisés dans la formation bureautique. Or, du fait de l’approche séquentielle des entreprises, tous les projets de changement sont difficiles.

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Arnaud Devillard