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Le bonheur, c’est simple comme un coup de fil

D’un coté, France Télécom encaisse l’argent des abonnés à son service Liste Rouge. De l’autre, il n’hésite pas à exploiter leurs données pour sa propre prospection. Le pire, c’est que c’est
parfaitement légal.

La journée s’annonçait plutôt mal. Ce jour-là encore, il fallait s’armer de patience pour aller travailler, en raison de la grève des transports. Afin de retarder quelque peu l’inévitable galère du trajet, j’avais fait un
détour par ma boîte aux lettres. Et là, surprise ! Entre la facture d’EDF et un monticule de prospectus, gisait une lettre de France Télécom.Bizarre ! J’avais pourtant payé ma facture. Non, il ne s’agissait pas d’un rappel. Déçu par mes infidélités pour un opérateur alternatif, France Télécom me démarchait par cette missive très ciblée :
‘ Les meilleurs tarifs ne sont pas toujours ceux que l’on affiche. ‘J’ai trouvé ça ‘ un peu fort de café ‘. C’est que chaque mois, pour ma tranquillité, je lui donne 2,51 euros, taxes comprises, à France Télécom. J’ai en effet souscrit au
service Liste Rouge. Un service qui doit non seulement garantir que ‘ mes coordonnées n’apparaissent pas dans l’annuaire ‘, mais aussi qu’elles ‘ ne soient pas commercialisées à
des fins de marketing direct ‘.
J’avais tort de penser qu’elles me protégeaient aussi du harcèlement de notre opérateur historique. France Télécom peut-il exploiter sa base Liste Rouge pour du marketing direct ? Autrement dit, avoir le beurre et l’argent
du beurre ?J’appelle mon agence locale pour tirer l’affaire au clair. Une opératrice fort ennuyée par ma requête me répond, non sans avoir pris des renseignements auprès de ses collègues : ‘ C’est comme ça. De
fait, France Télécom exploite sa base clients, y compris la Liste Rouge. ‘
Au service marketing du groupe, la réponse diffère quelque peu… c’est le moins que l’on puisse dire. ‘ Nous exploitons notre base clients, pas la Liste Rouge. Nous vous contactons, comme votre assureur peut
le faire pour vous tenir informé de ses nouvelles offres, via notre base clientèle. ‘
L’argument est imparable puisque un abonné Liste Rouge est de facto un client France Télécom. La démarche de marketing direct devient ainsi totalement légale, toute entreprise ayant le droit de collecter des
données sur ses clients à condition de les en informer et de leur donner un droit d’accès pour rectification.Sauf que moi, je trouve ça franchement limite. France Télécom encaisse la monnaie pour vous protéger du marketing direct… des autres, mais pas du sien. Et de surcroît sans vous prévenir à aucun moment que la Liste Rouge
n’exclut pas de facto de sa base de prospects. Ni sur votre contrat, ni sur son site, l’opérateur historique ne prend la peine d’indiquer ce ‘ petit détail ‘. Et encore moins d’expliquer
comment on peut éviter ce démarchage intempestif.L’avenir pourrait néanmoins modifier quelque peu les règles de la prospection client. Ainsi selon Brigitte Misse, avocate au cabinet Bensoussan, l’application de la Loi sur l’économie numérique devrait renforcer le droit des personnes.
‘ Pour exploiter une base de données clients à des fins commerciales, une entreprise devra obtenir au préalable le consentement de son prospect. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. ‘En attendant, afin d’éviter tout harcèlement commercial de la part de France Télécom, tout abonné doit composer le 10 14 et demander à s’inscrire sur la Liste Stoprospect. Un simple appel et tout est réglé. Enfin…Deux jours après mes démarches, je recevais une nouvelle missive de France Télécom ! Devinez un peu le motif ? Pour me prévenir que mon inscription sur la Liste Stoprospect était effective à cette date. Bah… Il faut
croire qu’on ne peut pas changer comme ça ses habitudes… Tout opérateur historique que l’on soit.* Journaliste à 01net.

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Hélène Puel*