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L’ART contre la colocalisation séparée

Pour la deuxième fois en un mois, France Télécom est l’objet, au sujet du dégroupage, d’une mise en demeure de l’ART. L’Autorité n’admet pas, en effet, que l’opérateur public veuille systématiquement obliger ses concurrents à s’installer dans une salle dédiée.

À la date du 31 décembre 2000, France Télécom avait déjà déployé des DSLam sur 549 sites. Pour le 30 juin prochain, il prévoit d’en avoir dans 555 sites supplémentaires, puis dans 325 autres au 31 décembre prochain. À la fin de l’année, il devrait donc avoir installé des DSLam sur 1 429 sites.
À ce jour, quelque 800 sites, situés dans les trente plus grandes agglomérations, ont déjà fait l’objet, de la part des opérateurs alternatifs, d’une demande de dégroupage et de recherche de locaux. Selon les premiers pointages effectués par l’opérateur public, il apparaît cependant que la colocalisation physique (qui consiste à installer les opérateurs tiers dans une salle qui leur est réservée) s’avère impossible, en raison du manque de place, dans 130 des 482 sites des vingt plus grandes agglomérations. Pour ces 130 sites, ne resterait donc que la solution de la baraque de chantier, installée à l’extérieur des bâtiments de France Télécom, aux frais des opérateurs tiers bien sûr.
Mais cette approche du dégroupage par l’opérateur historique ne convient guère aux opérateurs alternatifs, membres de l’Afopt et de l’Aost. Dès la fin du mois de janvier dernier, ceux-ci avaient donc demandé à l’ART d’ouvrir une procédure de sanction à son encontre.
La colocalisation physique peut, certes, parfois présenter des avantages, comme le reconnaît le groupe de travail de l’ART présidé par Alain Bravo. Mais elle ne saurait en aucun cas être présentée systématiquement comme la seule manière de procéder.
La colocalisation physique est en effet discriminante par essence. En obligeant les opérateurs tiers à prendre à leur charge les frais d’aménagement d’une salle qui leur est réservée, elle leur impose des dépenses, que l’opérateur historique n’a pas à supporter pour ses propres services DSL, alors que les réglementations en vigueur, nationale et communautaire, exigent de lui, au contraire, qu’il fournisse à ses concurrents des conditions d’accès équivalentes, tant en termes de coûts que de délais, à celles qu’il s’accorde à lui-même ou aux entreprises qui lui sont associées.

Double discrimination

Pour ses propres DSLam, en effet, France Télécom n’a jamais besoin de construire de salles spécifiques, ni de lancer de travaux particuliers. Il utilise autant que possible la place disponible dans les salles de transmission abritant déjà ses équipements. Il lui suffit donc de mettre en place des travées, l’adduction d’énergie, le branchement de la transmission et, éventuellement, la climatisation.
À Paris, par contre, les opérateurs alternatifs seraient tenus de prévoir une dépense de 1,2 million de francs en moyenne pour l’aménagement d’une salle dédiée par site. Ils se partageraient évidemment cette dépense, mais comme ils ne sont que six candidats pour le moment dans la capitale, la dépense reste importante.
Mais la discrimination n’est pas seulement financière. Elle joue également sur les délais. France Télécom n’est jamais retardé dans la mise en ?”uvre de ses installations DSL, alors que ses concurrents doivent préalablement s’entendre sur l’aménagement d’une salle technique.
Une solution plus équitable serait que France Télécom accepte, aussi souvent que possible, de partager ses propres salles avec ses concurrents. Mais il s’y est farouchement opposé jusqu’ici, ne souhaitant pas que les opérateurs tiers puissent avoir accès à ses locaux 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Une telle éventualité, insiste l’opérateur public, n’est pas compatible avec les contraintes de sécurité de ses propres équipements. L’ART ne partage cette appréciation, le risque lui paraissant limité, puisque l’accès aux salles techniques est systématiquement contrôlé par badges, donc réservé aux seules personnes habilitées. De plus, France Télécom pourrait réduire la fréquence de ces accès en proposant aux opérateurs tiers de faire la maintenance de premier niveau à leur place, comme il le fait déjà dans le cadre de l’interconnexion.
En conclusion, il est clair qu’en matière d’espaces de colocalisation, comme déjà pour l’offre de référence, France Télécom ne respecte pas les obligations de non-discrimination que lui impose le décret du 12 septembre 2000. Aussi, par sa décision du 26 avril dernier, l’ART a-t-elle mis l’opérateur public en demeure de s’y conformer.
Elle somme France Télécom de répondre aux besoins des opérateurs tiers ” de la même façon qu’elle le fait pour ses propres besoins “. Aux termes de cette décision, France Télécom est même tenu de prendre à sa charge la part qui lui revient des frais d’aménagement des nouvelles salles, même s’il n’y installe pas d’équipements, afin de compenser l’avantage qu’il tire d’une colocalisation séparée.
L’opérateur public avait jusqu’au 10 mai pour porter à la connaissance de l’ART les mesures qu’il comptait prendre pour se conformer à ces dispositions (www.art-telecom.fr).

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La rédaction