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La récession des profits est derrière nous

Dans un contexte de surendettement, de sur-investissement et d’inflation des rémunérations, la profitabilité des entreprises a été divisée par deux entre 1997 et 2001.

La baisse des indices boursiers depuis l’explosion de la bulle technologique, en mars 2000 pour les valeurs de technologie, ou depuis fin 2000 pour la majorité des secteurs, est imputable davantage au recul des profits des entreprises qu’à la récession économique. Cette dernière a d’ailleurs été la plus faible des six crises économiques majeures enregistrées depuis 1960. En effet, le recul du PIB américain au cours des trois premiers trimestres 2001 n’a pas empêché une croissance positive sur l’ensemble de l’année (+0,3 %). Pour 2002, tant la Fed que l’administration Bush prévoient une progression de 3,5 %, soit une croissance légèrement supérieure à la tendance de long terme.

Forte dégradation des marges

La vigueur de la croissance américaine ces dernières années, dans un cycle exceptionnellement long (1991-2000), puis le fort soutien de la demande finale ces derniers mois, malgré une conjoncture dégradée, ont été accompagnés, paradoxalement, d’une forte dégradation des marges et des profits des entreprises, en particulier depuis 1997. Pourtant, la Fed nous assénait régulièrement les bienfaits d’une productivité croissante, grâce aux investissements dans les nouvelles technologies, permettant d’assurer une croissance durable et sans soubresaut. En réalité, la productivité (qui n’est que la production horaire) a progressé beaucoup moins vite que le coût unitaire du travail, que les coûts de stockage et d’investissement et que les charges liées à l’endettement croissant. Dans un contexte de surendettement et de surinvestissement, voire d’inflation des rémunérations, la profitabilité des entreprises a été divisée par deux entre 1997 et 2001.

Des restructurations efficaces

Les profits ont été d’autant plus affectés que les attentats du 11 septembre ont poussé les entreprises à adopter des politiques massives de dumping, voire de prêts à taux zéro pour les constructeurs automobiles, afin de maintenir leurs ventes. Une politique de l’offre qui a pesé fortement sur les marges. Par ailleurs, des mesures drastiques ont été prises : “write off” massifs (annulations de créances, amortissements en bloc de certaines charges non récurrentes, imputation des charges liées aux stock-options et aux fonds de pension dans les comptes de la société. Mais, aujourd’hui, les politiques de restructuration entamées fin 2000 portent leurs fruits : les entreprises ont largement réduit leurs effectifs (le taux de chômage est passé de 3,9 % en octobre 2000 à 5,9 % actuellement). Elles ont réduit drastiquement leurs stocks et leurs investissements, même si les statistiques du PIB du deuxième trimestre montrent un restockage positif symbolique de 1 milliard de dollars (1,01 milliard d’euros) et des investissements dans le software en hausse pour la première fois en cinq trimestres. La politique monétaire particulièrement souple de la Fed, et son retour à un biais “weakness” (repli) le 13 août démontrent que la liquidité va rester élevée. La demande finale est restée soutenue grâce à l’automobile et à l’immobilier. Enfin, la chute des marchés ramène les charges liées aux stock-options à pratiquement zéro. Les statistiques de la productivité du deuxième trimestre montrent qu’elle a progressé de 4,7 % en un an à la fin juin, tandis que le coût unitaire du travail recule de 2,2 %. Les profits des valeurs de l’indice S & P 500 sont passés de 57 dollars par action en 2000 à 45 dollars en 2001. Pour 2002, le consensus attend 51 dollars en année pleine, et 57 dollars sur 12 mois glissants, soit le niveau record de 2000. La profitabilité des entreprises s’améliore enfin, mais les marchés, inquiets d’un “double” ou “triple dip” (double ou triple plongeon) de léconomie, mesurent mal le timing.* Chef économiste, Global Equities

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Jean-François Virolle*