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La neutralité du net ne tient plus qu’à un fil aux Etats-Unis

Le gendarme américain des télécoms a ouvert la voie à la remise en cause de ce principe garantissant un traitement équitable. Une menace pour le web.

C’est désormais officiel: les jours de la neutralité du net sont bel et bien comptés aux Etats-Unis. Jeudi, la Federal Communication Commission (FCC) a adopté une première version d’un nouveau cadre réglementaire visant à encadrer Internet. Ouvert aux commentaires publics, ce projet sera certainement amendé au cours des prochains mois. Le gendarme américain des télécoms espère le finaliser d’ici à la fin de l’année.

Si la version définitive de ce texte a été quelque peu édulcorée – une première ébauche avait suscité de vives polémiques -, elle conserve sa principale révolution. A terme, les fournisseurs d’accès à Internet auront le droit de facturer un «accès privilégié» aux sites web. Autrement dit, ceux-ci devront payer pour bénéficier d’une vitesse de connexion optimale. La FCC prévoit quelques garde-fous, comme l’instauration d’une vitesse de connexion plancher et d’un tarif «commercialement raisonnable». Mais c’est bien un Internet à deux vitesses qui verra le jour.

Face à l’augmentation continue du trafic, « quelqu’un doit payer », justifie Jim Cicconi, vice-président chez AT&T. Pour les opérateurs américains, ce surcoût doit être supporté par les gros consommateurs de bande de passante. Et notamment le plus important d’entre eux, le site de streaming Netflix, principal opposant à cette réforme. « La position de Netflix consiste à dire que tout le monde doit payer sauf Netflix », poursuit le dirigeant.

Princpales victimes : les start-up

Netflix YouTube et les autres grands fournisseurs de contenus, devront donc passer à la caisse pour assurer un débit suffisant sur leurs services. S’ils ne le font pas, ils risquent de perdre leurs utilisateurs. La facture se chiffrera en centaines de millions, voire même en milliards, de dollars par an.

Mais les principales victimes seront les start-up, qui ne disposent pas de ressources financières pour régler ces péages. « Le risque, c’est de limiter l’innovation en accordant un avantage compétitif aux acteurs déjà en place » avance Marvin Ammori du think tank New America Fondation. Imaginez si MySpace avait pu payer pour limiter le développement de Facebook ».

« Si les grandes sociétés peuvent payer pour une meilleure vitesse de connexion ou un temps de latence plus faible, Internet ne bénéficiera plus de règles du jeu équitables » ajoute, dans un courrier adressé à la FCC un groupe d’investisseurs de la Silicon Valley. « Les start-up dont les services dépendent de la vitesse (jeux, vidéos, systèmes de paiement) ne pourront certainement pas surmonter ce déficit, peu importe leur degré d’innovation ».

Pour ne rien arranger à cette situation, la très faible concurrence entre les FAI ne les incitera certainement pas à adopter des règles de bonne conduite. Au pays de capitalisme triomphant, la quasi-totalité de la population ne dispose en effet que d’une à deux options au moment de choisir un abonnement web. « Il sera donc plus simple de se rendre sur un autre site plutôt que de changer d’opérateur », estime Marvin Ammori.

Pas étonnant alors que des internautes américains crient déjà à la mort du Web tel que nous le connaissons aujourd’hui !

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Jérôme Marin (correspondant à San Francisco)