Passer au contenu

Janelly Fourtou (PPE) : ‘ Il faut exclure de la directive la brevetabilité des méthodes commerciales et les algorithmes ‘

Membre du Parti populaire européen, Madame Janelly Fourtou* explique pourquoi le projet de directive doit établir un régime de protection de l’innovation, tout en ne versant pas dans les dérives qu’ont connues les
États-Unis dans ce domaine.

Les brevets logiciels constituent-ils un danger pour l’industrie informatique européenne ou un atout majeur de son développement économique ?Nous avons en Europe une industrie informatique innovante et compétitive. C’est à ce titre que les brevets sur les inventions mises en ?”uvre par ordinateur sont nécessaires. Ils doivent protéger les innovations de ce
secteur et lui permettre de s’accroître. Les PME du secteur sont aussi performantes que les grands producteurs de logiciels. Cependant, ces mêmes PME n’ont que peu de moyens juridiques de protéger leurs innovations. Une directive
européenne est dès lors la bienvenue si elle établit un régime de protection de l’innovation pour tous et élimine les dérives qu’ont connues les États-Unis dans ce domaine.Le projet de directive proposé par la Commission de Bruxelles a fait l’objet d’un rapport favorable de la part de Mme Arlene Mc Carthy, députée travailliste et membre du groupe du PSE (Parti socialiste européen). Le Parlement
européen devrait se prononcer sur ce texte, à partir du 22 septembre prochain. Quelle sera la position du PPE (Parti populaire européen), dont vous êtes membre ?
La commission des Affaires juridiques du Parlement européen a adopté un rapport courageux qui doit mettre fin aux dérives concernant la délivrance de certains brevets par l’Office européen des brevets, qui a déjà entériné
quelques 30 000 brevets sur les inventions mises en oeuvre par ordinateur. Nous avons essayé de définir précisément ce qui peut être breveté ou non, en excluant explicitement la brevetabilité des méthodes commerciales et des algorithmes.
Il faut éviter que des brevets triviaux soient octroyés, et c’est précisément l’objectif de la proposition de directive, objectif que je partage pleinement. Pour cette raison, les critères, et tout spécialement celui de contribution
technique, sont définis de manière stricte.Si la directive sur la brevetabilité des logiciels était approuvée en l’état par le Parlement européen, quel en serait l’impact sur les PME, ainsi que sur des entreprises de plus grande taille ?Il n’est pas à craindre que cette directive mette à mal l’innovation des PME. La proposition du Parlement prévoit explicitement une procédure de suivi et d’évaluation de ses effets, notamment sur les PME. Cela
constitue une garantie supplémentaire contre les abus. Cela devrait permettre à certaines PME européennes, ou à de grandes industries traditionnelles comme l’automobile ou l’aéronautique ?” notamment françaises ?”,
de protéger leurs avancées technologiques décisives sur le marché et d’investir ainsi davantage dans la recherche et le développement, dont nous bénéficions tous. On peut également souligner que le brevet est considéré comme un atout dans la
comptabilité des entreprises et permet d’attirer des investissements. Ainsi le brevet permet-il à des PME innovantes de renforcer leur position économique, mais également de concurrencer des entreprises bien plus importantes.Certains opposants aux brevets logiciels affirment qu’une telle réforme signerait l’arrêt de mort de l’industrie du logiciel libre en Europe. Or, aux Etats-Unis, pays où les brevets logiciels sont une réalité juridique, le logiciel
semble avoir survécu. En quoi la situation européenne différerait-elle de l’expérience américaine ?
La directive limite justement la brevetabilité et ne la réserve qu’aux seules véritables inventions, au contraire de ce qui se fait aux Etats-Unis. Elle ne s’oppose en rien au logiciel libre, qui est une alternative intéressante et
qui d’ailleurs se développe très bien et continuera à se développer.Le brevet est un moyen efficace de protection de la propriété intellectuelle. Aux Etats-Unis, Microsoft a récemment été condamné à verser 521 millions de dollars, pour exploitation illégale de brevet sur son navigateur Internet
Explorer : que vous inspire cet exemple ?
C’est la preuve que, si le brevet permet de valoriser et de protéger l’innovation, il permet aussi, à l’opposé des Etats-Unis et de ce qui est fait jusqu’à présent par l’Office des brevets européens, d’établir des règles valables pour
tous, du plus petit au plus grand. La protection octroyée par le brevet est la récompense du travail, des compétences et de l’argent investi par l’inventeur. En contrepartie de cette protection, l’accès libre à
l’information technique et au savoir-faire est garanti. Cette transparence permet de créer une stimulation puissante de l’innovation, tout en protégeant le titulaire du brevet.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Propos recueillis par courrier électronique par Philippe Crouzillacq