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Internet au service des détectives

Marie-Françoise et Alain sont détectives privés. Pour faire avancer leurs enquêtes, ils utilisent un outil très efficace : Internet.

Mieux vaut éviter de passer à la télé si l’on traîne des casseroles… Car sur Internet, c’est probable, un forum de discussion en fera ses choux gras. Certains escrocs l’ont appris à leurs dépens. L’un d’entre eux, trahi par des internautes trop bavards, s’est fait piéger par Marie-Françoise Hollinger et Alain Bernier. Pour eux, c’est presque la routine : ils sont détectives privés, ou plutôt “agents de renseignements privés”. Leurs clients les paient pour relever des informations et établir des recoupements.Depuis 1989, ils dirigent ensemble à Mont-de-Marsan (Landes) et Bordeaux l’agence Alma-Détectives. Leurs clients sont des avocats, des entreprises, des cabinets de recouvrement de créances ou de simples particuliers à la recherche de personnes disparues ou d’escrocs en fuite.Pour Marie-Françoise et Alain, Internet est devenu un passage obligé, au même titre que les traditionnelles filatures et enquêtes de terrain. “Aujourd’hui, le détective est aussi un internaute qui connaît les moteurs de recherche, les annuaires d’adresses e-mail et sait naviguer à la recherche d’informations disponibles “, explique Alain, grand consommateur de bases de données et de lettres d’informations. “Les gens ne se rendent pas compte que sur le Net, lorsqu’ils écrivent quelque chose ou donnent leur avis dans un forum, tout est archivé, ajoute Marie-Françoise, ils oublient de protéger leur vie privée.”Comme des millions d’internautes, nos détectives utilisent les moteurs de recherche. Google, par exemple. Trois milliards de pages Web y sont recensées, parmi lesquelles des documents World ou Excel et 400 millions d’images. Sans compter les 700 millions de messages postés dans les groupes de discussion. Envoyer une contribution, c’est comme inscrire un texte dans le marbre : un curieux peut le retrouver quelques années plus tard en utilisant le bon mot-clé.Alain, qui est aussi un habitué des sites perso, s’étonne encore de ce qu’il peut y trouver : “C’est une mine d’informations. C’est de la vie privée qui est exposée à tous, des photos, des noms, prénoms, dates et lieux de naissance, des informations stratégiques qui peuvent nous être utiles pour faire des recoupements.”

Chasse aux escrocs sur le Web

Dans le cas de cette affaire de bateau prétendument abîmé lors de la tempête de décembre 1999, il a suffi d’une photo et d’une date, pêchées sur un site perso, pour démontrer que les dommages n’avaient pas de rapport avec la catastrophe : “Nous avons apporté des éléments qui peuvent confirmer ou pas que c’est bien à tel endroit qu’ont eu lieu les avaries. Ce n’est pas vraiment une preuve, mais un élément qui contribue à établir un faisceau de présomption.”Parfois, les sites des entreprises apportent aussi leur lot d’indices. Des articles de presse récoltés sur un site suffirent par exemple à démontrer qu’un homme déclaré insolvable cumulait en réalité fonctions et rémunérations au sein d’une florissante entreprise. Et… qu’il était donc largement en mesure de payer à son ex-femme la pension alimentaire qu’elle lui réclamait.Lorsqu’ils font mouche, Marie-Françoise et Alain ne dissimulent pas leur plaisir : “La recherche d’informations sur une personne, on peut la faire ici, sans bouger de chez nous.” Et ils ne ménagent pas leur connexion ADSL. Au gré de leurs enquêtes, ils surfent sur des sites d’informations juridiques et législatives ( servicepublic.fr, Legifrance, Euridile), économiques, stratégiques et politiques ( intelligenceonline.fr), s’intéressent aussi à la gestion de noms de domaine ( whois.net) sans oublier de créer des contacts avec leurs homologues étrangers. Quotidiennement, ils jettent un coup d’?”il au Journal officiel, fréquentent les groupes de discussion américains, s’informent, posent des questions.Dans le cadre de recherches généalogiques, ils interrogent aussi les bases de données des Mormons de Salt Lake City, où l’état civil de millions d’individus, y compris français, est disponible en ligne.“Les Américains ont des bases de données de plaques minéralogiques, de numéro de Sécurité sociale, etc. Chacun est libre de créer les siennes. En France, la vie privée est mieux protégée. D’ailleurs, sur certains forums, on rencontre parfois des avocats et détectives américains à la recherche d’informations sur les législations européennes.”

Les entreprises jouent les espions

Car Internet est aussi un outil d’échange et de collaboration pour les professionnels. Alain reçoit ainsi des mails en provenance d’autres pays, et pas seulement de confrères : le site de l’agence, traduit et habilement référencé, attire souvent une clientèle étrangère.Autre clientèle en augmentation, les entreprises, de plus en plus sensibilisées au piratage informatique et à la fuite d’informations. Certaines ne font pas mystère de s’intéresser aux mails de leurs employés et aux sites qu’ils visitent. Un terrain glissant, car ce type de contrôle s’assimile à une violation de vie privée. Mais Alain rappelle que “rien ne peut empêcher un chef d’entreprise d’étudier les fichiers log de ses serveurs pour vérifier les éventuels problèmes de sécurité “. Tout est ensuite question d’utilisation des données recueillies. Mais là, ce n’est plus le domaine des détectives, c’est celui des avocats…www.alma-detectives.com

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Hervé Cabibbo