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Du Pentagone à ” la rumeur du net “

Cette semaine, un plaidoyer en faveur de la source d’information internet.

La polémique déclenchée par mon livre L’Effroyable imposture a suscité plus d’anathèmes que d’arguments. Dans la presse parisienne, certains de mes détracteurs ont crié à la “rumeur du net “. Selon eux, mon travail ne serait pas sérieux et ne vaudrait pas que l’on y réponde, car il aurait été effectué sans enquête sur le terrain, uniquement à partir “d’informations glanées sur le net “. Leur jugement n’a pas été repris par la presse étrangère.Leur accusation révèle un fait et un préjugé : le livre comprend plus de trois cents notes de bas de page renvoyant à des adresses URL, et certains de mes confrères croient ?”ou feignent de croire ?” que la crédibilité d’une information dépend du support utilisé pour la véhiculer. Or, mon livre est avant tout une longue étude de texte de documents officiels, et de déclarations de dirigeants états-uniens. Aucun de mes confrères ne conteste l’authenticité de ce matériau de base. Pour en faciliter la vérification par le lecteur, j’ai choisi de ne pas me contenter d’indiquer les références des documents cités à la bibliothèque du Congrès, mais de préciser les adresses URL où tout un chacun peut les consulter. Il n’y a pas plus de “rumeur du net” dans ce livre que de “rumeur de la bibliothèque du Congrès “.

Un outil inconnu et mystérieux

Cette polémique sert de révélateur à une réalité non-dite : au lieu de publier les bonnes feuilles de mon livre dans un grand journal, sous le contrôle d’une rédaction parisienne, j’ai violé les usages et j’ai choisi de m’adresser directement au grand public par le biais d’internet. J’ai interpellé les internautes en leur montrant les incohérences des photographies du département de la Défense au regard de la version officielle de l’attentat survenu le 11 septembre 2001 au Pentagone. Plus de deux millions de personnes ont ainsi visité Reseauvoltaire.net et Asile.org avant la parution de mon livre. L’accusation “rumeur du net” a connu d’autant plus de succès qu’internet reste un outil inconnu et mystérieux pour une partie de la population comme de mes confrères. Pour les uns, il s’agirait d’un espace de non-droit où prolifèrent nazis et pédophiles ; pour les autres il s’agit d’un dangereux concurrent de la presse écrite. Et il n’est pas impossible que l’image ténébreuse qu’en ont les non-internautes ait été forgée par une presse affolée de cette concurrence. En effet, le phénomène est récurrent dans l’histoire de l’expression. Au XXe siècle, la presse écrite caricaturait la télévision qu’elle présentait comme un spectacle décervelant. Avec le temps, il a bien fallu admettre que, comme avec l’écrit, on pouvait y produire le meilleur et le pire. L’écrit a perdu sa place dominante et s’est spécialisé dans un type de traitement de l’information différent de celui de l’audiovisuel. À n’en pas douter, les médias écrits devront, au cours du XXe siècle, s’adapter à internet. D’ores et déjà, ce nouvel outil d’expression révolutionne le journalisme. Jusqu’à présent les éditorialistes disposaient d’un monopole. Certes, les lecteurs pouvaient toujours leur envoyer des courriers de protestation, mais ceux-ci étaient rarement publiés. Désormais, chacun peut réagir individuellement, que ce soit sur des forums ou en créant des sites alternatifs, de sorte que les éditorialistes doivent aujourd’hui rendre des comptes à leurs lecteurs. En outre, les journalistes étaient jadis les seuls à avoir accès aux sources d’information : dépêches d’agence, communiqués officiels, etc. Aujourd’hui, chaque internaute peut consulter ces “sources primaires”, et donc réagir non seulement aux conclusions de la presse, mais à ses méthodes de travail et à ses préjugés. C’est parfaitement conscient de cet enjeu que j’ai choisi de publier un complément d’enquête sur l’affaire du Pentagone à la fois sous la forme d’un livre vendu en librairie et, simultanément, sous la forme de pages HTML et de documents PDF accessibles gratuitement sur le net à l’adresse Effroyable-imposture.net. Une provocation qui ne manquera pas de relancer la polémique, et de mettre en évidence la mauvaise foi de quelques protagonistes archaïques.* Président du Réseau Voltaire et auteur de ” LEffroyable imposture”

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Thierry Meyssan*