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Bruxelles redistribue les cartes judiciaires

Grâce au texte du Règlement européen, entré en vigueur le 1er mars, un internaute français peut désormais porter plainte auprès de tribunaux de l’Hexagone pour un litige avec un site américain d’e-commerce.

”  L’action intentée par un consommateur contre l’autre partie au contrat peut être portée soit devant les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit devant le tribunal du lieu où le consommateur est domicilié.” L’article 16 du Règlement européen adopté par les Quinze, le 22 décembre 2000, constitue une révolution.

Simplification des procédures

En effet, ce texte, qui est applicable en France depuis le 1er mars 2002, rompt avec la règle qui attribue la compétence au tribunal du domicile du défendeur.Par exemple, un consommateur français qui souhaitait jusqu’à présent poursuivre un commerçant américain devait saisir une juridiction présente sur le territoire des États-Unis.Ce qui pouvait évidemment être dissuasif : problème de langue, coût de la procédure, recours à un avocat local, etc. Autant d’éléments qui incitaient nombre de consommateurs à renoncer à faire valoir leurs droits.Aujourd’hui, le client lyonnais d’un site grec pourra donc demander réparation de son éventuel préjudice au tribunal d’instance de la capitale des Gaules.Sans avoir besoin de saisir les instances grecques. D’où l’importance de ce règlement communautaire, qui est désormais applicable partout en Europe, sauf au Danemark, puisque ce pays ne l’a finalement pas adopté.Ce texte va obliger les entreprises de vente à distance à réviser leurs conditions générales, afin de respecter le nouveau régime.” La Convention de Bruxelles de 1968 prévoyait ce même dispositif mais à deux conditions, explique Me Marion Barbier, spécialiste des NTIC au sein du cabinet d’avocats Bird & Bird. Le commerçant devait avoir fait de la publicité dans le pays du consommateur et ses offres devaient être accessibles à partir de ce même pays. “ Malgré tout, on recense très peu de contentieux qui invoquent l’application de cette Convention de Bruxelles.Ce qui ne signifie évidemment pas que tous les consommateurs soient toujours satisfaits.

Pour une résolution alternative

” D’une part, le cybercommerce est encore réduit, note Me Barbier. Et dans la plupart des cas, les entreprises ou les banques sont conciliantes pour régler les différends qui pourraient survenir avec les cyberconsommateurs. “
En remboursant les mécontents ou en remplaçant l’objet défectueux sans hésiter. Reste à savoir si elles seront toujours aussi compréhensives quand les volumes échangés prendront de l’importance.D’ailleurs, dès l’été dernier, la Chambre de commerce internationale (CCI, iccwbo.org) s’indignait que l’on prévoie cet aménagement en faveur des consommateurs. Et cet organisme de plaider plutôt pour une résolution ” alternative” des conflits.En laissant d’abord le soin aux services consommateurs des sociétés de traiter les contentieux. La CCI prévoit également une médiation en ligne (afin de réduire les coûts et d’effacer les distances entre les parties), si les désaccords devaient persister.Le recours aux tribunaux officiels étant réservés aux seuls cas ?” une infime minorité selon les dires des experts de la CCI ?” qui n’auraient pu trouver de solution lors des deux étapes précédentes.Une prise de position militante qui illustre surtout une volonté de ne pas voir brider le commerce à distance.Comme pour les rassurer par avance, les auteurs du Règlement ont prévu, dans son article 73, que la Commission présentera au Parlement européen, au Conseil des ministres ainsi qu’au Comité économique et social européen un rapport relatif à son application.Et cela au plus tard le 1er mars 2007. Avec à la clé des propositions pour éventuellement adapter ledit texte.

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Nicolas Arpagian