En tant que concepteur du langage Eiffel, vous avez eu jusqu’ici une attitude plutôt indépendante par rapport aux ” standards ” de l’industrie, IBM, Microsoft et, aujourd’hui, Java. Qu’est-ce qui a déclenché ce rapprochement avec Microsoft et sa plate-forme . NET ? Pour développer . NET, Microsoft est venu chercher des partenaires dès avril 1999. Il s’agissait pour lui de crédibiliser cette plate-forme, d’en valider les idées de base et d’obtenir le soutien d’éditeurs indépendants. ISE fait partie du petit groupe de partenaires extérieurs choisis par Microsoft. D’ailleurs, lors de la présentation publique de . NET, seuls deux partenaires étaient présents : Fujitsu, pour Cobol, et nous-mêmes. Quoi que l’on pense de Microsoft, . NET représente une avancée technologique incontestable et il n’y a rien d’équivalent du côté de Linux.Que peut apporter une petite société comme ISE au géant Microsoft ? En tant qu’éditeur indépendant, nous n’avons pas d’?”illères Windows. En effet, Eiffel est une offre multi-plate-forme qui tourne sur Unix, Linux, VMS, Cray et Windows. La crédibilité que nous apportons à . NET est donc un avantage pour Microsoft. Il est vrai que nous ne sommes qu’une trentaine de personnes. Mais les développeurs qui travaillent avec nos produits disposent d’une technologie de pointe qui leur permet d’être très productifs. Nous travaillons étroitement avec Microsoft pour la formation : certains de leurs employés vont d’ailleurs être formés avec nos cours. D’autre part, nous avons un projet commun : participer au comité de l’Ecma (NDLR : European Computer Manufacturers Association) chargé de la normalisation de . NET. Ce comité comprend HP, IBM, Intel, ISE, Netscape, Fujitsu, ainsi que des consultants indépendants.Ce partenariat pourrait-il constituer une nouvelle chance pour Eiffel ? Eiffel a fait son bonhomme de chemin. S’il représente une petite part du marché, il est utilisé dans de grosses applications critiques, des projets de très grande ampleur. Il se développe régulièrement. Il a été choisi en 1992-1993 par d’importantes sociétés de banque- finance et apporte des solutions stables. Les obstacles qu’il a rencontrés sont plus de nature politique, car il n’a pas de soutien affiché des grands de l’industrie. Pourtant, d’autres langages objet plus répandus qu’Eiffel, comme Objective C, ont complètement disparu du jour au lendemain. La reconnaissance de la part de Microsoft est donc importanteQue va apporter . NET à l’industrie du logiciel ? Avec l’approche . NET, tous les langages sont remis au même niveau. Ils sont compilés par VisualStudio. Net. Dès lors, il est possible de mélanger différents langages dans une même application. Et donc de choisir le langage en fonction de critères techniques, et non plus en suivant une décision ” religieuse “, parce que tel ou tel langage est considéré comme sûr. . NET a aujourd’hui atteint un point de non-retour. Il y a désormais deux technologies importantes à prendre en compte : . NET et J2EE. Ce sont deux mondes à part, même si l’interfaçage entre les deux est sans doute envisageable. Java a beaucoup d’avantages : il est plus structuré que C++ et il est portable, ce qui est très bénéfique. Mais sa position hégémonique a laissé à l’écart certains développement logiciels. Le fait qu’il y ait un concurrent important est inté- ressant. Java/Corba et . NET sont deux solutions assez complètes et bien pensées de part et d’autre. Cela va ajouter du piment à la discussionComment voyez-vous évoluer la technologie dans les années à venir ? Je distingue essentiellement deux tendances : l’omniprésence de l’informatique et le retour en force du génie logiciel. Concernant la première, le progrès viendra de l’informatique portable, mobile, sans fil, avec la généralisation à tous les dispositifs (téléphones, assistants personnels, etc. ), appliquée à toutes les activités humaines. Des solutions couvriront l’ensemble du spectre avec une compatibilité complète. C’est un aspect crucial. Cette omniprésence de l’informatique aura pour conséquence une diminution de la tolérance du public vis-à-vis des bugs, erreurs et atteintes à la sécurité. D’où la deuxième tendance : la renaissance du génie logiciel, qui permet de développer des applications de façon sérieuse et sûre. . NET est bien engagé sur le premier axe. Microsoft fait un effort systématique pour se positionner partout, en particulier dans le monde de l’entreprise.
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