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TNT, une galère pour ne pas louper le coche

” Mais qu’iraient-ils donc faire dans cette galère ?.” La question était tentante, ces dernières semaines, à suivre les états d’âme de la profession à propos…

Mais qu’iraient-ils donc faire dans cette galère ?.” La question était tentante, ces dernières semaines, à suivre les états d’âme de la profession à propos de la télévision numérique terrestre (TNT). Côté ” politiques “, d’abord, le calendrier donne lieu entre gouvernement et Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) à un mélange de bras de fer et de poker menteur. “On ne sera jamais prêts pour Noël 2002 “, entend-on des deux côtés… Sans qu’aucun n’accepte d’annoncer et/ou d’assumer un éventuel décalage. Les échéances majeures étant concentrées début 2002, on perçoit mal l’enjeu politique. Le plus grand risque, au final, serait peut-être que la date de Noël 2002 soit tenue, mais au prix d’un dispositif bricolé dont la TNT et ses opérateurs paieraient plus tard le prix.Le scepticisme ostensible des acteurs en place n’est pas très étonnant : pour TF1 et M6, une offre élargie est mécaniquement synonyme d’érosion de leur audience et, finalement, de leur part de marché publicitaire. Mais il ne paraît pas acquis non plus que Canal Plus trouve son intérêt au passage au numérique : une incitation à ” migrer ” pourrait bien rompre l’automatisme des paiements par virement chez ses 2,5 millions d'” abonnés analogiques “, et les amener à comparer le prix de leur abonnement avec celui des différentes offres multichaînes. Mais, plus surprenant, l’enthousiasme est rare également chez les bénéficiaires attendus de la TNT. On pensait que les fabricants de produits bruns se réjouiraient de son effet d’incitation au renouvellement du parc. Or, il semble que la demande liée à l’explosion du format DVD (qui tire le meilleur parti des écrans 16/9e) suffise à animer le marché. De plus, les téléviseurs numériques sont considérés comme compliqués à argumenter et comme techniquement sensibles en raison de l’inadaptation d’une partie du parc d’antennes.

Doutes industriels

Enfin, les industriels affirment avoir du mal à sentir le marché, parce qu’un équilibre 50/50 entre programmes gratuits et payants ne suffit pas à trancher entre marché de décodeurs loués par les distributeurs ou marché de la vente au détail de boîtiers ou téléviseurs intégrés.Et les nouveaux entrants, tels Lagardère, Pathé ou AB, auxquels la TNT devait permettre de passer du championnat thématique à la première division hertzienne ? Les groupes font leurs comptes sur fond de retour à la morosité économique, et certains craignent de perdre la proie ?” les redevances payées par les opérateurs ?” pour l’ombre ?” les espoirs de recettes publicitaires. Résultat : les projets ambitieux de chaînes gratuites ne sont plus légion. Faut-il en déduire que la boîte à lettres du CSA restera vide de projets fin novembre, à l’heure de la remise des copies ?

Rendez-vous historique

Ce serait oublier la dimension historique du rendez-vous ou (pour emprunter à la métaphore ferroviaire employée par Dominique Baudis, le président du CSA) qu’on peut comparer la TNT à un train dont il est difficile de prévoir l’allure, ou de garantir qu’il n’aura pas d’incident de parcours. Mais dont on sait aussi qu’il représentera, d’ici à une douzaine d’années, le standard pour tous ceux qui ne seront abonnés ni au satellite, ni au câble ?” 40 % des foyers au Royaume-Uni et 60 % en France, selon différentes études. Dont on sait aussi qu’il n’y aura pas d’autre ” wagon ” jusqu’à la libération des fréquences aujourd’hui utilisées pour la diffusion analogique. Et dont les occupants sont à peu près assurés de disposer gratuitement de leurs fréquences pendant au moins 20 ans ?” à titre de comparaison, M6 a été déficitaire pendant six ans avant de devenir la cash machine que lon sait. Il y a là, peut-être, motif sérieux à accepter un tour de galère pour ne pas louper le coche !
* consultant, NPA (Nouveaux paysages audiovisuels)

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Philippe Bailly*