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Les grandes entreprises françaises se dopent aux spin-off

Contraintes de gagner en réactivité pour contrer les start-up, les entreprises créent leur propre filiales Internet. Elles limitent ainsi les risques économiques, tout en se créant un laboratoire de tests en management qui pourrait leur servir en interne… plus tard.

Tout le monde connaît Houra.fr, WEBroker.com ou OKassurance.com. En revanche, on sait moins que derrière ces start-up se cachent de grands entreprises comme Casino, le CCF et les AGF ! Baptisées spin-off, les filiales Internet des grands comptes ne sont en fait que les premières d’une longue série initialisée aux Etats-Unis par des pionniers comme Charles Schawb, City corp. ou Visa.Créées pour limiter les risques financiers, elles permettent aussi à leur maison mère d’acquérir des compétences Internet tout en évitant les problèmes de management interne que pourrait susciter l’intégration d’une population de jeunes techniciens.La création d’une spin-off est en effet souvent dictée par la volonté de limiter les risques d’une activité réputée très dangereuse. La structure fait donc largement appel aux capitaux extérieurs afin d’obtenir, comme pour les start-up, un financement rapide. Voire plus rapidement que pour une jeune pousse, grâce à l’appui des maisons mères. Et si faillite il y a, la maison n’écope des dettes qu’à hauteur de sa participation.Si la spin-off porte rarement le nom de sa maison, ce n’est pas un hasard non plus : l’apparence pure player constitue un atout majeur dans la nouvelle économie. Et en cas d’échec, seule la cyber-marque paiera les pots cassés.

Limiter les risques de tension

Au problème purement économique, il faut encore ajouter des raisons liées essentiellement au management des troupes. L’inertie et la lourdeur inhérentes à toute organisation de grande taille ne joue pas en sa faveur, face à l’arrivée des start-up dans leur domaine.La création d’une start-up ” maison “, faisant cohabiter rigueur de la maison mère et créativité des jeunes pousses, leur permet donc de jouer à armes égales. Voire de miser sur une culture d’entreprise qui fait aujourd’hui défaut aux start-up : les cadres dirigeants, généralement issus de la maison mère, maîtrisent le métier, tandis que le reste de l’équipe, constituée pour l’essentiel de jeunes talents experts en technologies Internet, apporte le sang neuf.Point de vue confirmé par Durk Jager, président de Procter & Gamble, l’un des leaders mondiaux de la cosmétique : “Nous avons créé reflect.com sous forme de spin-off, pour associer notre connaissance des consommatrices et notre maîtrise de l’innovation avec l’ingéniosité et la vitesse de la Silicon Valley.”Certes, mais pourquoi ne pas l’avoir fait en interne ? Pour limiter les risques de tension entre les anciens et des jeunes, à qui on ne fixe pas les mêmes objectifs et qu’on ne rémunère pas sur les mêmes bases. Comme la start-up, la spin-off se trouve confrontée à la pénurie de compétences. Elle applique donc des méthodes de recrutement identiques et recherche les mêmes profils : des jeunes experts qui travaillent quinze heures par jour par passion et pour les stock-options ! Autant dire des ” fous furieux ” au yeux des anciens. L’intégration de ces experts dans une entreprise où syndicats et comités veillent au grain prendrait vite des proportions incontrôlables.Reste que les spin-off servent aussi de laboratoire à leur maison mère. Plus exacerbée, la concurrence les pousse à revoir leur propre organisation et leurs méthodes de travail.Le principe de fonctionnement des start-up, reposant non plus sur la hiérarchie mais sur les compétences de chacun avec un système de rémunération en conséquence, pourrait bien un jour bouleverser les structures des grands comptes.Une fois que le cobbaye aura passé le test.
Au final, plus que son attrait économique ou marketing, la spin-off pourrait même replacer à sa juste valeur l’actif le plus important des entreprises : l’homme.Correctif : Une erreur de frappe nous a fait attribuer Houra.fr au groupe Casino. Il s’agit bien sûr du groupe Cora. (le 20/10/2000)

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Marie Varandat