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L’ère des transarchitectes

Pour le cabinet XZ Home, Pierre Bohrer crée l’urbanisme du futur en lui appliquant les règles du cyberespace.

Demain, la musique deviendra forme. Pierre Bohrer, cofondateur de XZ Home, un cabinet de “transarchitectes” installé à Strasbourg, le jure.En 1999, répondant à un concours lancé par Elf Atochem (aujourd’hui devenue Atofina, la branche chimie de TotalFinaElf), il imagine, avec ses associés Xavier Génot et Philippe Schaetzel, une discothèque techno, dans laquelle les sons génèreraient la structure même du bâtiment. Fiction ? “En incluant des morceaux de musique dans un logiciel de création 3D, on permet aux ondes d’élaborer des formes physiques”, explique ce diplômé de l’École d’architecture de Strasbourg, converti à la “transarchitecture”.

Réel et virtuel mêlés

De quoi s’agit-il ? D’un mélange d’architecture réelle et virtuelle : les nouvelles technologies et les règles du cyberespace servent à remodeler notre environnement quotidien, tandis que les concepts de la construction physique sont appliqués aux univers multimédias. Une démarche d’“architecture globale”, qui veut rejeter les conformismes de l’urbanisme classique.
“Les commanditaires de projets ne brillent pas par leur originalité, et le code de l’urbanisme laisse peu de place à l’innovation”, estime Pierre Bohrer, 29 ans. C’est en Asie du Sud-Est que le jeune homme trouve sa voie. “J’ai travaillé pour un architecte malaisien, qui utilisait les nouvelles technologies pour concevoir des espaces en phase avec les problématiques de la ville moderne, tels des gratte-ciel bio-climatiques”, raconte-t-il. Un rien utopiste, le transarchitecte se plait à imaginer que la technologie fera naître des espaces urbains plus humains : “L’économie en réseau permet de dédensifier les villes puisqu’on peut travailler à distance, et les notions d’interactivité et de partage des connaissances, propres à la cyberculture, impliquent des espaces plus fluides, plus harmonieux”. DAO (dessin assisté par ordinateur), CAO (conception assistée par ordinateur), logiciels de réalité virtuelle… Pierre Bohrer met tous les outils informatiques au service de sa philosophie. Sans avoir nécessairement l’occasion de les exploiter à leur maximum : c’est à dose homéopathique que l’architecture numérique trouve preneur, et la moitié du chiffre d’affaires d’XZ Home (0,15 million d’euros, soit environ 1 million de francs) provient de commandes “classiques”.

Vélo abrité par ordinateur

Un seul projet complet de transarchitecture, fort modeste, a pour l’heure séduit les clients du cabinet : la conception d’un abri vélo entièrement imaginé à partir d’un programme informatique. Pierre Bohrer reste confiant : “L’architecture globale est désormais enseignée dans les écoles, et les projets “manifestes” que les transarchitectes produisent font évoluer les mentalités : l’architecture de demain ne pourra se passer des nouvelles technologies”. Rendez-vous dans dix ans ?

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Sophie Janvier-Godat