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Hervé Rony (SNEP) : ‘ Nous pourrons aller en justice pour demander à un FAI d’agir contre la piraterie ‘

Au lendemain de l’adoption de la LEN au Sénat, le représentant des maisons de disque françaises estime que la Justice peut imposer aux FAI de lutter contre le piratage. Mais il redoute qu’une subtilité du texte ne leur permette
d’échapper à cette contrainte.

Le texte adopté par le sénat vous donne-t-il satisfaction ? C’est globalement satisfaisant dans la mesure où c’est très largement une transposition fidèle de la directive européenne sur le commerce électronique. Pour autant, les sénateurs ont introduit une ambiguïté sur les pouvoirs du juge à
imposer aux FAI le filtrage et le blocage de l’accès à des contenus illicites.De quoi s’agit-il ? Un passage de l’article 2bis8 a été supprimé. Il concerne les mesures que le juge pourrait utiliser pour faire cesser un dommage occasionné par un contenu [telles que celles visant à cesser de stocker ce contenu ou, à
défaut, à cesser d’y permettre l’accès ; extrait supprimé par les sénateurs, NDLR]
.Que craignez-vous précisément ? Je redoute que les FAI ne se servent de cette modification pour dire que, si le législateur a supprimé cette disposition, c’est qu’il avait lui-même des hésitations sur le fait que les mesures de filtrage pouvaient avoir un sens. Ils
vont utiliser ça pour justifier leur prétendue impuissance à mettre en place les mesures demandées par un juge.Ce n’est pas votre lecture du texte… Non. Si on s’en tient à une lecture strictement juridique, le juge est souverain pour prendre toutes les mesures qu’il souhaite. Ce sera à lui de décider si les moyens techniques sont disponibles ou pas. C’est d’ailleurs ce qu’a
rappelé durant les débats le ministre délégué à l’Industrie, Patrick Devedjian [‘ Le juge peut consulter les experts, les hébergeurs, mener un débat contradictoire ; les technologies peuvent quant à elle
évoluer. Mais inutile de dire que le juge ne pourra faire que ce qui est possible […] ‘
a précisé le ministre délégué ; extrait des débats]Qu’est-ce que cela va changer concrètement ? Il n’y a plus de vide juridique. Nous pouvons aller devant les tribunaux pour demander à un fournisseur d’accès ou à un hébergeur d’agir pour lutter contre la piraterie lorsqu’elle est constatée. Ils ne pourront plus prétendre à une
espèce de neutralité, comme le postier qui ne peut pas ouvrir le courrier.Contre quel type de piraterie allez-vous lutter ? Les sites qui hébergent des MP3 illégaux et le peer-to-peer, même si dans ce dernier cas la lutte est plus difficile. Mais nous travaillons sur le plan technique à la mise en place de possibilités de filtrage. C’est un problème à long
terme. Nous voulons que les FAI collaborent dans ce domaine, même si nous savons qu’il est difficile de leur imposer des obligations de résultat dans un premier temps.Mais vous ne renoncez pas à poursuivre les internautes à titre individuel ? Non. Nous voulons responsabiliser tout le monde, y compris les internautes, qui doivent réaliser que ce n’est pas parce qu’ils ont un accès haut débit qu’ils peuvent tout faire. Les premières plaintes seront bientôt déposées. Cest
une question de semaines ou de mois.

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Propos recueillis par Stéphane Long