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Virus, je vous aime… de loin

Brain, WXYC, Necro, Sevendust, Andryushka, Backdoor.Darkirc, Peace/Mac, Swiss Army, PHX.965, Melissa, School Violence Evaluation, Mange Tout, Sircam… tous des virus, rien que des virus. Prévert en aurait fait un inventaire ; les éditeurs d’antivirus en font des alertes tout sauf poétiques.

Le dernier-né des virus bien contaminants, c’est Sircam. Difficile de lui échapper, il est partout : caché dans des pièces jointes, dissimulé dans des disques durs, répliqué par les logiciels de messagerie, exhibé en une de très nombreux sites et journaux. Qu’a-t-il de si frappant ? Tout et rien à la fois : il combine avec brio les avantages d’un ver (logic worm, un programme capable de se répliquer à l’infini) et d’un virus (un programme conçu pour détruire des données) ; mais il n’innove pas.Code Red, qui ne s’en prend qu’aux serveurs avec un goût particulier pour ceux de la Maison Blanche, impressionne plus. Ce dernier est un dérivé d’une souche de programmes conçus pour les attaques DDOS. Là, il ne s’agit pas de nuire au tout-venant des internautes. L’objectif est de saturer les sites Web cibles de requêtes jusqu’à planter les serveurs. Yahoo!, Amazon et d’autres en ont fait l’expérience en février 2000.Pas de doute, les virus posent problème, aux individus comme aux entreprises. On en dénombrerait plus de 57 000, une quinzaine s’ajoutant à la liste chaque jour. De quoi donner du grain à moudre aux éditeurs de logiciels antivirus. Mais ce n’est pas pour la sauvegarde du chiffre d’affaires de ces sociétés que je suis sous le charme des virus. C’est pour leur lien indéfectible avec l’informatique et les moyens qu’ils donnent à l’imagination humaine de s’exprimer.John Von Neumann, l’un des pères de l’informatique, a décrit dès 1949 des ” programmes autocopiés “. Chimiste, mathématicien et passionné de neurologie, Von Neumann a inventé des concepts qui continuent de nous hanter. L’un, en particulier, veut que la vocation ultime de l’informatique soit de produire un cerveau artificiel qui dépasserait le cerveau humain. Et qui dit organisme, même cantonné à un cerveau, pense immédiatement à tous les corollaires biologiques, par exemple les virus.Ceux que je préfère, par dessus tout, ce sont les hoaxes. Quoi de plus drôle qu’un hoax, sauf pour les administrateurs de messageries ? Ces courriers électroniques crient au loup et poussent le lecteur à le rediffuser. Et ils amènent des personnes très sérieuses à passer pour des comiques.L’avancée géographique des émules du ver ILOVEYOU est tout aussi passionnante à observer. Parti des Philippines le 3 mai 2000, on l’a vu mettre peu à peu à plat les serveurs Exchange des entreprises du monde entier. Le 4 mai, il n’y avait pas besoin de compter les fuseaux horaires pour savoir à quelle heure les employés de Hongkong, Berlin, Paris ou New York mettaient en route Outlook.Vous trouvez que j’ai mauvais goût de défendre les virus ? D’accord, j’ai de la chance et une culture informatique qui m’évitent la plupart des désagréments qu’ils entraînent. Mais ces programmes sont utiles. Nous déléguons de plus en plus de fonctions aux machines informatiques, la société occidentale ne pourrait pas exister sans elles aujourdhui. Alors remercions les hackers ! En écrivant leurs satanés codes viraux, ils nous rappellent que les ordinateurs ne sont pas des dieux infaillibles.

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Michaël Thévenet