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Midem 2004 : l’industrie du disque navigue à vue sur Internet

Laminée par le piratage, l’industrie du disque s’enfonce dans la crise, et s’en remet au succès des services de téléchargement payant.

Pour ne pas avoir compris à temps les enjeux économiques de la mutation vers le numérique, l’industrie du disque est dans l’impasse. Un désarroi directement palpable chez les professionnels (producteurs, distributeurs et créateurs)
réunis sur la Croisette, du 25 au 27 janvier, à l’occasion du Midem.Selon le Snep (Syndicat national de l’édition phonographique), le marché français du disque a enregistré en 2003 une baisse de 14,6 % de son chiffre d’affaires, tous supports confondus. En clair, les ventes de Popstar et autres
Star Academy ne suffisent plus à maintenir à flot un secteur qui traverse une crise sans précédent.Alors, à qui la faute ? Pour le directeur général du Snep, Hervé Rony, la réponse est toute trouvée : les coupables sont à rechercher sur les réseaux d’échanges de fichiers peer-to-peer, qui prolifèrent sur Internet. En
conséquence, à l’instar de la RIAA aux Etats-Unis, le Snep s’apprêterait à siffler la fin de la récréation.D’après Reuters, le syndicat professionnel serait prêt ‘ à engager des poursuites judiciaires contre les internautes français qui distribuent illégalement de la musique ‘ sur le web.
Cependant, l’explication prodiguée par le Snep est un peu courte, tant elle fait l’impasse sur d’autres maux qui ont contribué à accélérer le déclin actuel des ventes.Lancé au début des années 80, le CD est un support vieillissant dont le prix est souvent jugé excessif par les consommateurs. En face, ses successeurs potentiels, le DVD Audio et le SACD (un format notamment soutenu par Universal Music
et Sony), peinent, malgré des qualités techniques évidentes, à s’imposer sur le marché. Et certains analystes, jamais avares de prédiction, anticipent aujourd’hui la disparition du CD.Ainsi, pour Josh Bernoff de Forrester Research, ‘ il est temps de laisser tomber le plastique, et de se concentrer sur la promotion des talents ‘. Le jugement est péremptoire, mais les
chiffres présentés ce week-end par le cabinet d’études américain à Cannes sont tout aussi éloquents : le manque à gagner résultant du téléchargement illégal de musique en ligne avoisinerait, en 2003 et pour le seul marché américain, les
697 millions de dollars. De quoi faire frémir plus d’un producteur de disque.Sur le terrain de la musique en ligne, après les échecs retentissants des premières plates-formes de téléchargement payant comme PressPlay, l’année 2003 aura donné quelques timides signes d’encouragement, notamment avec le lancement de
l’iTunes Music Store et le rachat de la marque Napster par Roxio. Mais, si les ambitions sont grandes, l’essai reste à transformer.A écouter le PDG de Roxio, Chris Gorog, la transposition du service Napster en Europe (toujours prévue pour 2004), connaît des difficultés telles que l’on peut légitimement se demander si les professionnels du disque ont véritablement
saisi l’intérêt financier de vendre de la musique en ligne.Quoi qu’il en soit, coincé entre des relais de croissance au succès encore hypothétique (musique sur mobile) et des solutions de contrôle, souvent perçues par le consommateur comme une régression technologique (verrouillage des
contenus), l’industrie du disque est, sous sa forme actuelle, au bord de limplosion.

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Philippe Crouzillacq