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” Les opérateurs centraliseront l’hébergement d’applications “

L’ASP Consortium regroupe 500 acteurs de l’hébergement d’applications. La politique de licences des éditeurs est l’un des freins à l’adoption du modèle

Décision Micro & Réseaux : Comment définissez-vous un FAH ?

Traver Kennedy : L’activité de FAH [fournisseur d’applications hébergées, Ndlr] consiste à offrir à un utilisateur l’accès à un logiciel installé chez un hébergeur, par l’intermédiaire du réseau mondial (WAN). En fait, il existe aujourd’hui une grande diversité de services FAH, qui vont jusqu’au WAP. Par exemple, au Japon, un téléphone I-Mode donne accès à 5 000 applications : c’est un modèle FAH. J’identifie personnellement environ 160 FAH dans le monde. Tout le monde sait que le marché se révélera énorme, mais personne ne peut actuellement en mesurer l’importance. Nous avons demandé aux DSI européennes si elles comptaient utiliser le modèle FAH cette année. En Allemagne et en Grande-Bretagne, les réponses favorables atteignent 66 %, contre 24 % en France. Et, paradoxalement, la demande excède aujourd’hui l’offre, car, chez les FAH, les systèmes manquent de maturité et il y a un problème de déploiement des technologies.
Quels bénéfices peut-on attendre du modèle FAH par rapport à un déploiement classique des applications ?

Le modèle FAH limite les opérations de renouvellement des parcs. Une entreprise peut déployer ses applications plus vite et plus simplement, et unifier la base des logiciels installés avec une gestion centralisée. En interne, il devient possible de remplacer la gestion opérationnelle de l’outil informatique par une gestion stratégique. Selon le Gartner Group le modèle FAH permet de réaliser de 60 à 65 % d’économie.
Pour que le modèle FAH s’impose, les éditeurs vont-ils devoir changer leurs habitudes ?

Les éditeurs doivent comprendre que leurs sources de revenus se déplacent. Leur intérêt est aujourd’hui de donner leurs logiciels à un FAH qui les mettra en ligne avec les technologies existantes, puis de développer des versions Internet de leurs applications. Personne n’est compétent dans tous les domaines. Un éditeur ne sait ni administrer une ferme de serveurs ni gérer un réseau. Ses bénéfices viennent de l’application, pas de la ligne téléphonique. Certains éditeurs ont du mal à comprendre ce discours, tels Oracle ou Microsoft. La licence par poste s’avère totalement inadaptée au modèle FAH. Il faut passer aux licences par utilisateur. Aujourd’hui, on ne dispose pas encore de systèmes de facturation au temps d’utilisation. Elle se fait donc au forfait, sous la forme ” mois par utilisateur “. Mais on devrait arriver à un système mixte en fonction de la fréquence d’utilisation des applications. Pour certains éditeurs, le changement de modèle pose de gros problèmes financiers. Jusqu’à présent, ils encaissaient l’argent le jour de la vente d’une licence. Désormais, ils développent, puis facturent progressivement l’utilisation du logiciel.
Mais qui sera l’interlocuteur de l’entreprise, l’éditeur ou le FAH ?

Il faut plusieurs FAH compétents pour fournir une solution logicielle complète. Un seul a rarement toutes les ressources nécessaires. C’est l’opérateur qui sera chargé de tout fédérer. Mais plutôt l’opérateur voix que le FAI, car les opérateurs de téléphonie savent travailler avec des terminaux dépourvus d’intelligence locale, comme le combiné téléphonique. De toute façon, il doit y avoir un acteur responsable de la qualité de service et des contrats qui la garantissent auprès du client. Selon moi, le Minitel a établi le premier service FAH, et il passait par un opérateur téléphonique capable de fédérer des offres de services.
Le développement du modèle FAH est bloqué par les problèmes de garantie de la qualité de service et de droits d’exploitation des licences. Que préconisez-vous ?

Pour la qualité de service, nous élaborons un système de certification de fourniture d’applications hébergées en partenariat avec Ernst & Young. Ce cabinet réalisera des audits auprès des FAH et contrôlera régulièrement les installations pour fournir des rapports aux entreprises clientes, qui jugeront ainsi de la qualité de l’offre. Nous discutons aussi avec les membres du Consortium afin de définir un langage contractuel précis pour les niveaux des services proposés aux clients. L’entreprise doit aussi comprendre que pour exploiter un modèle FAH, il lui faudra remettre à plat sa fourniture d’accès, vérifier la qualité de la bande passante, examiner le comportement de son LAN, installer un annuaire sécurisé, etc. Par ailleurs, nous collaborons avec l’Ompi (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle) pour déterminer les mécanismes juridiques spécifiques à établir afin d’éviter les incohérences dans la politique de gestion des licences. Nous préparons un système qui pourrait s’appliquer au niveau mondial.
L’ASP Consortium prêche pour sa paroisse, sans trop masquer les multiples problèmes qu’il reste à résoudre (licences, audit des installations, garantie de la qualité de service). Par ailleurs, l’arrivée de ce nouveau modèle va obliger les fournisseurs, comme les consommateurs, à une remise en cause des architectures d’entreprise, avec le risque que les nouvelles soient aussi coûteuses et complexes que les précédentes (micro puis client-serveur).

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Propos recueillis par RENAUD BONNET et HASSAN MEDDAH