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‘ La France doit passer sans attendre aux 100 Mbit/s ‘

Le Sycabel, syndicat de l’industrie du câblage, publie un livre blanc qui prône le recours à la fibre optique pour faire passer la France à l’ère du très haut-débit. Entretien avec le délégué général de l’organisation.

La France fait figure en Europe, une fois n’est pas coutume, de très bon élève en matière d’ADSL. La concurrence y est vive, les prix bas et les innovations fréquentes. Mais pour le Syndicat professionnel des fabricants de fils et
câbles électriques (Sycabel), il est plus que temps de penser à passer à l’après-ADSL, quand bien même certains foyers n’ont toujours pas accès à cette technologie.L’organisme vient de publier
un livre blanc qui préconise de s’inspirer du Japon ou de la Suède et de recourir à la fibre optique pour faire basculer le pays dans l’ère du très haut-débit. Les pouvoirs publics se
penchent eux aussi sur le problème. Le nouveau ministre délégué à l’Industrie, François Loos, vient de commander une étude sur le sujet à l’Idate, attendue pour septembre.01net. : Votre livre blanc préconise le recours à la fibre optique pour faire passer la France au très haut-débit. Mais vu que l’ADSL permet déjà d’atteindre aujourd’hui des débits importants, est-ce
vraiment nécessaire ?



Hugues de Gromard : Le déploiement de l’ADSL dans l’Hexagone est déjà une très bonne chose. Mais qui peut obtenir de l’ADSL à 20 Mbit/s aujourd’hui ? Avec les fils de cuivre du téléphone, le débit décroît très
vite en fonction de l’éloignement. La distance moyenne d’un foyer français par rapport au central téléphonique est à ce jour de 2,7 kilomètres. Soit, en gros, du 4 Mbit/s. C’est insuffisant pour un certain nombre d’applications, notamment
pour la télévision haute définition. Car le palier de ce genre de service s’établit à 10 Mbit/s.


Aujourd’hui, tout le monde veut le triple play, avec de la télévision. Ce que les industriels disent, c’est que les foyers voudront, par exemple, à terme avoir plusieurs canaux de télévision HD, donc des débits
nécessaires aux alentours de 30 Mbit/s. Un industriel comme Thomson évoque même 60 Mbit/s.Mais comment déployer de tels débits ? En amenant la fibre optique directement dans les foyers ?


Il y a la solution VDSL [jusqu’à 52 Mbit/s en réception et 2 Mbit/s en émission, NDLR], qui monte bien plus haut que l’ADSL en débits, mais va très peu loin. La solution consisterait alors à amener la fibre
jusqu’aux sous-répartiteurs téléphoniques, plus proches des abonnés, et non plus jusqu’au central téléphonique seul. La question que nous posons est de savoir si, dans les zones où il n’y a pas d’infrastructures haut-débit, il ne vaut mieux pas
sauter l’étape VDSL et passer directement à la fibre optique jusqu’à l’abonné (fiber to the home, FTTH), comme au Japon.Dans votre rapport, vous dites que cela ne coûterait pas si cher de déployer de la fibre jusque dans les foyers, alors que tout le monde s’imagine le contraire…



La fibre optique a longtemps eu la réputation d’être une technologie très coûteuse. Avec la bulle Internet, il y a eu des investissements importants qui ont été réalisés, les technologies ont vu leurs prix baisser, donc ?” ce
n’est pas très agréable pour nous ?” les prix de la fibre se sont complètement effondrés et ont été divisés par dix. Aujourd’hui, elle n’est plus si onéreuse.


De plus, dans une liaison télécoms, ce qui coûte, c’est surtout le génie civil. La fibre compte pour environ 10 % de l’investissement total. Pour le cuivre ou la fibre, les coûts des équipements de réseau sont à peu près les mêmes,
tout comme les dépenses de génie civil. On arrive à des coûts identiques, voire même un peu moindres pour la fibre, quand il n’y a pas d’infractructures préexistantes.Faut-il que l’Etat donne une impulsion forte ? Et s’engage sur le déploiement de la fibre optique jusqu’à l’abonné, par exemple ?


Oui, tout à fait. Nous savons qu’il y a un certain nombre d’investisseurs, privés ou publics, qui hésitent à s’engager et qui veulent être sûrs d’aller dans le bon sens. Ce que nous demandons à l’Etat, c’est de financer un projet pilote
FTTH pour valider la technologie, les logiciels, toute la chaîne. Il y a déjà le projet
Pau Broadband Country, c’est vrai, mais c’est à une trop petite échelle. Il faudrait le faire au niveau d’une grande agglomération. Le projet pilote servirait aussi à valider
les services qui seront disponibles.Justement, que faire d’une telle bande passante ? On peut estimer que 10 à 20 Mbit/s, c’est déjà suffisant pour des besoins courants…


Le très haut-débit concerne tout ce qui touche à l’image, par exemple, comme la haute définition, la télémédecine, l’assistance à domicile. Les médecins n’aiment pas la compression, car elle est associée à une perte de la qualité. En Asie,
la motivation numéro un des ménages pour passer au très haut-débit est la formation, l’éducation à distance.


L’idée est d’entrer dans une nouvelle ère, où le citoyen pourra échanger avec son environnement, sa famille, l’administration, etc. Les logiciels, eux, vont pouvoir devenir plus complets, plus conviviaux si les débits cessent d’être un
problème.Mais ne se trouve-t-on pas dans une situation quelque peu absurde, entre des industriels qui préparent des technologies comme la TVHD et une réalité des réseaux qui condamne de nombreux foyers français à se contenter le plus
souvent du 512 Kbit/s ?
Nous pensons qu’il n’est pas trop tard pour combler ce fossé, si on fait les bons choix. Nous sommes satisfaits, car le ministère a bien reçu nos préconisations et commande une étude ?” nous ferons partie du comité de
pilotage ?” pour savoir quel chemin suivre.

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Guillaume Deleurence