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La bataille de l’UMTS sera difficile pour tout le monde

Pour Jozef Cornu, le marché en devenir de l’UMTS sera semé d’embûches pour tous les acteurs. Le directeur d’Alcatel revient aussi sur l’attribution des licences de boucle locale radio en France et explique le retard d’Alcatel dans IP.

01 Réseaux : Quel regard portez-vous sur le prix des licences UMTS, en Europe notamment ?Jozef Cornu : Le coût de ces licences est le résultat d’une décision politique qui s’est appuyée sur le postulat suivant : ” Toutes les nouvelles attributions de fréquences pour le développement du mobile devront être liées à l’utilisation d’une nouvelle technologie de troisième génération “. Si ces fréquences avaient été accordées en laissant chacun se déterminer sur les technologies à mettre en ?”uvre, comme c’est le cas aux États-Unis, la situation aurait été très différente.01 R : Quelle option les opérateurs ont-ils choisie ?J. C. : Ils ont opté pour le second scénario. Ils vont ainsi installer des réseaux parce qu’ils ont obligation de le faire. Il y a beaucoup de licences (5 en Angleterre et 6 en Allemagne), leur coût dans ces deux pays est d’environ 100 $ par habitant, à comparer à celui des licences PCS, aux États-Unis, ou GSM, en Europe, qui était, rappelons-le, d’environ 20 $ par habitant.01 R : Vous ne semblez pas très optimiste…J. C. : La situation sera différente selon les opérateurs. Le japonais NTT DoCoMo a été initiateur car il souffrait d’un manque de fréquences sur son réseau actuel, très dense. En conséquence, le réseau 3 G sera rentable, même pour la voix. La densité permet, en effet, de déployer plus vite et à moindre prix. Il a annoncé qu’il se lançait dès l’année prochaine, mais il s’agira d’un service voix.01 R : On dit que l’UMTS coûtera cher tout autant aux opérateurs qu’aux constructeurs ?J. C. : Bien sûr, nous devrons mettre la main ” à la poche ” ! Compte tenu des sommes en jeu, il y a un besoin de financement. Nous devrons faire des choix, nous montrer très sélectifs et financer uniquement les opérateurs à qui nous faisons confiance. Les nouveaux acteurs des télécoms auront sans doute plus de mal à trouver un fournisseur qui accepte de financer une partie de leur réseau sur la seule base d’un business plan.01 R : En France, SFR, Bouygues Telecom et Itinéris n’ont donc pas de souci à se faire…J. C. : C’est clair. Il y aura toujours une discussion sur les crédits et leurs montants. Mais notre métier n’est pas d’avancer de l’argent. Donc, quand le crédit est bien solide, on le revend à une banque. Pour pratiquer de la sorte, nous sommes obligés de travailler avec des gens en qui nous avons totalement confiance.01 R : Sur le dossier de la boucle locale radio en France, certains de vos concurrents estiment que, si des candidats ont eu leur licence, c’est qu’ils avaient un formidable lobbyiste à leurs côtés, à savoir Alcatel…J. C. : Cette remarque, qui s’applique peut-être au niveau français, a peu de signification à une échelle plus vaste. Aujourd’hui, nous avons construit, pour différents clients, environ cent réseaux de tailles différentes dans le monde. Nous estimons détenir près de 40 % du marché mondial du LMDS (Local multipoint distribution system). Nous avons atteint cette position non seulement grâce à notre technologie radio parfaitement performante, mais aussi parce que nous avons une offre en réseaux de données, qui l’est tout autant. Il ne faut pas oublier que la partie radio ne constitue qu’une petite partie d’un réseau.01 R : Mais, à propos du rôle du lobbying…J. C. : Il ne faudrait quand même pas sous-estimer le régulateur. Il est loin le temps où le marketing c’était le lobbying dans le cabinet des ministres. Le rôle de l’État dans les télécommunications a bien changé. Hier, les pouvoirs publics finançaient leur développement. Aujourd’hui, ils taxent ce développement, et, avec l’UMTS, ils le font avant même l’utilisation, ce quiest assez fort.01 R : Comment vous placez-vous dans la technologie IP, qui n’est pas précisément le point fort d’Alcatel ?J. C. : Nous avons, pour le moment, choisi de poursuivre la ligne ATM en même temps qu’IP. Nous sommes un peu responsables de la croissance continue de l’ATM, qui se poursuit, car nous avons introduit dans notre produit ADSL une interface ATM. L’ADSL, provoquant beaucoup de trafic, entraîne une grande demande de réseaux ATM, ce qui nous a amenés directement à acquérir Newbridge. Dans le domaine d’IP, grâce à nos différents rachats, nous avons désormais un portefeuille d’offres tout à fait satisfaisant. Nous devrions lancer un gros routeur IP qui sera en mesure de concurrencer les produits de Juniper Networks et de Cisco Systems. Il faut également savoir que, dans le monde IP, l’optique prend de plus en plus d’importance, il n’y a qu’à regarder les acquisitions de Cisco dans ce domaine. Or, Alcatel a une très forte position dans l’optique.

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Jérôme Desvouges