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Jérôme Bédier, président de la fédération du commerce et de la distribution : ” Notre cerveau a deux hémisphères : un technologique, un marchand “

Le président de la FCD estime que la France n’est pas en retard dans l’usage de la high-tech. Pour lui, le vendeur doit faire de la fidélisation une priorité.

Vu de la FCD, le remplissage actuel du panier de la ménagère fait-il craindre une nouvelle récession ?Cela fait un an que l’on nous annonce le ralentissement de la consommation. Jusqu’à présent elle tient. Le moral des Français est directement lié aux évolutions prévisibles du pouvoir d’achat. Aujourd’hui, les Français ont compris qu’ils ne pouvaient pas avoir de pouvoir d’achat supplémentaire, soit par l’effet de l’inflation comme dans les années 1960, soit par la baisse des prix comme dans les années 1980. Ils ont compris que ce qui pouvait être générateur de pouvoir d’achat, c’est la baisse fiscale, c’est-à-dire une meilleure gestion de l’État entraînant la restitution de ressources à la consommation marchande. Cela avait été pressenti par le gouvernement précédent. Cette carte est véritablement jouée par le gouvernement actuel. Deux choses auront un impact positif : le maintien de la prime pour l’emploi et la poursuite de la baisse de l’impôt sur le revenu. Je dis bien la poursuite, et non une baisse “spot “. Si le gouvernement a un fil rouge à suivre, c’est bien celui-là.Wal Mart, le numéro 1 mondial de la grande distribution, explique sa position de leader et de champion de la marge d’exploitation grâce à un emploi massif de nouvelles technologies, notamment de bases de données. La grande distribution française peut-elle s’aligner, selon vous ?Wal Mart est à la fois un très bon “technologue” de la distribution et un très bon commerçant au sens complet du terme. Il y a un travail considérable qui est fait dans les magasins, dans la formation des personnels, dans la culture maison… Aujourd’hui, il y a deux hémisphères dans le cerveau d’un commerçant : l’hémisphère technologique et l’hémisphère commercial au sens le plus classique. Mais le c?”ur du métier de commerçant reste le contact. En France, on a des technologies qui ne sont pas si mauvaises que ça. Nous avons travaillé tout ce qui est optimisation logistique. En ce qui concerne les bases de données fournisseurs, cela se traduit par la mise en place de l’ECR [Efficient Consumary Response, ndlr], qui consiste à améliorer les flux de réassort. Un bon dialogue technique existe là-dessus avec les industriels.L’usage des technologies à l’égard des fournisseurs de la grande distribution peut-elle se virtualiser totalement ?La réponse est dans le produit. On n’achète pas n’importe quoi. On achète une marque ou un produit avec des caractéristiques intrinsèques. C’est la limite à l’achat informatisé, lequel fonctionne mieux pour les fournitures nécessaires à l’exploitation. Il faut savoir ce que l’on achète et concevoir une offre globale. Cela ne peut pas être automatisé.À quoi doit s’attendre le consommateur à l’avenir ?Aujourd’hui, ce qui compte, c’est la fidélisation. Les bases de données peuvent être d’intérêt réciproque. Mais systématiser la connaissance du client jusqu’à l’infini deviendrait contre-productif. Mais à partir du ticket de caisse, on peut non seulement régler tous les problèmes de vie du magasin comme le réassort, mais aussi faire des propositions au client ou lui remettre des bons de réduction. En tout état de cause, nous sommes très vigilants en France sur la protection des données personnelles. Notre code professionnel le prouve.Quel jugement portez-vous sur la situation actuelle de l’e-commerce en France ? C’est un échec ?Non. Il n’est pas encore rentable, mais il prend sa place. Ce sont des clients qualitativement intéressants avec souvent des revenus plus élevés. Il s’agit de savoir si les flux vont augmenter fortement ou pas. Pour l’instant, l’e-commerce en France, c’est une goutte d’eau, mais c’est un complément de gamme utile.On observe à l’heure actuelle dans les rues l’apparition de distributeurs automatiques de produits courants.C’est Casino qui a commencé à tester la formule à Lyon. Là aussi, c’est un complément de gamme. L’e-commerce tout comme la distribution automatique ne s’opposent pas aux circuits traditionnels. Cela peut servir pour des gens décalés, ou à l’alimentation un peu… monochromatique !On voit de plus en plus “d’espaces serviciels” (guichets automatiques SNCF, bornes d’accès à internet…) s’installer dans les grandes surfaces. À quoi correspond cette tendance ?L’élargissement du choix de services correspond à une tendance de fond. Elle est caractérisée par la vente en grandes surfaces de spectacles, de voyages, de produits financiers. Mais cela doit se faire avec une valeur ajoutée marquée. Dans ces domaines, nous avons été acteurs, avec certains sites internet, du mouvement de baisse des prix.La place prise par les produits technologiques (PC, téléviseurs, téléphones, lecteurs de DVD…) dans les grandes surfaces non spécialisées est de plus en plus importante. Pourquoi ?Nous sommes présents naturellement sur ces secteurs où il y a peu d’industriels. Ce qui signifie que les prix sont tenus. Quand un producteur tient à vendre rapidement un produit nouveau, il a intérêt à passer par la grande distribution. Ensuite, nous jouons aussi les marques de distributeurs, comme dans la micro-informatique. Le fond de notre mission est la démocratisation de ce type d’achat.

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Philippe Bonnet