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Droit à l’oubli : Google se plaint du casse-tête que lui a imposé l’Europe

Dans une lettre, le moteur de recherche détaille les difficultés qu’il rencontre pour examiner les demandes de suppression d’URL. C’est de France qu’émaneraient le plus de réclamations.

Le 13 mai dernier, la Cour de justice européenne reconnaissait le droit à l’oubli. Les particuliers peuvent depuis demander aux moteurs de recherche la suppression de liens vers des pages Internet comportant des données personnelles.

Peter Fleischer, le juriste en charge des questions de vie privée chez Google, détaille les difficultés rencontrées pour appliquer ce texte dans une lettre envoyée à la CNIL le 31 juillet dernier. Il répond à une série de questions posée par l’instance de régulation à tous les moteurs de recherche.

Quels critères pour accepter de supprimer les URL ?

L’examen de ces requêtes est un vrai casse-tête pour Google, car il lui faut arbitrer entre l’intérêt public d’accéder à des informations, le droit de l’éditeur à diffuser ces données et les dommages personnels ou économiques qui peuvent affecter les personnes concernées. Google obtempère plus facilement si les informations sont dépassées ou non pertinentes, car sa priorité reste que l’internaute accède aux résultats les plus significatifs possibles. Concernant la personne demandeuse, il s’agit de savoir si elle est une figure publique. Pour l’éditeur, si c’est une source fiable. Et bien sûr, il faut analyser le contenu vers lequel pointe le lien. A-t-il été publié par le plaignant lui-même ? Se rapporte-il à sa profession ou à une condamnation pénale ?

« Chaque critère a ses propres complications et ses défis potentiels », souligne Peter Fleischer. « Dans de nombreux cas, il nous manque un contexte factuel solide sans lequel il est difficile d’équilibrer les intérêts concurrents », ajoute-il. Car c’est sur la bonne foi des demandeurs que Google doit se baser. Or, il est bien souvent impossible de vérifier l’exactitude des informations fournies.

De nombreux cas litigieux

Parmi les cas litigieux rencontrés, il y a ces internautes désireux de faire disparaître des liens concernant des personnes portant le même nom qu’eux. Ou ces entreprises tentant de faire déréférencer leurs concurrents. Et tous ceux qui évitent de mentionner des détails qui pourraient leur être défavorables. Comme cette personne qui voulait voir disparaître une URL vers un viel article racontant sa condamnation pour des crimes commis alors qu’elle était adolescente. Or, elle avait récidivé à l’âge adulte. Enfin, certains personnalités publiques profitent du système pour tenter de masquer leur position politique ou certaines de leurs activités.

C’est la raison pour laquelle Google tient à avertir les éditeurs après suppression des liens dans son moteur de recherche. Des corrections sont d’ailleurs toujours possibles à postériori. L’utilisateur de Google est également averti de la modification sans savoir ce qui exactement a été enlevé.

La France championne des demandes de droit à l’oubli

Peter Fleischer peut déjà tirer un premier bilan indicatif depuis le 30 mai dernier, date à laquelle Google a commencé à prendre en compte les demandes de droit à l’oubli. Au 18 juillet, la France arrivait en tête des requêtes avec 17 000 requêtes concernant 58 000 URL.

Elle était suivie par l’Allemagne (16 500 demandes, 57 000 URL), la Grande-Bretagne (12 000 demandes, 44 000 URL), l’Italie (7 500 demandes, 28 000 URL) et les Pays-Bas (2500 demandes et 21 000 URL). Au total, 91 000 réclamations  déposées en ligne pour toute l’Europe. 53% d’entre elles auraient été satisfaites, 32% rejetées et 15% nécessiteraient davantage d’informations.

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Amélie Charnay