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Comment Alcatel digère ses acquisitions américaines

Alcatel a fait des Etats-Unis une priorité stratégique. Dans l’environnement extrêmement concurrentiel du marché des télécommunications, le groupe tricolore, fort de ses récentes acquisitions, estime avoir sa carte à jouer.

Les Etats-Unis représentent 40 % du marché mondial des télécommunications, alors qu’Alcatel n’y réalise que 20 % de son chiffre d’affaires.” Pour Krish Prabhu, nouveau directeur général d’Alcatel et président d’Alcatel USA, l’équation est, finalement, d’une grande simplicité : la société doit rapidement doubler de taille aux Etats-Unis (3,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires prévus en 1999).

DSC Com et Xylan, au c?”ur de la stratégie

La firme compte relever ce défi grâce à sa présence sur l’ensemble des segments du marché des télécommunications ?” transmission, réseaux d’accès et, depuis peu, réseaux de données ?”, résultat de ses récentes acquisitions américaines (Assured Access, Internet Devices, Packet Engines et Xylan). Réunies au sein d’une entité baptisée Internetworking Division, ces sociétés rachetées constituent la véritable troupe d’élite au service de la stratégie Internet du groupe ; créneau sur lequel celui-ci compte tout particulièrement pour stimuler la croissance d’Alcatel USA. Dirigée par Steve Kim, fondateur et président de Xylan, cette division aurait pour objectif de réaliser quelque 3 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2003, dont 2 milliards pour Xylan. Clairement placé au centre du dispositif, ce dernier (qui affichait un chiffre d’affaires de 348 millions de dollars en 1998) estime disposer de nombreux atouts pour relever ce défi, à l’aide de sa gamme de commutateurs périphériques (OmniSwitch) et c?”ur de réseau ATM avec gestion de priorités (OmniCore).
Outre-Atlantique, le groupe s’appuie également sur DSC Com, un constructeur généraliste racheté à la mi-1998 et bien introduit auprès des opérateurs régionaux américains (Bell Atlantic, BellSouth et SBC Communications). Fait significatif : Alcatel n’a pas hésité à rappeler Douglas K. Jacobs, un vétéran de DSC ?” parti entre-temps monter sa start-up ?” pour lui confier la vice-présidence d’Alcatel USA, avec pour principale mission les ventes aux opérateurs. Ancien de Western Electric et d’AT&T, Douglas Jacobs a parfaitement le profil de l’emploi, tant son expérience est riche, se réjouit-on chez Alcatel.

L’ADSL et son modem Speed Touch, nouvel eldorado

La transmission est un autre pilier du développement du groupe aux Etats-Unis, depuis le rachat de cette activité à Rockwell, à la mi-1991. Pour la petite histoire, rappelons que c’est précisément de la division Transmission de Rockwell qu’est issu Krish Prabhu, nouvel homme fort du groupe. Alcatel mise également beaucoup sur le déploiement de l’ADSL, en s’appuyant sur des clients comme Ameritech, BellSouth, Pacific Bell, SBC ou Allegiance Telecom. Sur le plan commercial, l’ADSL devrait représenter, cette année, aux Etats-Unis, quelque 300 millions de dollars de chiffre d’affaires (hors équipements d’extrémité), pour environ un million de lignes installées. On peut aussi noter le prochain lancement, toujours sur le marché nord-américain, d’un modem ADSL baptisé Speed Touch USB, à 200 dollars l’unité, et pour lequel le groupe affiche de grandes ambitions

Le Web phone, un dossier sensible

Concernant l’ADSL Lite, domaine où Alcatel coopère notamment avec Compaq et Dell, l’enthousiasme semble un peu retombé, en raison de l’arrivée prochaine de séparateurs dédiés permettant de bénéficier d’un débit accru (environ 1,5 Mbit/s) par rapport au schéma initial.
L’avenir du Web phone aux Etats-Unis est le dernier dossier d’envergure, pour lequel Alcatel fait cependant montre de prudence. Le groupe espère que son accord de principe avec US West pour une diffusion à grande échelle ?” avec comme objectif un prix public inférieur à 300 dollars le terminal ?” aboutira prochainement. L’autre piste évoquée autour du Web phone est celle des ” marchés verticaux “, surtout les grands magasins (Dillards, Macy’s, Neimann Marcus et Wal- Mart) et les ISP, à l’instar d’America OnLine (AOL), pour lequel la presse américaine se faisait, à la fin du mois de septembre, l’écho d’un possible accord avec Alcatel.

Cisco, éternelle bête noire

Globalement, le dispositif paraît opérationnel. Il convient d’y ajouter le rachat en cours, pour 1,5 milliard de dollars, de Genesys Telecommunications Laboratories, spécialiste du couplage de la téléphonie et de l’informatique avec lequel Alcatel entretenait déjà des liens étroits. Reste maintenant à transformer l’essai, spécialement en affrontant les poids lourds du secteur (Cisco Systems, Lucent Technologies et Nortel Networks), particulièrement bien implantés sur place. “Tout est une question d’exécution”, relève Krish Prabhu, chez qui la question récurrente du positionnement d’Alcatel face à Cisco provoque un léger agacement.“Cisco est surtout financièrement très puissant grâce à sa capitalisation boursière (230 milliards de dollars, NDLR), rétorque Krish Prabhu, pour qui le poids des activités américaines d’Alcatel est sensiblement égal à celui de celles de Cisco”.
Concernant d’éventuels rachats supplémentaires, Alcatel examine surtout le domaine du conseil, un peu comme… Cisco, qui a récemment acheté 20 % de KPMG, pour 1 milliard de dollars. ;

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par Henri Bessières