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Apple TV : le géant de Cupertino peut-il réussir dans le gaming ?

Le nouveau boîtier multimédia d’Apple est non seulement capable de lire des vidéos et de la musique mais aussi de faire tourner des jeux, dans votre salon, sur votre téléviseur. Apple devient de fait le concurrent de Sony, Microsoft et Nintendo. Peut-il réussir ?

Mercredi dernier, Apple introduisait une nouvelle génération d’Apple TV, après quelques années sans mise à jour matérielle. Ce nouveau boîtier multimédia embarque à nouveau de l’espace de stockage, se pare d’un kiosque de téléchargements dédié et ouvre grand la porte aux jeux vidéo, offrant à l’Apple TV le potentiel de devenir une console de salon. Un quatrième acteur dans le vase clos du gaming, voilà une bonne nouvelle, mais Apple peut-il réussir dans ce nouveau domaine ?

Y a-t-il une place pour de nouvelles consoles ?

A priori, ce marché est extrêmement verrouillé : Sony, Microsoft et Nintendo dominent un marché qui éprouve le « troisième larron » au point qu’on pourrait croire qu’il souhaite revenir systématiquement à un duopole, nous explique Laurent Michaud, Responsable de la Practice Loisirs Numériques au sein de l’Idate. Mais pour l’analyste, il y a une place pour de nouvelles consoles. Et si les prétendantes sous Android -comme le soufflé Ouya, bien vite retombé- n’ont pas réussi, c’est qu’elles ont été « insatisfaisantes ». Il leur manquait quelques atouts pour que la sauce prenne, à commencer par un catalogue digne de ce nom.

Un géant qui doit refaire ses preuves

Et c’est là qu’Apple se trouve dans une position paradoxale, à la fois forte et instable. Forte, car sur le 1,5 million d’applications disponibles sur l’App Store, 22,21% sont des jeux, selon Statista. Apple est donc déjà un poids lourd du jeu vidéo. En sept ans, il a su séduire les développeurs. Pour autant, le géant américain va devoir reproduire ce triomphe, continuer à attirer les développeurs vers la nouvelle Apple TV – dont le parc installé est pour l’instant inexistant – en les encourageant à développer des titres exclusifs et des contenus spécifiques pour les jeux qui seront portés. Car reproduire à l’identique les jeux qui ont triomphé sur iPhone et iPad ne suffira pas, « sans valeur ajoutée, il n’y aura pas d’intérêt » pour le joueur, relève Laurent Michaud. Le projet d’applications « universelles » abordé par Apple, qui fonctionnent sur iPhone, iPad et Apple TV et permettent de reprendre une partie commencée sur son téléviseur sur son iPhone et inversement sont un début.

Apple TV Jeux

Le défi du triple A

Apple paraît avoir bien pris conscience de ces deux enjeux, à en croire la présentation lors de la keynote de Crossy Road, adaptation du titre iPhone, enrichi d’un mode multijoueur et de Beat Sports, des papas de Rock Band, exclusivité aux faux airs de Wii Sports.

Pour autant, selon Laurent Michaud ces jeux assez « casual » pourraient ne pas suffire. Il va même plus loin en déclarant que le « casual gaming n’a pas forcément besoin de se retrouver sur nos téléviseurs ». Si l’App Store propose déjà de gros jeux impressionnants – nouvelle franchise pour iOS : Infinity Blade, ou adaptation de titre console – Xcom : Enemy Unknown, Apple doit absolument réussir à ajouter des titres AAA – comme ceux qui triomphent sur les consoles classiques. L’analyste prend l’exemple de Google et d’Amazon qui ont créé leurs propres studios de développement et pense qu’Apple pourrait être bien inspiré de sauter le pas. Car, pour réussir, Apple devra investir lourdement, explique M. Michaud : investir dans la promotion de son boîtier, dans celle des titres développés et dans les développeurs eux-mêmes.

Un temps d’avance et un temps qui presse

Selon notre analyste, Apple a le temps… mais doit tout de même se presser un peu. Du temps, car il est en avance sur les grands fabricants de consoles sur de nombreux points essentiels. « Apple possède l’ensemble des maillons de la chaîne de valeurs dématérialisée », explique-t-il. « Il a des accords sur les contenus, il possède un magasin numérique, une infrastructure de distribution, une solution de paiement et une base colossale de clients… ».

Et une certaine urgence, car s’il veut faire de son Apple TV un succès, il va devoir monter en puissance pour s’inscrire dans les cycles de vie des consoles de salon actuelles, analyse le représentant de l’Idate. A moins qu’Apple décide de créer son propre rythme et de mettre à jour son Apple TV chaque année désormais avec une nouvelle puce et plus de stockage. Le stockage est d’ailleurs un problème potentiel, pense Laurent Michaud. Les « limites de la stratégie d’Apple seront toujours l’ouverture et la permissivité », précise-t-il. Selon lui, Apple devrait s’ouvrir pour le stockage notamment, permettre d’installer des contenus sur un disque externe. Même s’il ne se fait pas trop d’illusion car « ce modèle fermé est également un argument de séduction auprès des fournisseurs de contenus ».

Une chance ?

En définitive, selon Laurent Michaud, Apple devra, pour devenir légitime, consolider son offre autour de deux axes. Le premier est l’innovation technologique, qui a permis dans le monde des smartphones de redistribuer les cartes en mettant sur la touche des géants qu’on croyait inébranlables. Le second est l’innovation des services, qui passe par exemple par l’intégration poussée d’une composante sociale et d’une interface simple et performante… Le tactile et Siri pourraient répondre à cette dernière exigence.

Alors, Apple a-t-il un avenir dans le jeu vidéo ? Il a en tout cas toutes les cartes en main pour devenir un acteur qui compte – et les poches profondes… Après avoir ébranlé le marché des consoles mobiles avec ses iPod et iPhone, il pourrait ébranler le trinome qui anime nos salons. Reste qu’il faudra trouver de bons jeux, proposer de bons prix et aussi et surtout – au-delà de la télécommande de l’Apple TV, qui est n’est qu’une autre Wiimote – une bonne manette. On souhaite en tout au boîtier de Cupertino plus de succès qu’à la Pipp!n

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Pierre FONTAINE