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Livraisons : peut-on faire confiance à La Poste ?

Un produit sur cent commandés sur Internet disparaît en cours de livraison. Un problème que la Poste règle difficilement, malgré ses efforts.

‘ Le principal problème de l’e-commerce n’est pas le paiement en ligne, comme l’ont longtemps pensé les internautes, mais la livraison. C’est aujourd’hui la première source de litige entre clients et
cybercommerçants, et de loin ! ‘,
affirme David Botvinik, directeur général de Fia-Net, assureur spécialiste d’Internet. Le problème des commandes sur Internet qui arrivent cassées ou, pire, ne parviennent jamais jusqu’à
leur destinataire, est loin d’être une broutille : les cybercommerçants interrogés lors de notre enquête estiment qu’environ 1 % des colis qu’ils envoient disparaissent ou sont abîmés lors de leur passage par La Poste. Ce qui représente
tout de même, uniquement au premier trimestre 2005… plus de 40 000 colis !Certes, le problème n’est pas né avec l’e-commerce. La vente par correspondance ‘ traditionnelle ‘ est victime, elle aussi, de la disparition des paquets. L’essor de la vente en ligne a
tout simplement donné plus d’ampleur à ce phénomène. ‘ En ce qui concerne le taux de disparition ou de détérioration des colis, on ne fait pas de différence entre la vente en ligne et la vente par correspondance,
explique Dominique Du Chatelier, secrétaire général de la Fevad (la Fédération des entreprises de vente à distance). Aujourd’hui, les spécialistes de la vente par correspondance font également de la vente en ligne. Ce qui importe, c’est la
nature du paquet : les voleurs sont plus tentés par un produit high-tech que par un corsage… ‘
Mais qu’arrive-t-il exactement à ces colis ? Le cas des paquets endommagés est facile à comprendre : il
s’agit le plus souvent d’emballages trop fragiles, qui résistent mal aux manipulations ‘ brutales ‘, comme nous l’ont confirmé des employés de La Poste que nous avons interrogés dans le cadre de cette
enquête. Quant à la disparition pure et simple, elle serait tout simplement due à des vols dans les centres de tri, selon les mêmes sources…

Des tarifs plus bas que ceux des transporteurs

Si l’ampleur du phénomène n’est pas négligeable, les cybermarchands rechignent à critiquer La Poste. ‘ C’est difficile, car on bosse avec eux tous les jours, et on n’a pas vraiment le
choix ‘,
glisse le directeur d’un site spécialisé dans la vente de produits high-tech qui préfère rester anonyme. Les tarifs de La Poste sont, en effet, bien plus bas que ceux des transporteurs spécialisés, tels UPS ou FedEx.
Les cybercommerçants ne s’adressent à ces sociétés privées que pour la livraison d’objets encombrants, lourds ou fragiles, comme des écrans plasma ou des machines à laver, pour lesquels les prestations de La Poste, en termes de prix et d’assurance,
sont moins intéressantes.En février dernier, des représentants de l’e-commerce et de La Poste se sont réunis. Jean-Paul Bailly, président de La Poste, affirmait alors : ‘ L’avenir de La Poste est intimement lié à celui de
l’e-commerce. Nous devons améliorer la qualité de la livraison par la qualité des informations dont nous disposons sur les destinataires, mieux gérer le règlement des problèmes et faciliter les retours. ‘
Un aveu, à demi-mot,
de la responsabilité de l’entreprise publique.Selon Jean-Claude Sonet, porte-parole de ColiPoste (filiale de La Poste), il n’existe pas de réseau organisé de voleurs. Il admet cependant l’éventualité de cas isolés d’employés peu scrupuleux… Ce que nous ont confirmé les
facteurs interrogés, qui reconnaissent qu’il y a bien du vol dans les centres de tri. Selon eux, les fautifs ne seraient pas les employés en contrat à durée indéterminée, qui risquent gros s’ils se font prendre, mais plutôt les intérimaires qui
interviennent pour de courtes missions. Et la tentation est d’autant plus grande que les paquets contenant des DVD ou du matériel high-tech sont facilement repérables, par leur forme ou le nom de l’expéditeur… Du bout des lèvres, Jean-Claude
Sonet constate aussi que certaines régions sont plus touchées que d’autres.Christophe Dalla Riva, responsable du site de location de DVD-vidéo Cinesnap, est plus catégorique : ‘ Certains centres de tri sont extrêmement efficaces et comptent très peu de colis disparus, alors que
d’autres semblent gérés au jour le jour. Le sud-est est la zone la plus touchée, mais certains centres de la région parisienne sont aussi à éviter ‘
(voir la carte de France des retards).

Accélérer le suivi informatisé de la chaîne de livraison

Autre point sur lequel les cybercommerçants critiquent La Poste : les délais de réclamation. ‘ A partir du moment où un colis s’égare, il faut attendre 21 jours pour que La Poste, après enquête, nous
donne une explication. C’est un délai bien trop long ! Car dans le domaine de la vente sur Internet, il est essentiel de communiquer en temps réel. Et les clients s’inquiètent plus vite pour ce qu’ils commandent en ligne que pour ce qu’ils
achètent chez un commerçant traditionnel ! ‘,
affirme Tanguy Pincemin, en charge des partenariats et de la communication du site Mistergooddeal.Actuellement, les responsables de La Poste tentent de réduire ce délai à 14 jours, grâce à un suivi informatisé de la chaîne de livraison plus efficace que le procédé actuel. Ils doivent aussi expérimenter, dans les prochains jours,
un système d’alerte de réception des commandes en temps réel. Un service de La Poste enverra un SMS ou un courriel destiné à prévenir les clients de plusieurs sites d’e-commerce, dont Mistergooddeal, que le facteur est passé chez eux en leur absence
et qu’un colis les attend à leur bureau de poste habituel.Ces initiatives de La Poste sont plutôt bien accueillies par les cybercommerçants que nous avons interrogés. Xavier Garambois, directeur général d’Amazon.fr, veut mettre un bémol aux critiques de certains de ses confrères :
‘ Il faut tout de même relativiser : La Poste est une énorme machine, très complexe. Elle connaît certes des ratés, mais c’est inévitable. Et globalement, elle fonctionne plutôt bien. ‘Mais si pour l’instant elle achemine correctement 99 % des colis, comment La Poste parviendra-t-elle à corriger le tir pour les 1 % restants, ceux qui posent un problème ? Fin août, Microsoft a proposé à la poste
taïwanaise d’identifier ses colis à l’aide d’étiquettes RFID (des étiquettes dotées de puces d’identification). Un système qui permettrait de suivre les commandes à la trace et de prévenir le client, par SMS ou messagerie instantanée, de l’arrivée
de son colis. Une idée à suivre ?

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Benjamin Cherrière