Passer au contenu

Éditeurs de progiciels et SSI : convergence industrielle

Dans le secteur des technologies de l’information et de la communication, on a encore trop souvent tendance à opposer deux grands modèles de création de valeur…

Dans le secteur des technologies de l’information et de la communication, on a encore trop souvent tendance à opposer deux grands modèles de création de valeur : l’éditeur de progiciels (EP) et la société de services informatiques (SSI).En quoi le modèle de l’EP fait-il tant rêver ? Par la force d’un raisonnement microéconomique qui met en avant un triple levier de croissance : une structure de coûts majoritairement fixes qui fait tendre vers zéro le coût marginal de production ; une barrière à l’entrée garantie par l’innovation technologique incorporée dans le logiciel ; et, enfin, le bénéfice de la vente indirecte, qui doit permettre de vendre sans vendeurs ?” ou presque.A contrario, la SSI est réputée entravée dans son développement par trois handicaps : la composante majoritairement humaine ?” et donc capricieuse ! ?” des coûts de production, l’absence de barrière à l’entrée, et le coût du processus de vente directe. Cette opposition forcée masque en fait plusieurs points de convergence. Convergence en termes de structure de production. D’une part, les EP supportent d’importants coûts humains en R&D et marketing ?” et, trop souvent, faute de clients, leurs ventes réelles ne parviennent, après plusieurs années déficitaires, qu’à couvrir leur force de travail. Certains EP se trouvent ainsi réduits à n’être que des sociétés de servitium, forme contemporaine de la servitude antique… D’autre part, il existe des SSI fondées sur des infrastructures logicielles performantes, conférant un puissant levier de productivité de type industriel à ces sociétés de services outillées. Ainsi, d’un point de vue économique, il est plus pertinent d’opposer industrie à artisanat qu’EP à SSI. D’autant que, dans l’industrie du logiciel professionnel, il n’y a pas de modèle de pur “produit”.Tous les grands EP réalisent au moins 35 % de leur chiffre d’affaires en prestations de services associées à la vente de leurs logiciels. Convergence en termes de développement commercial. Les SSI ne sont pas sans protection : la marque, l’industrialisation du process de production, leur expertise métier et leur connaissance directe des clients, leurs partenariats technologiques avec les EP, voire leurs propres développements logiciels, sont autant d’armes efficaces. La convergence naît ici de l’interdépendance. Les EP sont dans une position théoriquement favorable pour se développer rapidement. Mais, en pratique, cela suppose le concours des SSI et, surtout, l’existence d’un marché véritable : l’absence théorique de freins n’a jamais remplacé la puissance réelle d’un moteur. Or, le marché du progiciel est loin d’être aussi vaste que celui des services informatiques. D’où la nécessité, pour les EP, de se déployer précocement à l’international, et d’utiliser la vente de services comme relais de croissance.Bref, du point de vue économique, la véritable opposition n’est pas entre EP et SSI, mais entre systèmes de production artisanal et industriel. Et comme en témoignent les nombreuses opérations de fusions-acquisitions croisées, les meilleures sociétés de chaque catégorie se rencontrent autour d’une organisation industrielle performante, dédiée à la délivrance de “solutions” informatiques. Cela pour mieux atténuer la distinction entre produit et service, qui, dans un domaine largement immatériel, n’a plus grand sens.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Thomas Defaye