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Croisade syndicale pour les droits des salariés de la net économie en Allemagne

Les travailleurs du secteur high-tech doivent désormais s’organiser pour défendre leurs droits, notamment lors des plans de licenciements. Mais à peine 1 % d’entre eux ont déjà poussé la porte d’un syndicat.

Le patron de l’agence web Rainer traverse l’immense loft transformé en bureau. Des dizaines de personnes travaillent devant des écrans. “Je n’ai pas encore fini le “screendesign”“, lui avoue un employé. “ Pas de problème. Tu le finiras ce soir à la maison“, répond Rainer d’un air jovial. Le boss poursuit son chemin à travers les allées. Tout à coup, il s’arrête à la vue d’une jeune femme. “Qu’est-ce que tu fous encore là ? Je t’avais dit de dégager d’ici !“, lance-t-il brutalement. La femme se prend la tête entre les mains et se met à pleurer. Sur l’écran du cinéma, apparaît le message suivant : “ Qui veillera à ce que le travail reste humain ? Qui, à part nous ? Signé : Fédération des syndicats allemands [DGB].” Cette campagne de publicité avait fait sourire à l’époque de sa diffusion, fin 2000. Les conflits sociaux n’existaient pas encore dans la net économie. Mais six mois plus tard, la campagne aurait été d’actualité.Avec la crise, les employés de la net économie allemande s’organisent pour défendre leurs droits, comme leurs collègues des secteurs traditionnels. Le conflit social de chez Pixelpark, l’agence web de Bertelsmann, a marqué un tournant. En mai dernier, à l’annonce d’un plan de licenciements, les 1 200 salariés ont élu un comité d’entreprise (CE) à la dernière minute tout en menaçant la direction de porter l’affaire devant les prud’hommes. “ Il n’était pas question de laisser partir un cinquième du personnel sans dire un mot “, explique Katja Karger, présidente du comité.Depuis plusieurs mois déjà, les CE fleurissent dans les entreprises de la net économie. “ Nous recevons régulièrement des appels téléphoniques d’employés qui nous demandent comment se monte un comité d’entreprise“, explique Wolfgang Müller, responsable à Munich de la branche IT du grand syndicat IG Metall (trois millions d’adhérents). “Beaucoup d’entreprises ont essayé de motiver leurs collaborateurs avec des stock-options. Avec la chute des cours, les gens se sont sentis floués. Les conditions de travail deviennent tout à coup frustrantes“, constate-t-il.Une étude menée par Poldi.net, une association spécialisée dans les relations entre internet et la politique, révèle que la professionnalisation du secteur et la crise ont poussé les employés à élire des représentants du personnel. “L’époque de la boîte entre copains est terminée“, remarque Philipp Stradtmann, le président de Poldi.net. “De plus, les entreprises reconnaissent la nécessité d’organiser un mode d’expression pour leurs salariés “, ajoute Christoph Dowe, responsable de l’enquête.

Une cible très intéressante

Parmi 255 entreprises cotées au Neuer Markt de Francfort, un quart dispose d’une représentation salariale. Plus l’entreprise est grande et plus les comités d’entreprise sont nombreux (50 % dans les unités de plus de 500 employés).Mais on estime à 1 % le nombre de syndiqués parmi les employés de la net économie. “Pour beaucoup de jeunes, il est plus important de disposer d’un portefeuille d’actions que d’une carte syndicale“, regrette Klaus Zwickel, le patron de l’IG Metall. Reste que “la chute des cours permet de faire augmenter la courbe de sympathie des syndicats traditionnels“, note Jürgen Peters, vice-président du syndicat. Pour IG Metall et l’autre grand syndicat des services, Ver.di, les 430 000 employés du secteur IT sont une cible intéressante pour compenser la perte dadhérents dans les secteurs traditionnels.

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Christophe Bourdoiseau à Berlin