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30 000 noms de domaine sensibles légalisés

L’Afnic met sur le marché des noms de domaine jusque-là interdits car trop polémiques. Les Français peuvent désormais acquérir chambres-a-gaz.fr ou cocaine.fr.

Abus-de-pouvoir.fr », « fascisme.fr », « pedophile.fr », « satan.fr »… Depuis le 1er juillet, tout un chacun peut déposer un nom de domaine composé de ces termes sensibles. Jusque-là, la loi sur les communications électroniques du 9 juillet 2004 prohibait l’enregistrement de toute adresse Internet « susceptible de porter atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs » (article L45-2). De même, les noms de domaine identiques ou semblables à ceux de la République française ou d’une collectivité territoriale sont protégés et difficiles à enregistrer pour une autre entité.

En octobre 2010, le Conseil constitutionnel a cependant jugé le texte insuffisant au regard de l’importance prise par cette question. Vu le « développement généralisé des services de communication au public en ligne » et leur « importance dans la vie économique et sociale », l’encadrement « du choix et de l’usage des noms de domaine affecte la liberté de communication et la liberté d’entreprendre », a-t-il estimé.

En attente du décret d’application

L’Afnic (1) publie sur son site une liste non exhaustive de termes désormais ouverts, sous certaines conditions, à l’enregistrement. Ils sont classés en plusieurs catégories significatives : crimes, infractions, libertés, santé, etc. L’attribution des noms de domaine correspondants est soumise à l’accord de l’association, qui gère le .fr. « Le demandeur doit justifier d’un intérêt légitime et agir de bonne foi pour l’allocation d’un terme interdit ou réservé », peut-on lire sur son site Internet. Une définition somme toute très vague.

« La loi recalibre le pouvoir d’enregistrement de l’Afnic en lui imposant de nouvelles obligations. Nous sommes toujours en attente du décret d’application qui définira les critères permettant de définir ce qu’est un “intérêt légitime” sur ces noms de domaine particuliers », explique Loïc Damilaville, adjoint au directeur général de l’Afnic. En attendant, les procédures d’attribution sont donc bloquées afin d’éviter d’éventuels impairs.

Des demandes pour « satan » et « cocaïne »

Mais, au-delà de ces mots susceptibles de choquer la sensibilité de certains, sont aussi concernés par cette ouverture les professions réglementées (chirurgien, avocat…), les protocoles Internet (e-mail, intranet…), l’Etat (armée, premier ministre…), les structures (agence, confédération…). Au total, ce sont 30 000 noms de domaine qui sont légalisés.

Parmi les demandes d’enregistrement déjà déposées auprès de l’Afnic, les termes polémiques ne sont pas légion. Il est possible de trouver quelques « conspiration », « satan » et « cocaïne », mais ce sont des termes plus anodins comme « mails », « huissier » ou « webmaster » qui constituent l’essentiel des dépôts.

Lors du dernier pointage, effectué le lundi 4 juillet, l’Afnic avait reçu 3 500 demandes. Comme c’est l’usage, la règle du premier arrivé, premier servi s’applique. « Les demandes sont horodatées. Nous vérifierons l’éligibilité de la première reçue d’après les critères qui seront précisés dans le décret. Si cette demande n’est pas éligible, nous passerons à la deuxième et ainsi de suite », explique Loïc Damilaville.

En cas de dérive par rapport aux déclarations faites à l’Afnic, un nom de domaine pourra toujours être confisqué, indique le gestionnaire des .fr.

(1) Association française pour le nommage Internet en coopération.


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Hélène Puel