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L’arme de la France pour neutraliser les satellites espions… sans les détruire

Notre pays prépare un système capable d’éblouir l’optique des engins des puissances hostiles, plutôt que de les anéantir par missile et risquer ainsi un éparpillement dangereux de débris spatiaux.

Au mois de mars dernier, l’Inde a pulvérisé l’un de ses propres satellites pour démontrer sa puissance et prouver sa capacité à combattre d’éventuels engins espions. Ce n’était pas une première, mais cela reste un acte grave, entraînant une augmentation des débris spatiaux pouvant entrer en collision avec d’autres satellites. Pour éviter d’en arriver à de telles extrémités, la France mise sur une technologie beaucoup plus douce et ciblée : une arme laser. Un projet présenté cette semaine au salon du Bourget sur le stand de l’Onera, le centre français de recherche aérospatiale.

GRAVES, un système de surveillance de l’espace

« Nous disposions déjà de GRAVES, un système européen de veille spatiale utilisée par l’armée de l’air française depuis 2005 et qui va être modernisé. Il nous permet de localiser et de suivre les objets hostiles dans l’espace », nous explique Thierry Michal, directeur techniques et des programmes Défense Aéronautique Espace de l’Onera. La question s’est ensuite posée : détruire ou rendre inopérants les satellites espions repérés ? C’est la seconde option qui a été retenue, dans le pur respect du Traité de l’espace signé en 1970 par la France et qui interdit toute forme de guerre dans l’espace. L’idée d’une arme laser a fait consensus. « Cela permet de neutraliser le satellite en endommageant ses panneaux solaires ou en éblouissant son optique afin d’éviter la prise de photo », détaille Thierry Michal.

De l’optique adaptative

Pour y parvenir, il faut réunir plusieurs briques technologiques. Notre pays pourrait projeter ces faisceaux lasers depuis ses bases aériennes militaires, sans avoir à investir dans de nouvelles infrastructures. Les détails sur la façon d’émettre cette source laser sont encore à l’étude. Le consortium Talos (Tactical Advanced Laser Optical System) monté et financé en 2018 par l’Agence européenne de Défense doit rendre sa feuille de route d’ici deux ans et réaliser les premières démonstrations.

Il s’agira d’associer plusieurs petits faisceaux dont l’énergie est concentrée sur la cible. C’est plus précis que l’option retenue par les Etats-Unis, consistant à utiliser un seul gros faisceau. Et pour être sûr d’atteindre l’objet malgré la dissipation de l’atmosphère, on recourt à des miroirs qui vont compenser les déformations de la trajectoire en opposition de phase. C’est de l’optique adaptative, une technologie parfaitement maîtrisée par l’Onera. La portée dépend de la puissance de la source et peut aller d’une centaine à mille kilomètres.

Aujourd’hui, nous sommes devenus dépendants des satellites dans les domaines des télécommunications, de la géolocalisation, de l’audiovisuel ou encore de la défense. Or, les objets dans l’espace vont encore se multiplier à l’avenir entre les nanosatellites et les constellations géantes de type OneWeb ou Starlink. Enfin, il y a davantage de pays et d’acteurs privés en mesure d’investir l’espace. La nécessité n’est plus de savoir seulement ce qui s’y passe mais aussi de pouvoir se protéger. Car l’espace est en passe de devenir le nouveau terrain de confrontation des puissances internationales. Et la situation devient critique. Au mois de septembre dernier, la ministre des Armées Florence Parly avait révélé que le satellite russe Luch-Olymp avait espionné le satellite télécoms militaire franco-Italien Athena-Fidus.

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Amélie CHARNAY