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5G : pourquoi ce futur standard va révolutionner la téléphonie mobile

La nouvelle génération de standard vient d’être lancée en Corée du Sud, en Suisse et dans quelques villes américaines. On vous explique ce qu’elle va changer.

La 5G n’est plus un sujet réservé aux spécialistes. Les premiers smartphones compatibles sont sortis et quelques pays ont déjà ouvert leur réseau pour le grand public. On vous rappelle l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur ce standard de téléphonie mobile qui va marquer une rupture inédite avec les technologies précédentes.

  • Quelles fréquences ?

En France, il y aura deux fréquences majeures : le 3,5 GHz et le 26 GHz. Le 3,5 GHz va essentiellement servir à couvrir le territoire et faire l’objet d’une attribution aux enchères fin 2019. Mais c’est le 26 GHz qui permettra de doper le débit en offrant des largeurs de spectre inégalées. Les bandes millimétriques se situent en théorie au-dessus des 30 GHz. Par abus de langage, on attribue le qualificatif de millimétrique dès que l’on dépasse les 24 GHz. Cela s’applique donc aussi au 26 Ghz, la bande de fréquence haute retenue en Europe pour la 5G. Elle est occupée actuellement en France par les satellites, l’armée et les faisceaux hertziens entre sites fixes. La libération du 26 GHz ne devrait pas intervenir avant plusieurs années dans notre pays.

Les opérateurs français auraient, en outre, la possibilité de recourir en complément au 700 MHz -actuellement consacré à la 4G- et peut-être au 1400 Mhz.

Un prototype de station de base présenté par Orange lors du MWC 2018. Les antennes relais ne se présenteront plus de la même façon. Elles seront intégrées dans des blocs.
01net.com
  • Quelles technologies ?

Plusieurs technologies vont se combiner pour améliorer l’efficacité spectrale de la 5G. Commençons par le massive MIMO, qui consiste à utiliser un grand nombre d’antennes en émission et en réception. Les stations de base macro seront dotées de plusieurs centaines de petites antennes (64 en émission et 64 en réception), tandis que nos smartphones pourront en comporter jusqu’à 8×8, selon le concepteur de puces Qualcomm. Résultat ? Cela permet d’augmenter les capacités en débit entre l’émetteur et le récepteur et de réduire les interférences.

Un module antennaire précédent de Qualcomm.
Qualcomm

Citons aussi le beamforming, une technique de traitement du signal qui permet de faire converger les ondes émises par une station de base précisément vers les mobiles. Et non plus d’arroser sans distinction tout l’environnement, ce qui représentait une grande perte d’énergie. Le beamtracking remplit le même objectif quand les utilisateurs sont en mouvement. 

La 5G va enfin pousser la virtualisation des réseaux à son paroxysme avec le network slicing, qui se définit comme la capacité à offrir des réseaux  de bout en bout dédiés, personnalisés et virtualisés à partir d’une même infrastructure partagée. Cela revient à découper le réseau en tranches logicielles. On pourra ainsi dédier une couche spécifique à chaque usage et faire varier les paramètres du réseau à la carte pour chaque entreprise. L’enjeu sera notamment de pouvoir l’adapter en temps réel et de donner la priorité aux applications les plus critiques, comme les secours par exemple, pour leur garantir une latence minimale.

Voilà pour le principal mais comme tous les standard de téléphonie mobile, la 5G continuera à évoluer après l’ouverture des premiers réseaux. On parle, par exemple, d’intégrer le satellite à la 5G d’ici 2019, pour compléter notamment la couverture et pénétrer des zones inaccessibles (océans, montagnes).

Une small cell, une petite antenne qui pourrait venir compléter les réseaux macro déjà existants.
01net.com – Une small cell, une petite antenne qui pourrait venir compléter les réseaux macro déjà existants.
  • Quel matériel ?

La 5G nécessitera d’installer des antennes compactes, intégrées avec le bloc radio et surtout intelligentes, c’est-à-dire embarquant des puces et des algorithmes de traitement du signal pour les rendre capables d’identifier l’emplacement des équipements des utilisateurs connectés et de focaliser le signal sur eux.

Ce n’est pas tout. A côté des traditionnelles antennes macro destinées à assurer la couverture, de nouvelles small cells nichées dans les abribus ou les réverbères apporteront débit et capacité.

Il faudra aussi déployer de nouveaux équipements dans les coeurs de réseau et, enfin décentraliser les data center. Ces derniers devront être multipliés et installés au plus près des utilisateurs pour garantir vraiment cette latence minimale promise par la 5G. Ce qui représente des investissements considérables.

Satellite, Eutelsat
Eutelsat – Vision d’artiste d’un satellite en orbite.
  • Quelles performances ?

La 4G nous a fait basculer dans l’ère de l’Internet Mobile en nous offrant un débit supérieur à l’ADSL sur nos smartphones. Avec la 5G, nous allons atteindre les performances de la fibre. Les bénéfices par rapport à la 4G sont impressionnants avec des débits et une capacité au moins multipliés par 10, et une latence divisée par 10. Toutefois, le réseau ne sera pas tenu de fournir le meilleur des trois simultanément et dans tous les cas. Les priorités seront différentes selon les cas d’usage. Trois scénarios ont été définis par l’ITU (Union Internationale des communications) : fiabilité et rapidité pour les applications critiques, grande capacité de calcul et d’échanges de données pour l’IoT, et priorité à la vitesse pour les utilisateurs lambda.

Le diagramme définissant les priorités de la 5G suivant les cas d'usage.
UIT/ITU-R M.2083-0 (9/2015).

Les performances fixées par l’ITU pour le grand public paraissent modestes : les opérateurs devront fournir au minimum 100 Mbit/s en débit descendant et 50 Mbit/s en montant par utilisateur. Mais 1 Gbit/s reste l’objectif symbolique des industriels, car il va falloir faire rêver les consommateurs et les convaincre de passer à la 5G.

Les ondes millimétriques devraient même permettre à terme d’atteindre entre 4 et 10 Gbit/s en téléchargement, en théorie. Tout dépendra cependant de la bande de fréquence et de la largeur de spectre utilisés. Et il y aura probablement des disparités sur les territoires. Le risque est grand que les premiers utilisateurs grand public de la 5G ne voient pas la différence en termes de débit, le nouveau standard de téléphonie devant surtout servir à décongestionner la 4G dans un premier temps.

Ajoutons, en outre, que le débit de la 5G sera à ajouter à celui de la 4G tant que les opérateurs utiliseront une 5G non standalone, c’est-à-dire dépendant d’un coeur de réseau 4G. La latence devrait tourner, elle, autour de 1 ms pour certaines applications critiques mais s’élèverait à 10 ms pour le grand public. Ce qui restera toujours deux fois mieux que la 4G.

Notons que la 5G a pour objectif  d’absorber jusqu’à 1 million de connexions par kilomètre carré. Et les utilisateurs recevront le signal… même s’ils se déplacent à 500 km/h.

Un test de 5G à plus de 1 Gbit/s au MWC 2018.
01net.com
  • Quels usages ?

Débit, capacité, latence : trois points forts de la 5G qui vont apporter plus de confort dans son quotidien à l’utilisateur lambda. Mais aussi permettre de généraliser des usages gourmands en bande passante. Ce qui laisse présager le développement des applications de réalité augmentée et de réalité virtuelle sur nos smartphones. On va vu aussi récemment aux JO d’hiver de Pyeongchang comment la 5G pourrait transformer notre façon de regarder le sport, facilitant les expériences de second écran plus immersives où le spectateur peut choisir sa réalisation et s’attarder sur des vues embarquées de sportifs.

La vraie révolution se trouve cependant ailleurs et ne touchera pas directement le grand public mais les industriels. La 5G va être capable d’absorber le trafic de dizaines de milliards d’objets connectés pilotables à distance avec une rapidité et une fiabilité extrêmes, ouvrant la voie à davantage de communications entre machines et d’automatisation dans tous les secteurs. A commencer par la voiture autonome, mais aussi la circulation de véhicules en convoi, la télémédecine, des usines dirigées à distance où les robots circuleront sans entrave.

  • Quelles échéances ?

Côté standardisation, la messe est presque dite. Le 3GPP a défini deux standards de 5G NR (New Radio). Le non standalone (fonctionnant encore avec un coeur de réseau 4G) et le 5G standalone (totalement autonome). Ils permettent déjà de lancer la 5G. Il faudra encore que l’UIT entérine officiellement les fréquences fin 2019 et achève le processus de standardisation en 2020 pour qu’elle soit officielle. Le premier usage accessible sera celui du grand public. Les entreprises, elles devront attendre 2021/2022 pour bénéficier du network slicing.

En France, le matériel réseau des équipementiers est prêt et les opérateurs s’activent actuellement pour tester la 5G sur le terrain, comme Bouygues Telecom l’a démontré au mois de juillet dernier. Orange et SFR se montrent également très actifs, à l’inverse de Free Mobile qui reste extrêmement discret sur le sujet. Ils attendent tous maintenant la mise aux enchères des fréquences qui devrait intervenir cet automne pour un déploiement début 2020. Il est cependant possible que certains sites pilotes fassent l’objet, avant ces dates, d’une ouverture au grand public, d’autant que les smartphones 5G sont prêts. Le gouvernement vient de poser ses conditions sur l’attribution des fréquences pour la bande située entre 3,4 et 3,8 GHz.

Ce routeur pré-commercial de Huawei est utilisé actuellement dans les tests d'Orange, Bouygues Telecom et SFR pour tester la 5G.

Le Mobile World Congress de Barcelone a été l’occasion pour bon nombre de constructeurs de dévoiler leurs premiers appareils compatibles. Les sorties commerciales vont avoir lieu maintenant tout au long de l’année. Quatre modèles de smartphones sont déjà accessibles : la version 5G du Galaxy S 10, le Moto Z3 avec son Moto Mod 5G, l’Oppo Reno 5G et le Mi Mix 3 5G, ces deux derniers étant les seuls disponibles sur le marché européen. Celui de OnePlus ne devrait pas tarder. Quant au Mate X 5G, il est attendu pour le mois de juin.

Les smartphones Android ont donc pris une bonne longueur d’avance, qu’ils soient équipés de la puce modem de Qualcomm ou de celle de Huawei. Apple, lui, avait tout misé sur Intel qui vient de jeter l’éponge. Apple et Qualcomm ont mis fin à leur intense bataille judiciaire et trouvé un accord pour que le second fournisse au premier une puce modem 5G dans les meilleurs délai. Malgré cela, il n’est pas certain que le premier iPhone 5G sorte en 2020 comme prévu.

Le premier pays a avoir officiellement lancé la 5G est la Corée du Sud. Les trois opérateurs nationaux ont ouvert simultanément leur réseau le 3 avril dernier. Les Etats-Unis ont suivi le même jour sous la houlette de Verizon à Chicago et Minneapolis. L’opérateur proposait déjà depuis la fin 2018 un service FWA (fixed wireless access), de la 5G utilisée pour un usage fixe au domicile des utilisateurs. La Suisse a été la première à faire de même en Europe le 10 avril. Devraient maintenant suivre l’Australie, la Nouvelle-Zélande, les pays du Golfe, la Chine, puis le Japon pour les JO d’été 2020. En Europe, les pays scandinaves, l’Angleterre, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne devraient être opérationnels avant la France, avec des commercialisations dès 2019.

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Amélie Charnay