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Traque sur Internet, mode d’emploi

Sommes-nous vraiment “ pistables ” sur Internet ? Pour en avoir le cœur net, rien de mieux que de partir dans une traque virtuelle !

Le président de la Commission nationale informatique et liberté, Alex Türk, s’inquiétait récemment de la capacité hors du commun de Google à dresser un portrait précis de tout un chacun. Ces informations sur notre vie, que nous laissons en remplissant un formulaire par-ci par-là, en contribuant à une discussion, sont-elles vraiment faciles à retrouver et à décrypter ? Est-il aussi aisé de dresser le portrait-robot de quelqu’un, à partir de quelques informations embryonnaires, voire un simple nom ? Pour en avoir le cœur net, nous en avons fait l’expérience.

Qui est notre rédacteur en chef ?

Quel meilleur sujet que notre rédacteur en chef… Car, que sait-on réellement de lui, si ce n’est qu’il est installé dans la place depuis 500 numéros ? Pas grand-chose, finalement… Son âge ? Son statut familial ? Son adresse ? Ses activités antérieures ? Un gars louche… Endossant notre costume de détective, nous dégainons notre arme : Google.Première étape, une simple requête sur Ivan Roux dans le moteur de recherche. Résultat : 959 000 réponses… Avec des risques d’erreurs très importants pour cause d’homonymie. Dès le cinquième lien, le doute devient intense, puisque l’orthographe du prénom n’est pas la même… Le septième lien nous renvoie vers la fiche d’un homonyme complet sur Copains d’avant ! Que penser donc du premier lien, une galerie de photos dont certaines, de New York en 1985, sont créditées Ivan Roux ? Il faut affiner la recherche, trier les résultats, recouper les informations. Le Googling ne permet pas de tirer le portrait d’un inconnu en trois secondes.On formule alors plus strictement la requête avec l’expression exacte : “ Ivan Roux ”. Google ne cherche plus tous les mots cités, mais uniquement la suite de mots telle quelle. Nous utilisons plusieurs variantes : Ivan Roux, Roux Ivan, I Roux, ivanroux, etc. La grande majorité des liens trouvés confirme qu’Ivan Roux est bien le rédacteur en chef de Micro Hebdo, d’où la nouvelle variante “ ivan roux ” micro hebdo. Le site le plus couramment associé à Ivan est le forum de Micro Hebdo. Une recherche au sein de celui-ci nous indique qu’Ivan s’y fait appelerSuper­dupond et y est administrateur. Cela tombe bien, les modérateurs se présentent tous ! Et voilà… Ivan le dit lui-même, sur le forum de Micro Hebdo, il a 47 ans, est pacsé, et a trois enfants. Pas si mal pour quelques minutes de recherche.

Le portrait se précise…

Avec la variante ivanroux, on découvre qu’Ivan est facétieux : il aurait, selon un blog, déposé un nom de domaine amusant (que nous ne donnerons pas ici, car il fournit immédiatement son adresse et son numéro de téléphone personnels). Justement, la vérification est simple, en passant par le site www.dnsstuff.com, on obtient rapidement pour le dépositaire du nom de domaine une adresse à Paris, un numéro de téléphone ainsi qu’une adresse électronique. Il semblerait également qu’Ivan ait déposé d’autres noms de domaine. Nous aurions pu les trouver, en passant par un site de recherche inversée de dépositaires de noms de domaine, mais le service est très cher, donc nous nous sommes abstenus. La pêche était déjà bonne !Une recherche dans les pages jaunes confirme l’adresse d’Ivan et, par une recherche inversée de numéro de téléphone (“ à qui est ce numéro ” sur pagesjaunes.fr), nous découvrons le nom de sa concubine, qui partage le même numéro de téléphone. En continuant les recherches, on découvre qu’Ivan a fréquenté le lycée Buffon à Paris, qu’il était en 1988 rédacteur au journal Tilt, qu’il a travaillé aussi au magazine Science & Vie Micro… Le portrait se précise.Abandonnant Google pour les réseaux sociaux, l’effort se trouve rapidement couronné de succès : Ivan a fait des études à Jussieu (section amiante…), est batteur, apprécie particulièrement François Truffaut et Stanley Kubrick, et l’on découvre au passage quelques-uns de ses amis.

La prudence est de rigueur

Un retour sur Google nous permet de garder le meilleur pour la fin : Ivan a bien trois enfants, et sur le blog de l’un d’entre eux (repérable grâce à une banale requête), nous découvrons des photos de jeunesse du “ plus bel homme du monde ”. Voilà… L’enquête est bouclée. Ou presque. Très nombreuses, les informations trouvées demandent malgré tout confirmation. Ivan était-il bien à New York en 1985, comme le premier lien sur Google le laisse entendre ? Seule sa confirmation de vive voix a permis de s’en assurer.Ce qui permet de tirer une double conclusion de cette traque sur Internet : oui, de très nombreuses informations personnelles sont accessibles par tout le monde, pour peu que la cible ait eu des activités en ligne. Mais surtout, cette pléthore d’informations doit être prise avec circonspection et recoupée avec des informations sûres, tant les doublons, les homonymies, les pures erreurs, viennent tout brouiller.

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Stéphane Viossat