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Réservation en ligne : voyages tous frais cachés

Plus cher à l’arrivée : bienvenue sur les sites de voyages où les prix d’appel se transforment vite en facture salée.

Des billets d’avion affichés à des tarifs défiant toute concurrence, des prix d’appel attractifs, le Net regorge d’offres de voyage qui visent à appâter le consommateur. A la clé, de bonnes affaires… mais aussi quelques mauvaises surprises. Car certaines annonces alléchantes de prime abord perdent une grande partie de leur attrait dès qu’elles sont étudiées de plus près.

A la lecture attentive des différentes clauses des contrats, il apparaît qu’aux tarifs de départ s’ajoutent diverses taxes, des frais annexes, des assurances qui viennent gonfler la facture au moment de finaliser la transaction. Pour l’internaute non averti, l’étonnement est à la mesure du mécontentement. Publicités mensongères, pratiques déloyales ou opaques… Les plaintes se sont multipliées à l’encontre de certains sites et compagnies aériennes qui n’hésitent pas à abuser le consommateur qui s’essaie à la réservation en ligne en toute confiance.

Il y a un an, une enquête de la Commission européenne a épinglé 137 sites Web des Etats membres de l’Union européenne pour infraction au droit européen de la consommation, ce qui correspond à un site sur trois. Au cœur du délit, des offres litigieuses visant à tromper les internautes en quête de billets d’avion à bon prix.

Taxes, charges, surcoûts…

Trois pratiques ont été mises en cause : une tarification mensongère, erronée ou prêtant à confusion pour 58 % des sites contrôlés ; des irrégularités dans les clauses contractuelles déplorées pour 49 % d’entre eux et l’indisponibilité des offres proposées pour 15 %. Souvent la tarification ne fait apparaître ni les taxes d’aéroport ni les frais de réservation, de carte de crédit ou d’excédent de bagage.

La commissaire à la Consommation, Meglena Kuneva, avait donc donné un an aux sites concernés, soit jusqu’au 1er mai 2009, pour cesser ces pratiques.

Concernant la réservation de billets d’avion sur Internet, il ressortait ainsi qu’un tiers des internautes se voyaient escroqués ou induits en erreur. Pointés du doigt, les 137 sites représentant 80 compagnies aériennes, avec en dernier de la classe l’irlandaise Ryanair. « Il n’est pas acceptable que les consommateurs se fassent plumer », déclarait alors Meglena Kuneva. Depuis, la commissaire à la Consommation a mis en place, le 1er novembre 2008, un règlement obligeant les compagnies aériennes des pays de l’Union européenne à afficher les prix des billets « toutes charges et tous frais compris ». Une telle mesure devait permettre aux internautes de comparer plus facilement les offres des différents transporteurs.

Un an après le début de l’enquête, nouvel état des lieux. Selon un récent rapport publié par Bruxelles, il ressort que 52 compagnies se sont alignées sur les injonctions de mise en conformité de la Commission, parmi lesquelles TAP, Iberia, SAS, Finnair ou Virgin Atlantic. Et 115 sites sur les 137 épinglés respectent maintenant la législation européenne.

En revanche, 15 compagnies et 22 sites Internet n’ont pas encore réglé la totalité des problèmes, principalement l’affichage des prix. Il s’agit, par exemple, de Ryanair – société décidément peu réactive –, EasyJet, Alitalia ou Lufthansa. « Le taux de mise en conformité avec la législation est à présent supérieur à 50 % », se félicite toutefois la commissaire. La Commission va maintenir sa vigilance et, ajoute-t-elle, « évaluera ensuite la nécessité de mesures supplémentaires ».

Dans son dernier rapport datant de 2007, la Direction générale de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait déjà passé au crible une trentaine de sites dont vingt-et-un français. La palme des infractions revenait aux sites de voyages avec, comme principaux points litigieux relevés, l’absence de mentions obligatoires (64,9 %), les publicités trompeuses (9,7 %) et le non-respect des règles de publicité de prix (9,1 %).

Transactions litigieuses

Selon Sylvie Garnier, la porte-parole de la DGCCRF, « les sites impliqués ont réagi rapidement et se sont mis en conformité avec la loi. Il demeure encore quelques ambiguïtés sur les prix affichés et certaines pratiques qui prêtent à confusion ». Les plaintes des consommateurs portent le plus souvent sur les prix encore annoncés hors taxes et sur des surcharges de coûts (taxes d’aéroport, carburant, bagages), comme le fait d’inclure automatiquement une assurance dans le contrat par le biais d’une case précochée.

« Le consommateur doit être très vigilant et lire attentivement chacune des clauses de son contrat avant d’acheter en ligne. Il faut qu’il vérifie bien que toutes les options proposées lui sont utiles et doit s’assurer qu’il y a un contact téléphonique en France où l’on peut joindre le site en cas de problème », prévient la porte-parole. A ces précautions s’ajoute celle, élémentaire, d’imprimer tous les documents justificatifs des transactions effectuées en ligne pour en conserver la trace. Car, en cas de plainte, le problème est souvent de démontrer qu’il y a eu tromperie, les transactions se passant en temps réel.

L’expérience de Philippe est particulièrement édifiante. « J’ai vécu un cauchemar lors d’une tentative de réservation de billet d’avion + voiture pour Marseille. Le tarif que j’avais sélectionné n’était plus disponible au moment de cliquer ; donc, je me suis rabattu sur un autre tarif, un peu plus cher. Au moment de payer, et après avoir communiqué mes coordonnées de carte bancaire, le site m’annonce que ma transaction ne peut pas aboutir. Je leur téléphone immédiatement pour m’entendre dire alors que le tarif affiché quelques instants plus tôt n’était plus bon. Entre-temps, le prix avait augmenté de 60 euros. J’ai bien sûr refusé cette offre, mais je me suis retrouvé le bec dans l’eau et avec un doute quant à l’utilisation de mes données personnelles que le site avait enregistrées », raconte ce commercial très énervé par sa mésaventure sur Internet.

« Les moteurs de recherche mettent entre les mains d’amateurs des outils professionnels, observe le responsable de la communication chez Opodo, Xavier Rousselou. Avec ce nouveau marché émergent du low cost, les internautes ne sont pas encore au fait de toutes les subtilités tarifaires des compagnies aériennes. » Les décalages entre l’offre et les dates des demandes, les fluctuations de prix, la variété des formules proposées nécessitent une bonne connaissance des rouages de la réservation en ligne. D’autant que les ventes sur Internet dans le secteur du voyage continuent d’exploser malgré la crise.

Profusion et confusion

Les internautes ont rapidement compris que c’est là que se trouvent les tarifs les plus compétitifs, les frais les moins élevés avec des prestations standardisées. A cela s’ajoutent le confort d’effectuer ses recherches tranquillement chez soi 24 h/24 et surtout la possibilité de comparer les offres, produits ou services en un clic. « Les consommateurs sont mieux informés qu’auparavant et de plus en plus experts », constate Xavier Rousselou. Une meilleure connaissance de la pratique de la réservation en ligne et une vigilance accrue sur l’application de la réglementation devraient permettre une meilleure lisibilité des offres et des transactions.

Le scepticisme demeure néanmoins chez plusieurs acteurs du secteur. Ces derniers voient, en effet, dans le boom du low cost et de ses tarifs toujours plus variés et attractifs des causes de confusion. « Plus le marché se développe, plus les sources d’informations se multiplient, et plus les tarifs se complexifient. Nous n’avons pas encore constaté d’amélioration sur le plan de la transparence des prix depuis un an », conclut Pierre Bonelli, président-directeur général de Liligo, moteur de recherche de voyages.

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Frédérique Crépin