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Les combines des fabricants pour gonfler les prix

L’heure est à la baisse des prix, excepté pour certains produits informatiques. Pire, quelques industriels augmentent même quelques prix sans raison apparente.

Moins de 3 euros : c’est le prix plancher d’une cartouche d’encre pour imprimante chez Auchan. A ce tarif, bien sûr, il ne s’agit pas d’un produit portant la marque d’un grand constructeur, mais d’une cartouche d’encre
compatible. Son prix de revient pour le supermarché : 50 centimes environ. Acheter une cartouche de marque coûte bien plus cher, au minimum 15 euros pour de l’encre noire.Alors que le prix des imprimantes des quatre grands spécialistes (Canon, Epson, HP et Lexmark) baisse, les tarifs de leurs encres restent élevés depuis quelques années. Un prix tout à fait justifié pour Bruno Monegier du Sorbier,
responsable marketing chez HP : ‘ L’encre, ce n’est pas de l’essence. Nous investissons énormément, pour à chaque fois innover avec des formules différentes. ‘ Voire : l’investissement de HP
en recherche et développement sur l’encre est d’environ 1 milliard de dollars par an. Un chiffre impressionnant… Mais à relativiser par rapport aux profits de la division Image et impression, qui a rapporté quelque 3,5 milliards de
dollars au constructeur pour l’année 2003. Un pactole que les fabricants d’imprimantes n’entendent pas partager avec des constructeurs de cartouches compatibles.Pour verrouiller le marché, ils intimident le consommateur : les encres des marques sont spécifiquement recommandées et les dégâts causés par une cartouche compatible, non garantis. Seulement voilà : la Commission européenne
commence à s’intéresser de près aux bénéfices considérables de l’encre et mène l’enquête.Pour Blandine Poidevin, avocate du cabinet Jurisexpert.net, ‘ il est fréquent qu’un marché concentré [comme celui des imprimantes, NDLR] puisse nuire à la concurrence. Et même déboucher sur
des ententes sur les prix, à tous les coups condamnables. ‘
L’actualité pourrait lui donner raison dans une autre affaire : depuis mars, les plus importants fabricants des composants utilisés sur les barrettes mémoire
(Samsung, Infineon, Micron) sont suspectés aux Etats-Unis de s’être entendus pour faire grimper leurs tarifs en 2001.Mais ce ne sont pas les premiers soupçons qui pèsent sur ce marché. Par le passé, les prix de la mémoire ont flambé anormalement à plusieurs reprises. Mais des échanges d’e-mails interceptés parles enquêteurs pourraient aujourd’hui
mettre à jour un coup monté. Et même démonter un éventuel cartel.Un domaine sur lequel aucune enquête n’a jamais été lancée : celui des accessoires. En visitant le site Cdiscount, nous sommes tombés sur deux très bonnes affaires : une housse de rangement de 12 CD à 1,50 euro et
un sac pour ordinateur portable à tout juste 15 euros. Une aubaine ! Car les promotions sont très rares sur le matériel de rangement. En général, les mêmes produits sont vendus autour de 5 euros pour la mini-boîte à CD et
30 euros pour une simple sacoche en tissu.Car c’est sur ce type d’accessoires que les vendeurs de high-tech regonflent leurs marges, souvent rognées avec des remises sur les lecteurs de DVD, les appareils photo numériques ou encore les ordinateurs. Ces marges pourraient
monter jusqu’à 80 % sur certains accessoires !Le fondateur d’un site Internet de commerce de produits high-tech bien connu nous confiait récemment qu’‘ une boîte de rangement en nylon de 100 CD vendue 12,50 euros ne coûte pas plus de
1,50 dollar chez le fabricant ‘.
Tous ces accessoires sont produits à des coûts ridicules en Asie (souvent en Chine). Et leur commerce est trop juteux pour casser les prix à tous crins…

Le pack commercial fait recette

Autres abus récurrents : ceux des marques protégées par un monopole de fait, qui manipulent leurs étiquettes à leur guise. Microsoft s’arrange avec les fabricants de PC pour commercialiser des machines avec son système
d’exploitation préinstallé. Du coup, le consommateur n’a pas le choix : en achetant son matériel, il passe par le ‘ péage ‘ Microsoft.En France, un consommateur a réussi l’an passé à se faire rembourser les produits Microsoft installés sur l’ordinateur HP qu’il venait d’acquérir. Tarif de la remise : 261 euros, soit 25 % du prix de l’ordinateur !
Voilà comment la firme de Bill Gates engrange jusqu’à 8 milliards de dollars de bénéfices par an.Un bon marketing est parfois aussi efficace pour maintenir les enchères sur un produit. L’arme fatale ? Le pack commercial. Cette pratique a très bien réussi au géant américain du jeu vidéo Electronic Arts. En quatre ans, la
société n’a jamais baissé le prix de son célèbre jeu, Les Sims. Au contraire, l’éditeur a multiplié les disques additionnels à son jeu (nouveaux décors) et, année après année, les a ajoutés au jeu original dans différents
coffrets (Deluxe, Double Deluxe, Triple Deluxe) vendus à chaque fois environ 55 euros.‘ Une affaire très rentable, car l’essentiel des coûts de développement a été amorti avec le jeu d’origine ‘, note Laurent Michaud, analyste à l’Idate, un cabinet d’études européen
spécialiste des télécoms et des jeux vidéo.

Logiciels antivirus : un filon juteux

Mais les rois du package, ce sont les éditeurs d’antivirus. Ils commercialisent désormais leurs logiciels dans des suites de sécurité de plus en plus complètes, capables de chasser les e-mails publicitaires indésirables (spams), les
logiciels espions (spywares) ou d’assurer le contrôle parental. ‘ Un bon antivirus et un pare-feu suffisent pour protéger correctement les surfeurs et beaucoup de logiciels gratuits sont suffisamment efficaces pour faire le
reste ‘
, admet un professionnel de la sécurité informatique.Mais qu’importe, puisque l’affaire est juteuse. ‘ Les packs constituent déjà la majorité de nos ventes ‘, assure Eric Nowak, vice-président de McAfee dont le pack sécurité est, par
exemple, vendu 78 euros contre 55 euros pour le seul antivirus.

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Guillaume Chazouillères